Dans une contribution publiée par la Banque mondiale, Julian Lampietti, spécialiste principal du secteur du développement rural, présente plusieurs options stratégiques pour tenter de résoudre la crise alimentaire qui prévaut actuellement dans la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA). Il commence par préciser que l'autosuffisance et la sécurité alimentaire ne recouvrent pas la même réalité. L'autosuffisance sous-entend que l'on produit entièrement la nourriture que l'on consomme. La sécurité suppose que l'on a accès à de la nourriture à un coût abordable. Financer l'autosuffisance aujourd'hui se fera aux dépens des générations futures en ce sens que les investissements très importants qu'il faudra réaliser dans la gestion des terres et des eaux pour réaliser un tel objectif détourneront des ressources de secteurs d'importance primordiale tels que l'éducation et la santé. Cela étant, les gouvernements de la région MENA doivent, en tout premier lieu, améliorer l'accès à moindre coût des populations à la nourriture sans pour autant bloquer les ressources dont elles ont besoin pour vivre de manière productive et en bonne santé. Si les populations sont productives et en bonne santé, elles apporteront aussi une plus grande contribution à la vie de la société. Ceci est particulièrement vrai dans les zones rurales où vit la majorité des populations démunies dans la région MENA. L'autre problème fondamental auquel il faudrait faire face , selon le même spécialiste, est le degré d'exposition à l'instabilité des prix des denrées alimentaires sur les marchés internationaux. Il n'est nullement possible de contourner la réalité, qui est que les pays de la région MENA devront acheter une part considérable - et croissante - de leur nourriture sur les marchés internationaux. La solution consiste à gérer ce facteur de vulnérabilité de manière différente et novatrice afin de prévenir les perturbations des prix des denrées alimentaires tout en évitant la faillite. Le moyen le plus rapide et le plus facile d'aider les ménages en cas de hausse des prix des denrées alimentaires , selon Julian Lampietti, est de mettre en place un dispositif permettant de distribuer de l'argent aux populations plus rapidement et de manière plus rationnelle. Ceci suppose que les populations pourront ensuite acheter la nourriture qui est disponible. Il est important de reconnaître que l'accès à la nourriture est une préoccupation pour nombre de gouvernements de la région MENA. Toutefois, l'autosuffisance n'est pas la solution à ce problème car elle est à la fois peu pratique et trop onéreuse. La solution dépend des ressources naturelles et des moyens financiers disponibles, mais aussi de la disponibilité des responsables politiques à prendre des risques. Certains pays qui importent presque tout le blé qu'ils consomment comme la Jordanie doivent s'efforcer davantage à assurer le stockage à moindre coût. D'autres pays comme la Syrie peuvent souhaiter investir davantage dans les systèmes de culture pluviale. Le secteur privé doit jouer un rôle plus actif dans les pays où les marchés fonctionnent bien et l'Etat doit s'en tenir à une fonction de réglementation. Là où les marchés ne fonctionnent pas de manière efficace ou manquent de densité, l'intervention des pouvoirs publics pourrait se trouver tout à fait justifiée. L'activité de stockage de céréales en est un bon exemple. De bonnes raisons militent en faveur du contrôle de cette activité par le secteur public ou le secteur privé. Mais, ce qui importe, c'est d'aborder la question dans sa globalité. Si la concurrence est suffisamment garantie au sein du secteur privé, alors il est probablement justifié de la confier au secteur privé. Si l'activité est contrôlée par le secteur public, il faut alors veiller surtout à l'efficacité des opérations et à la gouvernance. Dalila B.