Après avoir rejeté le traité de Lisbonne en 2008, les Irlandais ont changé d'avis, hier, à une large majorité (67,13 %). Mais la République tchèque et la Pologne freinent encore. "Ouf ! Cette fois c'est bon. Nous avons dit ta (oui en gaélique) à l'Europe ! Il était temps ! " Maureen, infirmière de 32 ans, a voté près du Dublin Castle, construction massive en briques rouges, dont la tour date du XIII e siècle. C'est dans cette relique médiévale qu'ont été communiqués les résultats officiels du second référendum sur le traité de Lisbonne, que les Irlandais avaient refusé d'approuver l'année dernière, avec 53,4 %. " Une victoire écrasante ", se félicite Dick Roche, le secrétaire d'Etat aux Affaires européennes (67,13 %). " Convaincante ", admet Declan Ganley, le milliardaire allié de Philippe de Villiers aux dernières élections européennes, et champion du non. Il ajoute que ce sont des " Irlandais terrifiés " par la récession qui ont approuvé le traité. La rousse Maureen, qui a eu peur, " jusqu'au dernier moment, que la catastrophe ne se reproduise ", en convient, à demi-mot. " La crise économique, le chômage qui a triplé en quelques mois, les fermetures d'entreprises ont certainement joué, analyse-t-elle. Nous avons pris conscience que sans l'Europe, nous étions perdus. " Pedrear Murphy, 21 ans, étudiant au Trinity College, précise : " Les Européens ont fait des efforts en direction des plus récalcitrants pour les convaincre. L'avortement reste interdit, nous gardons notre faible fiscalité pour les entreprises et surtout notre neutralité militaire ! La Banque européenne a aussi sauvé notre système bancaire. Ce n'est pas rien! " Nicolas Sarkozy s'est empressé de saluer la victoire du oui, tout en réclamant une ratification générale avant la fin de l'année. Car sur le plan institutionnel les problèmes ne sont pas tous réglés. Pour entrer en vigueur il faut encore que la Pologne et la République tchèque signent le traité.Or, ces deux pays traînent des pieds. Hier, le très eurosceptique président tchèque Vaclav Klaus a même refusé de dire à quelle date il comptait se prononcer : " Ce n'est pas à l'ordre du jour. Je ne peux rien signer avant la décision de la Cour constitutionnelle. " Autre opposant, le président polonais Lech Kaczynski. Il ne veut pas, lui non plus, clairement dire ce qu'il compte faire. Le chef des conservateurs britanniques David Cameron qui pourrait bientôt succéder à Gordon Brown compte bien jouer sur ces réticences pour freiner le processus. Il a promis d'organiser un référendum en Grande-Bretagne s'il devenait Premier ministre au printemps. Bref, c'est à une course contre la montre que vont se livrer les leaders européens dans les semaines qui viennent. " On va mettre une pression d'enfer sur la République tchèque et la Pologne pour sortir enfin de ce casse-tête " confiait, hier, un diplomate français. Pêle-mêle, le traité de Lisbonne prévoit la création d'un poste de président de l'UE pour deux ans et demi (le nom de Tony Blair est souvent cité), un renforcement des pouvoirs du Parlement et l'extension des décisions à la majorité qualifiée permettant à l'Europe de mieux fonctionner.