Le P-DG de Siemens, Peter Löscher, dans un entretien exclusif avec le magazine "Les Afriques", a déclaré que l'Afrique du Nord, en particulier, est prédestinée pour le projet ambitieux de Desertec, en raison de sa position géographique. "La région est un emplacement potentiel pour les éoliennes offshore d'électricité ainsi que pour les centrales thermiques solaires, et elle est proche de l'Europe. L'électricité peut-être générée en Afrique, et une part significative de celle-ci sera consommée sur place, en Afrique", a-t-il affirmé. Cela contribuera, selon lui, à résoudre les problèmes énergétiques du continent. En outre, il sera également possible de fournir une énergie propre pour l'Europe. D'ailleurs, cette initiative ne contredit pas d'autres projets énergétiques locaux, selon Löscher. Cependant, l'Afrique subsaharienne est, pour le moment, exclue du projet Desertec, les lignes de transport d'électricité verte étant orientées vers le Nord. Cette exclusion peut aller jusqu'à susciter l'hostilité de l'Union africaine au projet. Pour Löscher, l'Afrique sera, globalement, l'un des grands gagnants. Le projet va considérablement renforcer l'expertise locale africaine et l'emploi. "Si les capitaux, les compétences et les ressources à partir d'un certain nombre de pays sont réunis, à la fin, toutes les parties en tireront profit", dira-t-il. Le projet Desertec consiste en fait en la construction d'une centrale solaire de plusieurs milliers de kilomètres carrés dans le désert africain pour produire environ 15 % des besoins énergétiques européens. Un projet très prometteur pour que l'Union atteigne ses objectifs de réduction d'émissions de CO2 et de production d'énergies renouvelables. Et un espoir de développement pour les populations locales. Pour utiliser l'énergie émise par le soleil, de nombreux projets sont en cours : centrales solaires de plus en plus grandes, panneaux photovoltaïques géants flottants sur les mers, centrales dans l'espace pour éviter l'intermittence,… et exploitation des immenses surfaces faiblement peuplées et fortement ensoleillées que sont les déserts. La centrale, qui serait érigée en Afrique du Nord, pourrait connaître une première mise en service vers 2020, mais la totalité du projet coûterait la somme astronomique de 400 milliards d'euros d'ici 2050, selon l'Institut de thermodynamique technique du centre aérospatial allemand. Le transport de l'électricité jusqu'à l'Europe en serait notamment la raison, compte tenu qu'acheminer 2 GW coûte environ 500 millions d'euros sur 1000 km. Pour l'instant, le projet ne serait donc pas rentable, mais les experts misent sur la raréfaction annoncée des énergies fossiles. Dans 10 ans, l'électricité solaire pourrait ainsi être l'une des plus intéressantes. Quant à la technologie utilisée, il s'agirait de l'énergie solaire thermique : des miroirs paraboliques produisent de la vapeur d'eau à très haute température et sous forte pression, et une turbine fabrique de l'électricité. On estime en effet que seul un vingtième de la surface du Sahara couverte de capteurs solaires suffirait à approvisionner la planète en électricité (la consommation mondiale est d'environ 18 000 TWh/an). Mais Desertec ne se limitera pas à la production d'énergie : il participera aussi au développement des pays d'accueil grâce à la création d'emplois locaux et à la construction d'usines de désalinisation de l'eau de mer pour les populations. Adnane Cherih