La Turquie a dévoilé vendredi les détails d'un plan de réforme destiné à renforcer les droits de la minorité kurde dans ce pays et à mettre fin à 25 années de conflit avec les rebelles kurdes, ont rapporté des médias turcs. Le ministre turc de l'Intérieur Besir Atalay a déclaré vendredi lors de la session parlementaire que cette réforme comprendrait des mesures pour renforcer une institution anti- discriminations, pour former un organisme indépendant destiné au traitement des plaintes contre les forces de sécurité, et pour mettre en place un mécanisme national destiné à éliminer la torture, a rapporté le quotidien Hurriyet Daily News sur son site internet. Elle impliquera également la levée de l'interdiction de la langue kurde dans les campagnes politiques et l'autorisation de redonner aux bâtiments résidentiels leur nom kurde d'origine, a indiqué le ministre. Un amendement de la Constitution sera nécessaire pour permettre ces mesures, qui pourront être revues par la suite à la lueur des événements ultérieurs, a dit le ministre cité par le reportage. Surnommé "initiative démocratique", ce train de mesures a été annoncé pour la première fois en juillet après la déclaration d' Abdullah Ocalan, chef du mouvement interdit du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) annonçant qu'il proposerait un plan pour résoudre les tensions de longue date concernant la communauté kurde. Le gouvernement a indiqué que cette réforme visait à saper le soutien du PKK, mouvement considéré comme un groupe terroriste par la Turquie et menant une lutte séparatiste armée contre ce pays depuis 1984 en vue d'obtenir la création d'un pays consacré à l' ethnie kurde dans le sud-est de la Turquie. Cette réforme devrait également avoir un impact favorable sur la candidature de la Turquie en vue d'adhérer à l'Union européenne, ce bloc réclamant davantage de respect des droits des minorités. Toutefois, elle a soulevé une hostilité très vive des partis nationalistes et d'opposition turcs, qui accusent le Parti de la justice et du développement (AKP, au pouvoir) de porter atteinte à l'unité nationale. Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a déclaré vendredi au Parlement que l'initiative démocratique avait pour but de résoudre tous les problèmes de la Turquie et de favoriser la démocratie dans tous les domaines, sans se limiter aux questions du terrorisme ou de la communauté kurde. "L'objectif est de favoriser l'unité et la fraternité de la nation", a déclaré M. Erdogan cité par l'agence Anatolie. Au cours du débat parlementaire sur cette initiative, Deniz Baykal, président du Parti républicain du peuple (CHP, premier parti d'opposition), a accusé le gouvernement de coopérer avec le PKK, qui selon M. Baykal n'a renoncé ni à son objectif séparatiste ni au terroisme. "On combat le terrorisme, on ne négocie pas avec lui", a déclaré M. Baykal cité par Anatolie. De son côté, le dirigeant du Parti pour une société démocratique (DTP, pro-kurde) a suggéré la formation d'une commission réunissant tous les partis politiques représentés au Parlement pour trouver une solution démocratique et politique à la question kurde. La crédibilité de cette démarche supposerait de déposer les armes dans les trois mois, a-t-il dit, selon Anatolie. Les conflits entre les forces de sécurité et le PKK ont fait près de 40 000 morts en Turquie. Les forces militaires ont durci leurs actions contre le PKK au cours des deux dernières années, lançant des raids aériens transfrontaliers contre leurs bases dans le nord de l'Irak. Depuis son arrivée au pouvoir en 2002, le parti AKP a pris des mesures pour renforcer les droits des Kurdes, en lançant par exemple la première chaîne de télévision nationale en langue kurde et en autorisant les écoles privées à donner des cours dans cette langue.