Les matières premières alimentaires ont évolué de façon contrastée cette semaine, le sucre et le café subissant des prises de bénéfices après leurs récents records, alors que le cacao se rapprochait de sommets atteints un mois auparavant. Les prix du cacao ont accentué leur rebond cette semaine, frôlant leurs records de plus de trente ans atteints mi-décembre. A Londres, le cours de la tonne de cacao livrable en mars a atteint 2.312 au cours de cette semaine. Elle reste néanmoins en-deçà des 2337 livres du 17 décembre, son meilleur niveau depuis octobre 1977. A New York, il a atteint 3419 dollars la tonne vendredi denrier. Il avait grimpé à 3510 dollars le 16 décembre 2009, un plus haut depuis mars 1979. Les prix du cacao ont été soutenus par une forte augmentation de la demande en Europe et notamment en Allemagne, notaient des analystes. Aussi, des inquiétudes subsistent sur les capacités d'approvisionnement en provenance de Côte d'Ivoire et de certains pays d'Amérique du sud. L'absence continue de pluie, notamment en Colombie et au Venezuela, met en effet en danger les récoltes qui pourraient du coup être en baisse cette saison par rapport à la précédente, selon la revue spécialisée "Public Ledger ". Il faut dire que les marchés mondiaux de matières premières ont terminé l'année 2009 en fanfare, affichant des prix record pour des produits aussi différents que le sucre, le cacao ou le thé. Pourquoi une telle envolée des cours ? Les raisons sont multiples.selon les analystes, la spéculation en est la principale cause. Cependant, les prix des matières premières obéissent à plusieurs logiques : celle des "fondamentaux" (le rapport entre l'offre et la demande sur le marché physique), celle des monnaies de cotation et donc du dollar, et enfin celle de la spéculation financière. Au niveau des fondamentaux, en dehors de quelques accidents (sécheresses ou grèves), le facteur majeur a été celui de la demande en Chine. L'impact de la relance chinoise s'est fait sentir au travers d'une forte croissance des importations de pétrole, de charbon, de métaux non ferreux, de coton, de soja ou de vieux papiers. Plus que jamais, ce pays est la clef des marchés de matières premières et ce d'autant plus que, ces derniers mois, se sont constitués des stocks publics ou privés profitant de la relative faiblesse du yuan, la devise chinoise. Car la dimension monétaire est désormais essentielle. Au-delà de l'or, pour lequel la corrélation entre les prix des matières premières et les vagabondages du dollar est désormais une réalité dont il faut tenir compte. La spéculation est le dernier ingrédient de la cuisine des matières premières, devenues une classe d'actifs financiers à part entière : on estime qu'en 2009, 60 milliards de dollars (41,4 milliards d'euros) supplémentaires ont été investis sur ces marchés, pour l'essentiel au travers de fonds travaillant sur des indices, contribuant à l'espèce d'euphorie qui a marqué les dernières semaines de 2009 et le début de 2010. Mais au final, c'est le physique qui aura raison. Or, à rebours de l'enthousiasme actuel, la prudence s'impose. Les marchés ont "acheté" la reprise bien avant que celle-ci soit une réalité et se trouvent dans une position bien inconfortable de dépendance vis-à-vis d'un débouché chinois plus aléatoire qu'on ne le pense à l'horizon 2011. Dans nombre de secteurs, les surcapacités sont manifestes. Paradoxalement, c'est là où l'investissement serait le plus nécessaire, à savoir l'agriculture au sens le plus large, que les marchés - ceux des céréales en particulier - sont restés les plus déprimés. Comme dans la vie, il n' y a aucune certitude quant à la satabilité des prix. La seule certitude reste plutôt celle d'une instabilité extrême. Plus que jamais,"la hausse est à craindre, mais la baisse est à redouter". Voilà qui n'est pas rassurant pour 2010 ! Dalila B.