L'Algérie plaide pour une transition énergétique graduelle plutôt qu'une rupture. Il faut dire qu'en tant que pays exportateur de pétrole et de gaz, l'Algérie perçoit avec inquiétude tous les discours qui appellent à une réduction drastique de la consommation d'énergies fossiles, sous le couvert du changement climatique de la nécessité de passer à une économie décarbonisée. Dans ce sens, le ministre de l'Energie et des Mines, M. Chakib Khelil, a déclaré la 12ème réunion ministérielle du Forum International de l'Energie (IEF), tenu à Cancun au Mexique qu'"en tant qu'exportateur de pétrole et de gaz, nous ne sommes pas à l'aise quant à toutes ces politiques annoncées ou planifiées pour réduire fortement et dans de courts délais la consommation des combustibles fossiles". Les capacités non utilisées de pétrole et de gaz sont déjà significatives, selon Khelil, et croîtront vraisemblablement dans le proche avenir, une croissance qui va accentuer, a-t-il ajouté, les incertitudes et limiter l'investissement pour augmenter les capacités dans les activités en amont et tout au long de la chaîne industrielle. Une "grande divergence" sur la taille du marché pour le pétrole OPEP à l'horizon 2030 a d'ailleurs caractérisé les prévisions affichées dans les documents soumis pour cette session par l'OPEP et l'AIE, confirmant ainsi, selon lui, de telles incertitudes. Le ministre a dans ce contexte salué le Système de collecte de statistiques pétrolières, appelé JODI, dont l'extension au gaz naturel serait utile, selon Khelil vue "l'importante capacité inutilisée de production de gaz naturel" qui va croître imposant plus de difficultés à l'industrie du gaz et provoquer de futurs déséquilibres et volatilité. "Aucun investisseur ne prendra la décision d'investir et de produire, s'il n'a pas une probabilité raisonnable que sa production trouvera un marché à un prix rémunérateur", a-t-il soutenu. Après avoir rappelé les actions "responsables et décisives" prises par l'Opep pour équilibrer l'offre et la demande globales de pétrole et stabiliser le marché, M. Khelil a souligné que la réponse au défi des incertitudes devra commencer par la garantie de "plus de transparence dans le fonctionnement des marchés, en particulier financiers, de meilleures données et informations sur les marchés physiques et d'un dialogue productif, qui va au-delà de l'immédiat, entre tous les acteurs". "Nous devons tous agir afin d'améliorer la régulation des marchés financiers qui va, au-delà de plus de transparence, limiter les variations extrêmes, telles celles observées en 2008", a-t-il dit. L'amélioration du cadre réglementaire régissant ces marchés serait plus efficiente au niveau mondial, estime le ministre, si elle était complétée par des avancées similaires dans d'autres régions, dans une démarche globale concertée qui vise la sophistication croissante des marchés financiers. Il faut dire que le ministre a indiqué auparavant que la spéculation est un facteur d'instabilité des marchés énergétiques affectant les prix et les investissements dans ce secteur. Et de souligner que cette instabilité est "illustrée par les surplus de capacités de production et une pression à la baisse sur les prix". La suggestion d'organiser des rencontres régulières des régulateurs "sera certainement utile" dans ce sens. La tenue d'un symposium annuel, suggérée dans l'annexe à la déclaration finale du FIE, réunissant des analystes pour présenter et discuter les fondements des prévisions énergétiques, vient justement à point et contribuera, a-t-il noté, à réduire une part des incertitudes qui découragent l'investissement. M. Khelil a réaffirmé dans ce sens l'engagement de l'Algérie pour un tel dialogue, comme reflété par sa participation aux réunions de Djeddah et de Londres en 2008 et son implication dans le travail du Comité de pilotage de haut niveau, qui a débouché sur la Déclaration de Cancun. La récente volatilité des marchés de l'énergie, même ayant eu quelques bienfaits pour les producteurs et les consommateurs restera, poursuit le ministre, un défi à relever et pour lequel un Forum International de l'Energie "renforcé au profit de tous" devrait être prochainement prévu.