Le Centre culturel algérien à Paris (CCA) que gère l'écrivain Yasmina Khadra a rendu un double hommage posthume en début de semaine à l'écrivaine et chanteuse Taos Amrouche ainsi qu'au miniaturiste Ali Khodja décédé le 07 février dernier à l'âge de 77 ans. Dans une série d'activités, la vie et l'oeuvre de l'artiste Taos Amrouche et du plasticien Ali Ali-Khodja étaient à l'honneur au CCA où la personnalité de Taos Amrouche connue pour ses romans comme "Jacinthe noire" (1947), "Le Grain magique" (1966) "Rue des tambourins" (1969) Solitude ma mère, (1995) roman posthume, et également pour ses talents de chanteuse et de cantatrice, a été évoquée. Cet hommage a débuté par la projection d'un documentaire "Sur les traces de Taos Amrouche" réalisé par Sadia Bareche puis par le vernissage d'une exposition d'oeuvres picturales de l'artiste Denis Barbaroux intitulée "Taos en Provence". Puis quatre conférenciers interviendront pour "décortiquer" les multiples dimensions de l'oeuvre de la défunte artiste. Le travail ainsi que la vie du peintre Ali Khodja, neveu du réputé miniaturiste Mohamed Racim a été également évoqué à travers une série de conférences animées par des spécialistes. Arrière petit-fils du Dey d'Alger, Ali Ali-Khodja est issu d'une vieille famille d'origine ottomane. Après la mort de son père en 1927, il est recueilli par ses oncles maternels dont l'un est le miniaturiste Mohamed Racim. De 1929 à 1937 Ali-Khodja fait ses études à l'école de Saint-Eugène puis à celle d'El-Biar. A partir de 1933 il est élève d'Omar Racim, au cours pratique de calligraphie et d'enluminure près de l'École des Beaux-arts d'Alger, de Mohamed Racim et d'Andrée Du Pac à l'École. Ali-Khodja participe à partir de 1962 aux premières expositions organisées à Alger après l'Indépendance, il est en 1963 membre fondateur de l'Union nationale des arts plastiques (UNAP) et participe en 1964 à son premier salon annuel. Il crée en 1966 pour les " Ballets algériens " un ensemble de costumes qui ne seront pas réalisés. En 1969 plusieurs de ses œuvres sont exposées au 1er Festival panafricain d'Alger. En 1970 le Grand prix national de peinture lui est attribué et en 1987, la médaille du mérite national. Ali-Khodja est également membre du jury international de la première biennale des arts plastiques d'Alger en 1987 et président du jury de la deuxième biennale en 1989. Taos Amrouche, l'artiste libre Elle fait partie d'une lignée racée. Que ce soit sa mère Fadhma, que ce soit son frère Jean, ils ont tous légué à la postérité une œuvre dans laquelle la Kabylie et notamment l'Algérie coloniale a été largement évoquée. Taos Amrouche tout comme sa maman, sont considérées comme les premières romancières algériennes de langue française. Née à Tunis en 1913, dans une famille kabyle originaire de la vallée de la Soummam (Ighil-Ali en Petite-Kabylie), Marguerite Taos Amrouche a été confrontée à la double culture berbère et française. Sa famille s'est convertie au catholicisme et a adopté la langue française, langue qui sera celle de la romancière. Sa mère, Fadhma Aït Mansour (1882-1967), élevée dans une des premières écoles de filles en Algérie a laissé des mémoires : Histoire de ma vie (1968, Maspero). Son père, Belkacem Amrouche est originaire d'Ighil-Ali. Confié aux Pères blancs, il avait été baptisé à l'âge de cinq ans. Il refuse d'épouser la fille du village qu'on lui avait promis. Belkacem émigre avec Fadhma à Tunis où il trouve un emploi aux Chemins de Fer tunisiens. Taos Amrouche était l'amie d'André Gide et de Jean Giono. Dans ses romans fortement autobiographiques, elle analyse son déracinement, l'exil, la solitude et exprime le besoin d'émancipation des femmes étouffées par la tradition. Taos Amrouche entreprend dès 1936, la collecte des chants populaires berbères. Douée d'une voix exceptionnelle, elle interprète de très nombreux chants berbères, qu'elle tient de sa mère et se produit dans de nombreuses scènes. En 1967, elle obtient le Disque d'or. Taos Amrouche a surtout excellé dans l'opéra en langue amazighe, ce qui explique qu'elle fut largement ignorée par les autorités algériennes. Elle a aussi fait une carrière de chroniqueuse à la radio, d'abord à Tunis, dès 1942, puis à Alger en 1944. Elle se marie avec le peintre Bourdil, dont elle a une fille, Laurence, devenue comédienne, et réside définitivement à Paris à partir de 1945. Elle a assuré à la radiodiffusion française une chronique hebdomadaire en langue kabyle, consacrée au folklore oral et à la littérature nord africaine. Taos Amrouche est morte en 1976, elle repose à Saint-Michel-l'Observatoire, près de Paris.