La plus vaste réforme de la régulation financière aux Etats-Unis depuis la Grande Dépression des années 1930 a été soumise hier à un vote crucial au Sénat. Alors que Wall Street est encore abasourdie par les nouvelles révélations sur les accusations de fraude portées contre Goldman Sachs, les démocrates ont décidé de repasser à l'offensive pour faire adopter leur proposition de loi, en préparation depuis plusieurs mois, et qui serait, dit-on, longue de 1.340 pages. La réforme déterminera l'avenir du métier de la banque aux Etats-Unis plus de deux ans après la plus grave crise financière depuis des générations qui a incité de nombreux gouvernements à durcir la régulation du secteur financier. L'enjeu est important pour Barack Obama. Depuis l'adoption de sa réforme de la santé, il a plusieurs fois critiqué Wall Street et apporté son soutien au projet de réforme porté par les démocrates. Le chef de file de la majorité démocrate au Sénat Harry Reid a prévu un vote de procédure pour commencer à débattre du texte tard lundi. Les Républicains ont menacé de voter contre mais des négociations à huis clos se sont tenues pendant le week-end entre les deux partis. Parmi les éléments qui font débat, les démocrates souhaitent mettre en place une nouvelle agence de protection des consommateurs et élaborer une nouvelle procédure de démantèlement des établissements financiers en difficultés. Soucieux de trouver une solution au problème des sociétés qui sont trop importantes pour faire faillite ("Too big to fail"), le parti de Barack Obama souhaite mettre au point une nouvelle procédure de "liquidation ordonnée". Elle a pour but d'empêcher qu'à l'avenir, les contribuables aient à régler la facture du sauvetage de sociétés, comme cela a été le cas pour AIG, tout en évitant des faillites spectaculaires comme celle de la banque Lehman Brothers en 2008. Une version de la réforme de la finance a déjà été adoptée à la Chambre des représentants en décembre. Le texte donne à l'exécutif le pouvoir de démanteler une grande institution financière en difficulté. Il force à standardiser les produits financiers dérivés et à les coter sur des marchés organisés transparents. La possibilité d'obliger les banques de dépôts à abandonner carrément leurs activités de produits dérivés est proposée par certains démocrates. La réforme créerait par ailleurs une nouvelle agence de réglementation des services financiers au grand public. Barack Obama voudrait aussi plafonner la taille des banques et interdire à celles qui ont accès au guichet de l'escompte de la Réserve fédérale, de spéculer pour leur propre compte. L'opposition républicaine s'est acharnée contre l'idée de créer un nouveau fonds de sauvetage des banques alimenté par une surtaxe des banques. Les conservateurs y voient une institutionnalisation du principe de sauvetage systématique de grandes banques irresponsables. L'abandon possible de ce volet de la réforme répondrait à leurs vœux.