L'économie de marché, présentée comme "la solution" est maintenant perçue comme une malédiction. Il y a de quoi car au vu des conséquences de l'entrée dans l'économie de marché, ou plutôt de la mise en œuvre des réformes, l'économie algérienne a eu droit à une augmentation rapide des importations suivie du constat que de plus en plus il devient difficile de trouver un emploi. Et pourtant, ce n'est pas sans inquiétudes mais aussi sans espérances qu'est approchée toute tentation de produire une lecture de l'évolution de la situation économique, plus particulièrement quand on sait que celle-ci est obligatoirement liée aux évolutions de la politique intérieure, de la politique extérieure, aux relations internationales, aux variables de sécurité interne et de sécurité à nos frontières et même dans la région environnementale sahélo saharienne, soit des données " ignorées " jusque-là. Des inquiétudes? Elles émanent d'abord des entreprises qui voient avec appréhension que les importations se font en substitution à la production nationale, alors qu'il est recommandé de faire le chemin inverse, c'est-à-dire produire en substitution aux importations. Elles émanent également des populations car quand bien même il y ait abondance de produits de consommation importés (pas seulement alimentaire), la perception populaire de l'économie de marché est celle de la difficulté à se procurer un emploi, doublée de celle à pouvoir le garder pour assurer au moins, non pas un déroulement de carrière, mais aussi une retraite non proportionnelle. Les ambitions vont ainsi à la baisse. Les jeunes diplômés à la recherche, parfois vaine, d'un emploi ne comprennent pas pourquoi autrefois, durant plus particulièrement les deux premières décennies, au haut de la hiérarchie sociale il y avait les études, le diplôme et même la conquête des meilleurs postes, des plus élevés même, alors qu'aujourd'hui pratiquement tous les emplois sont précaires. Même le secteur public économique ne garantit plus la stabilité au poste et n'offre plus l'assurance d'un déroulement de carrière, comme c'était le cas avant l'entrée dans ce qui est appelé l'économie de marché mais qui n'en n'est pas une en termes de normes. Serait-il possible qu'au constat des implications de l'entrée dans l'économie de marché, au fonctionnement de celle-ci, puisse revenir la période de moindre chômage, de moindre perte de pouvoir d'achat, de plus de possibilité de faire carrière dans l'entreprise que celle-ci relève du secteur public ou du secteur privé ? Le mécontentement ne peut qu'être évident, car toutes les couches sociales ne perçoivent plus qu'elles pourront, comme avant, garder un pouvoir d'achat qui n'était pas tellement garanti par les salaires, mais par les prix administrés. Les prix augmentaient beaucoup moins vite que les salaires, sans qu'il n'y ait trop d'écart entre les différentes couches sociales. Il arrive toujours le moment où les populations deviennent plus exigeantes à l'égard de toute autorité publique, tant centrale que locale. Il arrive toujours le moment où finit la période de grâce et où la légitimité populaire confiée par le biais des urnes demande à être accompagnée par des mesures qui devraient produire dans des délais rapprochés les implications socio-économiques positives pour les populations. Quand bien même il puisse être admis que le pouvoir politique sait ce qu'il fait quand celui-ci exprime sa certitude que la situation évoluera conformément à ses aspirations qu'il présente comme allant dans le sens du rétablissement de la paix et de la relance de l'économie, les jeunes tiennent toujours à savoir (et surtout à en être convaincus) quel " bonheur " les attendra plus tard.