La seconde conférence des pays de l'Afrique de l'est et centrale sur la finance islamique a été organisée, la semaine dernière, à Nairobi, la capitale du Kenya, avec l'objectif d'explorer les perspectives africaines en matière de finance islamique. Le gouverneur de la Banque centrale du Kenya (CBK), Njuguna Ndung'u, a indiqué, dans ce sens, que les plus grandes entreprises au monde ont aujourd'hui recours au financement islamique. Il a souligné que le secteur de la finance islamique a les potentialités pour relancer la croissance dans le domaine de l'industrie financière en Afrique. " Nous devons appréhender ce modèle financier qui permettra d'accroître nos profits au sein de la Communauté de l'Afrique de l'est ", a-t-il fait remarquer lors de l'ouverture de la conférence qui dure cinq jours. Le système bancaire du Kenya impose une taxation à toutes les banques tant que des soldes minimums sont maintenus contrairement au système de prêt institué par la Charia. " La CBK a accordé des exonérations aux institutions bancaires qui en ont formulé la demande tandis que les banques qui bénéficient d'un financement islamique sont redevables d'une taxation spécifique tel que stipulée par la loi bancaire ", a-t-il précisé. Pour sa part, le président de la banque islamique, Suleiman Shahbal, a annoncé que la banque projette d'établir prochainement des filiales de banques islamiques entièrement régies par la Charia en Ouganda et en Tanzanie. " Nous avons l'ambition de faire de Nairobi le centre de la finance islamique en Afrique. Pour ce faire, il est nécessaire de relever le niveau de compréhension de la finance islamique mais également de renforcer la présence des banques islamiques à travers l'Afrique ", a-t-il ajouté. Il faut savoir que Les banquiers du Moyen-Orient sont à la recherche d'opportunités et l'Afrique leur est grand ouverte en raison de la forte présence de matières premières et d'une jeune population. Mais il ne faut pas oublier que, par exemple, en Algérie les banques françaises ont été les premières bénéficiaires de l'ouverture du marché bancaire sur des produits conventionnels, a-t-il indiqué .La finance islamique promeut l'investissement dans des actifs tangibles : les investissements doivent être adossés à des actifs réels. Au-delà de ce premier critère discriminant, les financiers musulmans ne dérogent pas à une règle d'or : le banquier n'est pas prêteur mais co-investisseur et donc partenaire du projet financé. Ses revenus correspondront à une quote-part des résultats issus du projet financé. L'exigence d'un audit approfondi des potentiels projets à financer ainsi que l'accompagnement des entrepreneurs pendant les phases de recherche, de lancement et de vie de projet permettent d'éviter une dilapidation de capitaux reçus et une gestion qui s'est, jusqu'alors, révélée salutaire. Le très célèbre principe des 3P (Partage des Pertes et Profits) conduit de manière systématique, le banquier (investisseur) à une vigilance accrue quant à la pertinence du projet financé. La différence de comportement entre l'investisseur " islamique " et l'investisseur " classique " en matière de bourse pourrait être explicitée en deux points. Le premier est investisseur à moyen et long termes, l'autre est, le plus souvent, spéculateur de court terme, profitant des écarts de cours sur un titre. D'ailleurs, certains savants musulmans ont pu émettre l'idée de cycle d'investissement concernant l'achat d'actions. La durée de détention d'un titre de société intervenant dans le domaine agricole pourra par exemple correspondre au temps nécessaire pour semer, récolter et commercialiser. La décision de vente du titre sera alors justifiée par une véritable stratégie d'investissement mesurée par le retour sur investissement post-cycle de récolte. Dans leur ensemble, les principes majeurs de la finance islamique, sans se targuer d'être des antidotes absolus pour l'ensemble des maux, constituent un corpus de normes dont la vocation profondément éthique permet de fixer de solides garde-fous aux acteurs de la sphère financière. L'un des défis majeurs de la finance islamique, ou du moins de celui de ses partisans, sera celui de résoudre un paradoxe qui semble être un véritable casse-tête pour les hommes modernes que nous sommes : allier croissance vertigineuse à exemplarité morale. Les analystes de S&P relèvent, par ailleurs, que le développement de la finance islamique devrait notamment être soutenu par des avancées dans les pays non musulmans, en particulier l'Europe de l'ouest. Ils citent la France, l'Italie et Malte. Toutefois, ils soulignent que des interrogations demeurent quant à la véritable capacité d'implantation de la finance islamique dans cette zone. L'agence cite, à ce propos, les obstacles réglementaires, notamment en matière fiscale et les incertitudes concernant la demande pour les produits conformes aux principes de la Charia. "La visibilité manque quant à l'intérêt des musulmans pour l'offre de banque islamique et la capacité de ces produits à attirer des non musulmans", note S&P dans l'étude.