Les investissements dans l'agriculture ont baissé de manière dramatique ces dernières années en Afrique, a affirmé mercredi la CNUCED. L'agence de l'ONU appelle à renverser cette tendance en stimulant la recherche et l'innovation dans ce secteur sur le continent. L'Afrique dépend de plus en plus de ses importations alimentaires pour se nourrir, souligne un rapport de la Conférence des nations unies pour le commerce et le développement (CNUCED) publié mercredi, le premier d'une série sur la technologie et l'innovation. Le déficit a dépassé les dix milliards de dollars (35 milliards d'importations contre 25 milliards d'exportations). Les agriculteurs de l'Afrique subsaharienne ont perdu 25% de leur pouvoir d'achat au cours des 25 dernières années et leur revenu moyen est tombé à moins de 200 dollars par an, indique le rapport. Pour la CNUCED, ces tendances négatives sont la conséquence d'un sous-investissement dans la production agricole, alors même que l'agriculture compte pour 16% du PNB de l'Afrique, contre 6% pour l'Asie et 10% l'Amérique latine. Ce secteur représente 60% des emplois en Afrique subsaharienne. Et parmi eux, 90% sont des petits paysans. Le fossé n'a pas cessé de se creuser entre la productivité agricole en Asie et en Afrique. L'utilisation des engrais a stagné sur le continent noir, alors même qu'elle a plus que doublé en Asie. Si les techniques d'irrigation modernes peuvent très fortement accroître les rendements agricoles, la plupart ont été conçues pour des systèmes à grande échelle et relativement complexes, signale le document, observant que grâce à de nouvelles technologies telles que l'irrigation au goutte-à-goutte, des pompes à pédale améliorées et des citernes en matière plastique pour le stockage de l'eau, les petits exploitants peuvent aujourd'hui utiliser des techniques d'irrigation modernes qui leur seraient autrement inabordables, compte tenu de la petite taille de leurs exploitations et du peu de capitaux dont ils disposent. Notant que la production alimentaire par habitant dans les pays les moins avancés (PMA) a constamment diminué ces quarante dernières années (moins 20 pc entre le début des années 70 et le milieu des années 2000), le rapport fait valoir que des innovations et des avancées considérables dans les technologies utilisées par les petits exploitants agricoles africains sont nécessaires pour rétablir la sécurité alimentaire. L'utilisation soutenue de technologies agricoles plus modernes par les agriculteurs, en particulier en Afrique, pourrait jouer un rô_le important à moyen et long termes dans la prévention des crises alimentaires, estime la Cnuced. Le Rapport insiste sur les répercussions de la stagnation de la productivité sur la sécurité alimentaire des pauvres en Afrique, relevant que la productivité agricole a sensiblement augmenté en Asie et en Amérique latine ces dernières décennies, mais que cela n'a pas été le cas en Afrique, précisant que l'écart entre les importations et les exportations agricoles du continent se creuse. Pour la Cnuced, la stagnation de la productivité agricole a engendré un grave problème d'insécurité alimentaire, et est aujourd'hui un obstacle majeur au développement de l'Afrique. Elle note qu'il s'agit d'abord et avant tout de soutenir les petits exploitants qui constituent l'essentiel des agriculteurs du continent, et dont beaucoup vivent au niveau ou en deçà du seuil de pauvreté. Passant en revue les moyens d'inverser la tendance au recul de la productivité agricole par l'adoption de technologies existantes et la mise au point de nouvelles technologies, le rapport décrit en détail les effets probables de l'innovation au sein des systèmes agricoles, de l'amélioration des infrastructures agricoles, des services et des pratiques de gestion foncière, ainsi que de l'élaboration de politiques nationales plus appropriées. Les auteurs du document soulignent, dans leurs conclusions, la nécessité d'améliorer et d'élargir l'éventail des technologies agricoles utilisées par les petits exploitants africains et de renforcer les capacités d'innovation des systèmes agricoles africains, signalant néanmoins que cela n'est pas suffisant pour améliorer la productivité agricole du continent. Ils estiment que les conditions locales font qu'il est quasiment impossible de reproduire, en Afrique, une révolution verte de type asiatique ou latino-américain, reposant sur une utilisation intensive d'engrais chimiques, de pesticides, ainsi que de l'irrigation, pour la production de variétés à haut rendement d'un tout petit nombre de cultures céréalières, approche, disent-ils, que de nombreux experts agricoles n'estiment de toute façon pas viable. Le rapport insiste en outre pour que l'ensemble des technologies sous-tendant une révolution verte véritablement africaine soit conçu en tenant pleinement compte de l'immense diversité des situations humaines, écologiques et économiques du continent. Le document avertit enfin qu'en raison de techniques agricoles et de pratiques après récolte inefficaces, l'Afrique subsaharienne est la région qui risque le plus de ne pas atteindre le premier objectif du Millénaire pour le développement, à savoir réduire l'extrême pauvreté et la faim d'ici à 2015.