Les pays en développement et les pays émergents devraient représenter près de 60% du PIB mondial à l'horizon 2030, à la faveur d'un mouvement de basculement de richesse que la crise a accéléré, estime l'OCDE dans un rapport publié mercredi. La croissance rapide des grands pays en développement a permis de réduire la pauvreté mais a aussi accru les inégalités, constate l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) dans son rapport intitulé "Perspectives du développement mondial: le basculement de la richesse". Résolument optimiste, l'OCDE conseille aux pays en développement de mettre en œuvre des politiques sociales et de développer leurs échanges, tout en estimant que les pays riches ont aussi à gagner à cette transformation structurelle. Selon le rapport, les pays industrialisés devraient représenter en 2030 38% de la production mondiale, contre 49% actuellement et 62% il y a dix ans. Parallèlement, la contribution des pays non membres de l'OCDE au PIB mondial grimperait à 57% contre 49% aujourd'hui et 38% en 2000. "La crise a accéléré le déplacement de richesse dans le monde", souligne l'OCDE. "Ce réalignement n'est pas un phénomène transitoire: il représente un changement structurel d'une importance historique." Le rapport fournit quelques exemples de cette transformation structurelle de l'économie mondiale sur vingt ans et du dynamisme des liens Sud-Sud qu'elle a entraîné.* Entre 1990 et 2008, les échanges mondiaux ont été multipliés par près de quatre, tandis que les échanges Sud-Sud l'ont été par plus de dix. Les pays en développement représentent actuellement environ 37% des échanges mondiaux, dont approximativement la moitié est constituée de flux Sud-Sud. En 2009, la Chine est devenue le premier partenaire commercial du Brésil, de l'Inde et de l'Afrique du Sud. La multinationale indienne Tata est aujourd'hui le deuxième investisseur en Afrique subsaharienne. Et en 2008 les pays en développement détenaient 4.200 milliards de dollars de réserves de change, soit plus d'une fois et demi le montant détenu par les pays riches."Il ne suffit plus de diviser le monde en Nord et Sud, en pays développés et pays en développement (...) Certains pays en développement commencent à rattraper le niveau de vie des pays riches, tandis que d'autres s'efforcent de percer le 'plafond de verre' du revenu intermédiaire et que d'autres encore continuent de souffrir de l'extrême pauvreté", observe l'OCDE, organisation créée en 1961 pour conseiller les pays industrialisés. Pour réduire les inégalités et soutenir la croissance, l'OCDE préconise de renforcer les échanges Sud-Sud et de mettre en oeuvre des politiques sociales dans les pays qui en ont désormais les moyens. "Dans bien des cas, la croissance s'accompagne d'un creusement des inégalités, ce qui rend plus difficile la lutte contre la pauvreté. Des niveaux d'inégalité élevés risquent de saper la croissance et, in fine, la tendance durable au déplacement de la richesse", souligne l'organisation. Parallèlement, le rapport salue la nouvelle gouvernance mondiale issue de la crise avec le G20, qui a détrôné le G7 où les pays émergents n'avaient pas voix au chapitre. Notons d'un autre côté qu'une enquête Reuters a démontré que les trajectoires de la reprise divergent désormais nettement au sein des économies les plus développées, et souligne l'impact de la crise de la dette souveraine européenne sur la croissance du continent. Selon 250 économistes interrogés entre le 10 et le 16 juin, le rythme de la croissance des Etats-Unis s'éloigne de plus en plus de celui de la zone euro et de la Grande-Bretagne. Il surpasse également celui du Japon. L'économie de la zone euro devrait progresser d'un poussif 1,1% cette année et de 1,4% l'année prochaine et la Grande-Bretagne emprunte un chemin semblable avec une croissance de 1,1% attendue cette année. Pour 2011, en revanche, les prévisions sont plus optimistes et prédisent une hausse de 2,1%. "Les signes d'un fort rebond sont absents de manière remarquable", a commenté Christoph Weil de Commerzbank. "Cet été, l'économie de la zone euro va progresser sensiblement plus lentement, la crise de la dette souveraine dans les pays périphériques va peser encore plus lourd." Les monnaies de la zone euro et la Grande-Bretagne ont été fortement attaquées en raison des craintes pesant sur leur endettement, tandis que les inquiétudes entourant un déficit proche de 11% du PIB ont accentué la pression sur la livre. La situation de l'économie japonaise n'est quant à elle pas si morose et les économistes lui prédisent une croissance de 2,5% au cours de l'exercice fiscal à mars 2011, à la faveur d'exportations solides. A l'exception des Etats-Unis, toutes ces régions ont donc vu leurs prévisions 2011 abaissées. Elles ont toutefois été relevées pour 2010 pour les Etats-Unis, le Japon et la zone euro.