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Incertitudes des réserves des hydrocarbures rentables en Algérie à l'horizon 2020 ou la problématique de la sécurité nationale
Publié dans Le Maghreb le 29 - 07 - 2010

Docteur Abderrahmane MEBTOUL Expert International Conseiller et directeur d'Etudes Ministère Energie/Sonatrach- 1974/1979-1990/1995-000/2006
Les perspectives des réserves du pétrole/gaz ainsi que du prix de cession du marché du gaz restent incertaines entre 2018/2020 ce qui ne va pas sans avoir des conséquences sur les recettes de Sonatrach , donc sur le devenir de l'économie algérienne où tout est irrigué par les hydrocarbures : 97% des 150 milliards de dollars de réserves de change , plus 90% de la dépense publique, 80% du produit intérieur brut directement et indirectement et 70% des recettes fiscales provenant de cette rente(1).
1.-Lors de la conférence internationale tenue à Berlin le 21 mai 2010 ayant pour thème " dialogue énergétique: Russie-UE, aspect gazier ", le président de GDF Suez Jean-François Cirelli, l'allemand E.ON Ruhrgas et le président de l'Union européenne de l'industrie du gaz naturel (Eurogas) Domenico Dispenza ont estimé que les accords à long terme sur la livraison de gaz à l 'Europe doivent pouvoir subir des modifications compte tenu de la conjoncture économique et demandé à Gazprom de baisser le prix du gaz prévu par leur contrat à long terme ou de changer certaines clauses dans les contrats.
Or, Gazprom, qui indexait jusqu'ici ses prix sur ceux du pétrole, a accepté de vendre une partie du gaz aux prix spot (à court terme) qui sont environ 25% inférieurs aux prix des contrats à long terme, l'écart pouvant être plus important si le cours du pétrole est élevé et le prix du gaz sur le marché spot reste au niveau de 4 dollars le MBTU. Et selon l'influent quotidien économique espagnol, l'Expansión, en date du 24 mai 2010, l'Espagne demanderait à l'Algérie une révision à la baisse du prix du gaz et paradoxe, c'est l'Algérie qui demandait dans un récent passé un relèvement des prix de cession du gaz à l'Espagne et à Gaz de France, remettant en cause le prix de cession du gazoduc Medgaz, exploité par un consortium composé des groupes espagnols Endesa (12%), Iberdola (20%), Cepsa (20%), du français GDF Suez (12%) et de Sonatrach (36%). Cela peut par ricochet se répercuter également sur le prix du gazoduc Galsi ( Europe via Italie), puisque le projet Nigal dans ces conditions ne sera plus rentable devant relier le Nigeria à l'Europe- via l'Algérie, d' une capacité de 20 à 30 milliards de m3/an destinés en majorité au marché européen, où selon l'étude de faisabilité confiée à la société britannique Penspen/IPA le projet pour se matérialiser coûtera plus de 13 milliards de dollars contre une prévision au départ de 7 milliards de dollars, sans compter la résolution de certains conflits frontaliers , qui devait permettre à l'Algérie de concurrencer Gazprom et la Norvège pour passer horizon 2015 de 10% actuellement à 15% pour l'approvisionnement de l'Europe. Et les contrats annoncés pour 2012 de l'Algérie avec la Turquie pays émergent à fortes potentialités, sont encore plus problématiques ( quel prix de cession ) car dans la pratique des affaires il n' ya pas de sentiments, la Turquie ayant favorisé récemment l'accès des terminaux venant de la Russie traversant son territoire et ayant une stratégie agressive vers les pays pétroliers et gaziers du Moyen Orient. Le groupe Sonatrach a annoncé qu'il négociait actuellement des contrats de livraisons à long terme de GNL avec quelques pays asiatiques. Or pour le cas Asie, il s 'agit de prendre en compte la concurrence des pays d'Afrique et surtout de l'Iran qui avec les tensions géo- politiques a besoin de financement (plus de 15% des réserves mondiales de gaz conventionnel contre 35% pour la Russie ) et surtout pour le GNL du Qatar ( 10% des réserves mondiales) qui avec des complexes d'une capacité presque du double à ceux de l'Algérie (importantes économies d' échelle) et sa proximité géographique avec l'Asie ( réduction du cout de transport) , d'où d'ailleurs sa réticence à la réunion à Oran du 19/21 avril 2010 avec la Russie de refuser de réduire l'offre, l'Algérie devant contourner toute la corniche d'Afrique pour arriver à l'Asie.
2.- Pour le gaz, dont le marché est segmenté ce qui rend d'ailleurs impossible une OPEP gaz à l'image de celle du pétrole , nous savons qu'en moyenne, le prix de cession dans les contrats à moyen et long termes (non le marché spot), tenant compte bien entendu des fluctuations du dollar monnaie de référence, est environ 1/10 du prix du pétrole encore qu'existent des différences de prix mais avec un écart faible, fonction des zones géographiques et des modalités de contrats. L'expérience historique a montré que la formule d'indexation du gaz sur celui du pétrole pose problème, n'ayant pas eu toujours une proportionnalité entre le prix du marché du pétrole et celui du gaz et cela est vrai depuis 2009/2010 avec le développement du marché spot par le gaz non conventionnel. Cela est important pour l'Algérie puisque le gaz (GN et GNL) représente environ un tiers (1/3) de la valeur en devises de ses exportations, et beaucoup plus à l'avenir puisque pour le pétrole ayant moins de 1% des réserves mondiales allant, à moins d'un miracle, vers l'épuisement dans moins de 18 ans. Si, l'Algérie est mieux dotée en gaz, ce dernier représente actuellement selon les statistiques internationales 3% des réserves mondiales (4500 milliards de mètres cubes gazeux estimation de la revue BP pour 2006/2007). Dans ce cadre, l'Algérie a programmé d'importants investissements tant à travers les canalisations (Medgaz et Galsi) que la construction de deux GNL ( Skikda et Arzew ) avec des investissements hautement capitalistiques ( quelle sera leur rentabilité ) , les exportations devant tourner autour de 60% de GN et 40% de GNL horizon 2014/2015, et pour ces investissements, au départ, il était prévu que Sonatrach approvisionne la cote Est des Etats Unis d'Amérique. Or, le repositionnement qui s'opère aux Etats-Unis vers le gaz non conventionnel au détriment du GNL ( les USA risquant à l'horizon 2020 de devenir exportateur net de gaz, le Department of Energy ayant revu à la baisse sa prévisions de demande de GNL de plus de 60 % à l'horizon 2020; d'où le gel voire l'abandon de plusieurs projets de regazéification), les USA selon certaines prospectives devant devenir exportateur net de gaz horizon 2018, va modifier la donne au plan mondial -La mise sur le marché de capacités additionnelles de liquéfaction (57 Gm3) et de regazéification (260 Gm3) entre 2009 et 2013, ces surcapacités ne conduiront-ils pas à des taux d'utilisation très faibles des terminaux d'importation GNL avec comme résultat dans les prochaines années l'offre de GNL surpassant fortement la demande gazière globale, avec pour conséquence une pression accrue sur les prix , qui, selon Cedigaz, dans son rapport de décembre 2009 devrait reculer , la mise sur le marché d'une offre disponible supérieure de 100 Gm3 ces deux dernières années, combinée à une forte réduction de la demande, rallongeant jusqu'à 2015-2016 la période actuelle de bulle gazière. Face à cette situation, où le prix de cession du million de BTU est d'environ 4 dollars pour le gaz non conventionnel , réduction des couts de plus de 40% permis grâce au forge horizontal , et en plus par la prise en compte de l'entrée croissante dans le marché du gaz de nombreux pays en Afrique et en Amérique latine concernant le gaz conventionnel, sans compter les nombreux projets de canalisation à travers le monde notamment vers l'Asie et les Balkans, se pose alors la question de la place de Sonatrach dans cet échiquier stratégique mondial et de la rentabilité des installations tant par canalisation que du gaz naturel liquéfié alors que la rentabilité du GN doit être environ de 8/9 dollars et celle du GNL entre 11 et 14 dollars. Va-t-on donc vers des renégociations à la baisse du prix de cession du gaz algérien ? Ce d'autant plus que les contrats à moyen terme expire dans leur majorité entre 2012/2013.


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