Les cours du blé ont doublé en deux mois, mais ce n'est pas suffisant pour provoquer une inflation des prix des produits alimentaires, selon l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). Les analystes s'attendent toutefois à ce que les cours du blé restent élevés et volatiles dans les mois à venir. L'attitude de certains pays exportateurs comme la Russie ou l'Ukraine explique en partie cette volatilité: la Russie a suspendu ses exportations après une vague de chaleur qui a détruit environ un quart des récoltes de céréales et l'Ukraine est sur le point d'imposer des quotas d'exportation. Un représentant du ministère de l'Agriculture ukrainien a précisé que son gouvernement était ouvert à un ajustement de ces quotas après discussions avec les courtiers et en fonction des conditions de marché. Les quotas doivent être définitivement fixés lors d'une réunion gouvernementale, le 25 août. En août, les contrats à termes sur le blé à Chicago ont ainsi atteint leur plus haut niveau en deux ans à 8,41 dollars le boisseau, après un mouvement haussier de deux mois dû à la sécheresse en Russie. Ils ont toutefois baissé de façon importante pour repasser sous les sept dollars le boisseau. L'attitude de la Russie est un autre motif de spéculation. Jeudi, les cours ont par exemple été portés par des commentaires d'analystes et de courtiers qui affirmaient que la Russie pourrait devenir un importateur considérable de blé. L'information a toutefois été démentie dès vendredi par les autorités russes. "Nos propres récoltes sont suffisantes. Cette rumeur est propagée aux fins de servir les intérêts d'un groupe de courtiers malhonnêtes", a déclaré un porte-parole du ministère russe de l'Agriculture. La production de blé russe devrait être de 42 à 43 millions de tonnes en 2010, ce qui représenterait environ une baisse de 20 millions de tonnes par rapport à 2009. L'indice de la FAO des prix alimentaires, qui mesure l'évolution des cours internationaux d'un panier de produits, devrait toutefois afficher une hausse en août par rapport à juillet, mois lors duquel il avait atteint son plus haut niveau en cinq mois. Notons par ailleurs que les prix des matières premières alimentaires ont connu des fortunes diverses cette semaine, dans des marchés peu animés en pleine trêve estivale, mais où les inquiétudes sur l'approvisionnement et des achats spéculatifs apportaient un relatif soutien aux cours. Les cours de la fève brune ont reculé cette semaine des deux côtés de l'Atlantique, dans un marché souffrant de l'atonie estivale. "Nous ne devrions pas voir énormément d'activité sur le marché jusqu'en septembre avec le début des récoltes de cacao en Côte d'Ivoire", le premier producteur mondial, observait la revue spécialisée The Public Ledger. Par ailleurs, alors que les pluies abondantes des derniers mois avaient avivé les inquiétudes sur la qualité de la production, la nette amélioration des conditions climatiques en Afrique de l'ouest "limitaient les gains" potentiels des cours du cacao, soulignait la revue. Sur le Liffe de Londres, la tonne de cacao pour livraison en décembre cotait 2017 livres sterling vendredi vers 10H00 GMT (12H00 HEC) contre 2043 livres la tonne pour la même échéance sept jours auparavant vers 14H00 GMT. Les prix du café ont hésité cette semaine dans un marché fébrile, subissant des variations en dents de scie après avoir approché lundi à New York leur niveau de fin juillet, qui constituait un plus haut depuis 12 ans. "L'ambiance sur le marché est très clairement celle que l'on peut attendre pour une mi-août, à demi en vacances, et assez ennuyeuse", soulignait Ralph Hawes, de Sucden Financial, relevant cependant que les "achats tenaces" des fonds spéculatifs continuent de pousser les prix. Les acteurs du secteur, "à mesure que l'on s'approche de septembre, auront besoin de répondre à la demande saisonnière. C'est sur quoi doivent miser les fonds (spéculatifs), même si la nouvelle récolte brésilienne devrait bientôt arriver sur le marché" et soulager les prix, avertissait M. Hawes. Les incertitudes sur l'approvisionnement restent cependant de nature à peser sur les cours. "Les stocks certifiés (mondiaux) sont tombés au plus bas niveau depuis 2002. Les réserves ne vont pas s'améliorer avant le début des récoltes d'Amérique centrale en octobre", et des pluies abondantes pourraient entamer la production colombienne, notaient Kona Haque et Alex Bos, de Macquarie Securities. Les cours du sucre ont pour leur part poursuivi leur progression, toujours portés par des inquiétudes sur l'approvisionnement et une demande soutenue. "Les productions ont été durement affectées au Pakistan par les inondations ou en Russie par la vague de sécheresse (pénalisant la récolte des betteraves, ndlr), ce qui encourage le raffermissement des prix, tout comme la longue attente des navires qui continue d'engorger les ports brésiliens", expliquaient Kona Haque et Alex Bos.