Quatre ans après leur prestation commune au Zénith, Akli Yahiatene et Lounis Aït Menguellet se sont à nouveau produits ensemble, le 2 mai, sur la scène du Palais des Sports à Paris. Les 9 et 10 septembre précédents, respectivement à Alger, salle El Mouggar puis à la maison de la Culture Mouloud Mammeri de Tizi Ouzou, l'Orchestre symphonique national a donné un concert en l'honneur d'Akli Yahiatène. Sous la direction de Rachid Saouli, l'artiste a interprété une dizaine de ses succès dont "Ya-l-menfi" (Ô l'exilé), "Jahagh bezzaf dhameziane" (Exilé trop jeune), Zrigh ezzine di Michelet, Thamourthiou idhourar (Mon pays de montagnes) ou encore Inas i-mlayoun Taos (Dites à Taos). Avec Taleb Rabah (né en 1930) et une pléiade de chanteurs, Akli Yahiatene était l'une des têtes d'affiche du concert "100% kabyle" du 4 janvier 2009 au Zénith de Paris, à l'occasion de "Yennayer" (Jour de l'an berbère) 2009. Durant le mois de janvier, une séance proposée par le Centre culturel français d'Alger (23/01) était dédiée aux scopitones, ces fameux juke-boxes à images qui équipaient nombre de cafés de l'émigration algérienne en France et diffusaient les premiers vidéo clips de chanteurs comme Salah Saâdaoui ou Slimane Azem. A l'issue d'une conférence de Rachid Mokhtari, la soirée avait été suivie d'un tour de chant d'Arezki Bouzid, Ameziane Mohammed et Akli Yahiatène. Sur le même sujet, le CCF proposait de découvrir Trésors de scopitones, un documentaire de Michèle Collery et Anaïs Prozaic (Fr, 1999). A 77 berges, le chanteur kabyle qui s'était exilé en France durant plus de 40 ans n'a rien perdu de son énergie. Son retour triomphal s'est effectué en 2002, et depuis, il est régulièrement visible sur l'arène des spectacles. Vieilli certes, et ça se voit rien que sur le cou très mou, car l'artiste n'a aucune ride ni aucun cheveu blanc. Le Ramadhan de l'an dernier était une occasion pour lui, d'animer pas moins de neuf récitals, lors d'une tournée qui l'avait menée à Médéa et Oran. Il est remonté à la salle El Mouggar avec les cinquante musiciens de l'Orchestre symphonique national et une imposante chorale. Il était visible aussi à Tizi Ouzou où il compte de nombreux fans. Le chanteur a avoué dans un entretien qu'il en avait " des frissons pour ce concert", ajoutant que "c'est la vraie musique avec un orchestre de classe. C'est ainsi que je conçois cet art avec sa rigueur, sa discipline, son professionnalisme, ses hautes valeurs et compétences artistiques”. Un artiste infatigable Remonter sur scène est devenu une banalité pour lui car, depuis 2002 jusqu'à ce jour et surtout durant le PANAF-2009, il a eu son lot de concerts. Le retour sur l'arène il l'a certes accompli mais cet enfant de Ath Mendès dans la région de Boghni (W de Tizi Ouzou), n'a pas signé d'album depuis plus de 12 ans. Un bail ! En revanche le chanteur de l'exil a l'intention de graver sur CD toutes les chansons sorties en 33 tours ou en 45 tours chez Pathé Marconi, l'une des rares maisons de disques qui produisait les africains en France, dans les années 50. Akli Yahiatène veut, à travers ce travail, faire connaître toutes ses chansons à son public et non pas seulement ses succès comme " Ya lmanfi." Son retour sur scène s'est fait naturellement, accompagner par un retour du public qui continue à l'apprécier comme un artiste authentique de la chanson chaâbie kabyle, puisée dans les souffrances, des émigrés, "ces bras en fer " qui ont construit la France après la Seconde Guerre mondiale dans des conditions d'extrême précarité. Et c'est ça que chante Akli, qui a embarqué pour la France à l'âge de 21 ans à la recherche d'un boulot. Il n'a pas connu les bancs de l'école, mais il s'initie dès son arrivée en France à la mandoline. Avant d'être embauché par Citroën, Akli Yahiatene vit de petits métiers en s'adonnant à son art favori, la musique pendant ses temps libres. Le pays " Tamurth ", " l'ghorva", (l'exil) …..sont les thèmes qui se sont imposés à ce chanteur qui a eu, à peu près le même parcours que ses compères, Slimane Azem, Cheikh El Hasnaoui… Comme eux il a rencontré le compositeur et chef d'orchestre Amraoui Missoum qui l'encourage à éditer ses 33 tours. Comme eux, il a chanté l'amour de la patrie…dans notamment " Inas i mlaayun Taos " (1959), " Thamurthiw " (Mon pays) qu'il compose en 1962, " Jahagh bezzef dhameziane " (Je me suis exilé trop jeune), " Zrigh ezzine di Michelet " (j'ai rencontré la beauté à Michelet), " El Fraq bezzaf youar " (La séparation est trop dure), " Aminigh awal fahmith " (Je voudrais que tu comprennes) ou encore " Yedja yemas (Il a laissé sa mère). Son titre fétiche celui qu'il admire parmi tous les titres qu'il a signé, " Yal Menfi " (Le Banni), a été composé en 59 durant son séjour en prison, après avoir été suspecté de collecter des fonds pour le FLN.