Docteur Abderrahmane MEBTOUL (1) Comme les expériences historiques notamment en Inde montrent que les micro- crédits à des taux d'intérêts plus élevés que celles des banques traditionnelles ont accru l'endettement des emprunteurs souvent " pauvres " qui se retrouvent dans un cercle emprunt-remboursement, emprunt-remboursement avec pour conséquence des suicides à répétition ne pouvant pas toujours rembourser . Ce risque de défaillance est d'autant plus prévisible avec l'apparition et le développement des opérations de gré à gré sur les marchés financiers, le risque de crédit, résultant de l'incapacité de la contrepartie à effectuer les paiements contractuels, présente trois composants :- la probabilité de défaillance de la contrepartie ; le taux de recouvrement de la créance en cas de défaillance de la contrepartie et enfin l'exposition au risque de crédit mesurée par le montant de la perte de défaillance, différence entre la valeur de remplacement du contrat et le montant que l'on espère récupérer. Cela a des incidences opérationnelles sur la tenue des comptabilités d'entreprisses qui utilisent ce mode de financement, les normes comptables internationales européennes (IAS/IFRS) stipulant expressément que la valeur actualisée des paiements minimaux dus par le locataire est au moins égale à la valeur de l'actif loué, signifiant sur le plan comptable dans le bilan que moins de dettes apparaîtront au passif , donnant un ratio de solvabilité du fait que le crédit-preneur peut enregistrer les loyers dans sa comptabilité comme des charges d'exploitation, le résultat avant impôt diminuant ainsi d'autant les impôts . Le système est particulièrement utilisé pour les véhicules et le matériel informatique et industriel, notamment parce que ce type de contrat permet d'inclure des garanties de maintenance et le financement de la TVA. Ainsi, la norme IAS 17 établit comment comptabiliser le crédit-bail, prévoit le crédit bail comme une immobilisation corporelle avec pour contrepartie une dette financière au passif du bilan, la comptabilisation s'effectuant à la plus faible valeur entre la juste valeur (de marché) et la valeur actualisée des paiements minimaux du contrat, les amortissements et intérêts devant être comptabilisés. Quelles sont les incidences du crédit leasing ? -Le leasing permet aux firmes à faible taux d'imposition de vendre des déductions fiscales à des bailleurs à taux d'impôt élevés qui sont mieux à même de valoriser les avantages fiscaux ; une partie des économies fiscales ainsi réalisées est reversée à l'utilisateur sous forme de baisse de loyers; -le leasing opérationnel et le crédit-bail donnent au bailleur une protection importante en cas de défaillance de l'utilisateur ; -une firme à haut risque se finance ex ante plus facilement par leasing que par émission d'obligations existant une relation négative entre coûts de défaillance et utilisation du leasing " (fin de la citation) ; -Etant un contrat entre l'offreur et le demandeur et comme tout contrat en cas de non respect cela peut entraîner des conflits latents avec ce que les financiers appellent des coûts d'agence, étant liés aux opportunités d'investissement, aux actifs corporels, au contrôle de la firme et à sa dimension ; -on n'instaure pas le financement par leasing comme une baguette magique car l'important est une législation adéquate couvrant toutes les probabilités en cas de litiges ; du fait de l'importance que le crédit-bail revêt au plan économique, le législateur doit lui consacrer plusieurs articles aussi bien dans la loi bancaire, dans le code de commerce que dans les lois de finances (mesures d'encouragement fiscales notamment). IV CONCLUSION : ECONOMIE RENTIERE ET CREDIT-BAIL En conclusion, en Algérie la rente des hydrocarbures voile la mauvaise gestion à tous les niveaux : l'effacement tant de la dette extérieure qu'intérieure n'est pas due à une bonne gouvernance et à la création du surplus par le travail, mais aux recettes exceptionnelles des hydrocarbures et qu'en sera t-il de l'efficacité du crédit-bail en cas de défaillances des utilisateurs puisque ce seront en général les banques publiques déjà confrontées à d'importantes créances douteuses pour des crédits normaux , qui activeront en majorité si on décide d' étendre ce mode de financement . Cela ne renvoie -t-il pas pour son efficacité à une meilleure gouvernance et à une visibilité et cohérence dans la démarche de la réforme globale ? Qu'en sera- il des prêts bonifiés qui répondent à une logique politique et non économique ? Le financement par leasing peut-il s'appliquer efficacement au sein d'une économe dualiste où prédomine la sphère informelle controlant40%de la masse monétaire en circulation avec une intermédiation informelle où existe déjà un leasing informel à des taux d'usure ? Ne risque-t- on pas en cas d'une chute des recettes des hydrocarbures de découvrir la triste réalité d'un endettement excessif tant des ménages que des entreprises, notamment les PMI/PME ayant une couverture financière limitée, qui ne pourront pas respecter les contrats du leasing dont le taux de location est souvent supérieur au taux d'intérêt normal ? Qu'en sera-t-il surtout pour les ménages dans l'immobilier qui représente la plus grande part de l'endettement et non la consommation de biens finaux, endettement pouvant être accéléré avec la détérioration du pouvoir d'achat ? Et l'essentiel, ce système de financement permettra-t-il de passer d'une économie rentière à une économie productive ? Aussi je ne saurai trop insister sur l'urgence de définir clairement la technique de financement par crédit-bail en distinguant nettement les étapes suivantes et d'adapter la législation à cette nouvelle situation afin d 'éviter des litiges interminables au niveau des tribunaux : la conclusion du contrat de crédit-bail ;-l'exécution du contrat de crédit-bail ;-la garantie du contrat de crédit-bail et la fin du contrat de crédit-bail. Docteur Abderrahmane MEBTOUL Expert international Professeur d'université en management stratégique