L'Allemagne a exprimé samedi à Washington son scepticisme face au projet de réforme du système monétaire international ardemment défendu par le président français Nicolas Sarkozy. "Toute tentative pour apporter des changements devra être minutieusement analysée", a affirmé l'Allemagne dans une déclaration signée de son ministre des Finances Wolfgang Schaüble, et présentée au Comité monétaire et financier international, l'instance chargée de définir les grandes orientations du Fonds monétaire international. "Nous avons des doutes quant à savoir si un nouveau système artificiellement imposé serait crédible, y compris la promotion d'un usage international des DTS", les droits de tirage spéciaux, a ajouté le ministre. Les DTS sont l'unité monétaire du FMI, créée en 1969. Leur valeur est déterminée chaque jour par un panier composé des quatre grandes monnaies de réserve internationales: dollar, euro, yen et livre. Plusieurs pays, dont la France ou la Chine, ont remis en cause le rôle du dollar comme principale monnaie de réserve, appelant à une "diversification" au sein du système monétaire international. De ce point de vue, l'Allemagne estime, selon M. Schaüble, que "l'évolution du système monétaire international vers un système multipolaire peut être bénéfique si un tel processus est graduel, progressif et dirigé par des forces du marché reflétant les décisions autonomes des agents privés et publics". Interrogée sur de discours de M. Schaüble, la ministre française de l'Economie Christine Lagarde a estimé que le changement n'était "jamais facile", mais que la France avait "beaucoup d'ambition" en la matière. La question d'un nouvel ordre monétaire fait partie des priorités que Nicolas Sarkozy s'est fixées pour la présidence française du G20, à partir du 12 novembre. Le président de la banque centrale européenne Jean-Claude Trichet s'est dit samedi 9 octobre à Washington "très, très hostile" à toute sorte de "guerre des monnaies", réfutant ce terme pour qualifier la situation actuelle. "Nous sommes très, très hostiles à toute sorte ou tout genre de 'guerre des monnaies', a déclaré Jean-Claude Trichet devant la presse, en marge de l'assemblée annuelle du Fonds monétaire international (FMI). "Je ne qualifierais pas la situation actuelle comme étant reflétée par ces mots", a-t-il ajouté. Ce dernier a également affiché son "entière confiance" dans la capacité de la communauté internationale à "trouver les moyens de continuer à coopérer". La "guerre des monnaies", dénoncée fin septembre par le ministre brésilien des Finances Guido Mantega, a servi de toile de fond aux débats engagés ce week-end à Washington entre ministres des Finances des 187 Etats membres du FMI. Les dirigeants des pays riches et émergents s'accusent les uns les autres soit d'affaiblir délibérément leur monnaie pour favoriser leurs exportateurs, soit d'exercer des pressions indues pour faire monter celle des autres. Interrogé sur la faiblesse du dollar, Jean-Claude Trichet a dit sa confiance aux Etats-Unis. "Les autorités américaines à ma connaissance sont en faveur d'un dollar fort. J'apprécie toujours qu'ils fassent cette déclaration", a-t-il répondu. "Je ne ferai pas de commentaire sur ce que la Fed pourrait faire ou ne pas faire", a-t-il ajouté, interrogé sur la politique de la banque centrale américaine. Les Etats membres du Fonds monétaire international ne sont pas parvenus à surmonter de profondes divergences. Le Comité monétaire et financier international (CMFI) du Conseil des gouverneurs du FMI a conclu ses discussions par un communiqué appelant l'institution à "intensifier" ses travaux sur les mouvements de taux de change, y compris par des études sur la question