Cosigné en 2006 par Lyazid Khodja et Rachid Ben Allel le long métrage algérien "Si Mohand U Mhand" a raflé le Grand Prix du quatrième Festival du film amazigh d'Agadir qui s'est déroulé du l5 au 9 octobre au Maroc. Selon Assad Si Hachimi le commissaire du festival, "cette belle moisson n'est pas le fruit du hasard mais vient récompenser le dynamisme du film". L'œuvre écrite par Rachid Soufi a reçu une aide du FDATIC (Fonds de développement des arts, des techniques et de l'industrie cinématographiques, un fonds d'ailleurs qui est régulièrement alimenté par une partie de l'argent de la billetterie. “Cette distinction est un encouragement pour le cinéma algérien en général, et le cinéma amazigh, en particulier", s'est réjoui R. Benallal. S'agissant du choix de produire un film en langue amazighe, Benallal a estimé que "c'est l'originalité et l'authenticité d'un film qui importe et non la langue dans laquelle il est tourné". Répondant à une question sur la possibilité de doubler le film en langue arabe, le réalisateur a expliqué que "c'est la richesse du film en poèmes de Si Mohand U Mhand qui écarte une telle éventualité". "Je pense personnellement que les poèmes ne peuvent être récités que dans leur langue originelle", a-t-il considéré, ajoutant que "la traduction les déforme plus que tout". Outre ce long métrage, les participants algériens ont décroché deux autres prix: le Prix du meilleur documentaire et le Prix de la meilleure interprétation féminine. Le Prix du meilleur documentaire a été attribué au documentaire "Ger yenzizen", consacré à Kamel Hamadi alors que le Prix de la meilleure interprétation féminine a été décerné à la comédienne Anya. Le film mal distribué Il faut rappeler que lors de sa sortie internationale en 2008, " Si Mohand U M'hand " a été très mal distribué. Quelques rares salles en Algérie ainsi qu'en France l'avaient reçu, sans plus. Si Mohand U M'hand, un des rares longs-métrages d'expression amazighe qui peut être classé dans la lignée de Machaho de Belkacem Hadjadj ou encore La montagne de Baya de feu Azzeddine Meddour, nous replonge dans le cinéma algérien de l'après indépendance dont les thèmes majeurs furent ceux de la lutte armée et de l'exacerbation du sentiment patriotique. Si Mohand U M'hand, l'insoumis, est consacré certes à la vie du poète algérien du 19e siècle, mais retraduit tout le contexte colonial de l'époque de façon tout à fait caricaturale. Ce long- métrage qui a mis plusieurs années pour voir le jour et qui a reçu un budget colossal de "l'Année de l'Algérie en France ", du ministère de la Culture, une aide de l'ex-gouvernorat du grand Alger, était commercialisé en France après quelques passages dans les festivals et quelques projections dans les villes kabyles du pays et notamment à la capitale. Une représentante de la compagnie " Les films des deux rives " qui a assuré en 2008 sa distribution en France avait indiqué que " les deux copies disponibles de Si Mohand U M'hand seront projetées dans un premier temps à Montpellier et Perpignan ". Le film était présenté dans les deux villes par la comédienne Djamila Amzal, distribuée dans le film de Lyazid Khodja et révélée par le défunt Azzedine Meddour dans La Montagne de Baya. Ce long-métrage qui révèle un peu l'existence de quelques films d'expression amazighe est le portrait du poète errant, Si Mohand U M'Hand. Un homme qui n'a à aucun moment baissé l'échine devant le colonisateur français et qui a aidé son peuple à prendre conscience de sa propre liberté. La famille de Si Mohand U M'hand a participé pleinement à la guerre quoiqu'elle soit étrangère au village où il voit le jour. Celle-ci vient de s'y réfugier depuis peu pour fuir les suites d'une vendetta. Puis Mohand encore enfant voit les troupes du Général Randon monter à l'assaut du massif Kabyle. Ichariouan, son village, est détruit et ses habitants dispersés. C'est le deuxième exil du poète. Quatorze ans plus tard, la grande révolte de 1871 soulève le pays, la famille de Mohand s'y engage tout entière. Après la défaite, le père du poète est jugé, condamné et passé par les armes à fort national sur les lieux mêmes de son premier village détruit. Son oncle est déporté en nouvelle Calédonie. Son frère fuit en Tunisie et lui-même ne doit la vie sauve qu'à l'intervention d'un officier français. Tous les biens de la famille sont confisqués. Mohand réduit à l'indigence, quitte la montagne natale et s'en va. C'est son troisième et définitif exil. Il passera désormais sa vie à parcourir les villes et les routes d'Algérie et quelques fois de Tunisie, il vit au jour le jour, au fil des circonstances. Il prend conscience du caractère singulier de son destin et l'accepte comme tel. Pour s'étourdir, il s'adonne, d'abord avec réticence, et à la fin avec frénésie, à tous les plaisirs défendus : les filles, le vin, l'absinthe, le haschich, la cocaïne. Vivant d'expédients, il hante les cafés maures, les bistrots, tous les lieux où l'on tâche de s'étourdir et de prendre du bon temps... Poète jusqu'à la lie, Si M'hand U Mohand sera mort dans l'errance d'une terre encore confisquée par le colon...