La reprise économique s'est amorcée dans la région du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord (MENA), mais à un rythme intérieur aux tendances antérieures et au potentiel économique de la région. Les perspectives économiques de cette dernière dépendent de l'évolution de la situation dans le monde ainsi que du maintien de la solidité de la demande des marchés émergents et de l'évolution des cours du pétrole. " Une gestion macroéconomique judicieuse et une réglementation prudentielle du secteur financier ont aidé les pays de la région MENA a échapper à une grave récession ", a expliqué Shamshad Akhtar, Vice-présidente de la Banque mondiale pour la Région Moyen-Orient et Afrique du Nord. " Le défi consiste, maintenant, à assurer la poursuite de la croissance après la reprise. La région peut, à cette fin, mettre à profit la solide base de ressources humaines et physiques dans lesquelles elle investit depuis des dizaines d'années. " Selon le dernier rapport intitulé Regional Economic Outlook: MENA Sustaining the Recovery in Times of Uncertainty (Perspectives économiques de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord : " Maintenir la reprise en période d'incertitude) présenté aujourd'hui par la Banque mondiale, bien que la reprise se soit amorcée dans la région MENA, cette reprise est moins vigoureuse que celle des autres régions en développement. Le taux de croissance devrait s'établir, en moyenne, à 4 % en 2010, soit une augmentation d'un peu moins de 2 points de pourcentage par rapport à 2009, qui reste bien inférieure à celle enregistrée par les pays développés (5,6 points de pourcentage) et par les nations en développement (4,5 points de pourcentage). Il faudra attendre 2011 et 2012 pour que la région MENA puisse retrouver les taux de croissance moyens enregistrés avant les crises économique et financière. " Les facteurs qui brident la reprise de la région sont présents à des degrés divers, dans les trois grands groupes de pays qui la constituent : les pays exportateurs de pétrole membres du Conseil de coopération du Golfe, les pays en développement exportateurs de pétrole et les pays importateurs de pétrole ", a précisé Elena Ianchovichina, auteur principal du rapport et Économiste principale de la Banque mondiale pour la Région Moyen-Orient et Afrique du Nord. Les pays en développement exportateurs de pétrole de la région - Algérie, Iran, Iraq, Libye, Syrie et Yémen - ont essentiellement ressenti les conséquences de la crise par le biais du secteur pétrolier car leurs secteurs financiers sont principalement dominés par l'État et ne sont pas reliés aux marchés financiers mondiaux. Selon les projections, le taux de croissance réel dans ces pays, devrait se chiffrer à 2,9 % en 2010, soit une hausse inférieure à un point de pourcentage par rapport au taux de 2,1 % enregistré en 2009, mais il devrait grimper à 4,2 % en 2011, et s'établir à 3,9 % en 2012. Les pays en développement exportateurs de pétrole sont vulnérables aux chutes brutales des prix pétroliers, aussi la volatilité croissante des cours du pétrole leur pose-t-elle un problème de taille. La volatilité attendue dans les mois qui viennent rend plus difficile encore, mais impose d'autant plus, une gestion prudente des conditions macroéconomiques et des recettes pétrolières. " La diversification est cruciale pour ces économies ", a insisté Mme Akhtar. " Il est urgent que ces pays développent des sources de croissance non pétrolières pour réduire leur vulnérabilité dans l'immédiat et à plus long terme ". De surcroit, a-t-elle ajouté, certains de ces pays sont exposés aux chocs des prix alimentaires causés par les hausses récentes des prix du blé. Le Yémen paraît le plus vulnérable, suivi de près par l'Iraq. Mme Akhtar a par ailleurs fait remarquer que les pays en développement exportateurs de pétrole sont confrontés à des problèmes structurels profonds, qui vont continuer à faire obstacle à leur croissance à long terme. En réponse à la crise, certains pays sont revenus sur leurs efforts de réforme en adoptant des lois plus protectionnistes - alors que leurs niveaux de protection étaient déjà parmi les plus élevés du monde - et discriminatoires dans le traitement des firmes. D'autres rencontrent des problèmes de producti on qui limitent le volume de pétrole qu'ils produisent. Les résultats obtenus par ces pays pour les exportations autres que pétrolières ont par ailleurs été faibles par rapport à leur potentiel et comparés à ceux d'autres pays, tandis que leur secteur financier reste grevé par des prêts non productifs. Les pays membres du Conseil de coopération du Golfe (CCG) dont les économies sont bien intégrées (Arabie saoudite, Koweït, Bahreïn, Qatar, Émirats arabes unis et Oman), ont été les plus durement touchés par la crise, mais leur reprise a été rapide grâce à la hausse de la demande de pétrole émanant des marchés émergents asiatiques et à la stabilisation du secteur financier. Leur croissance en 2010 a été bridée par la faiblesse de l'expansion du crédit et par le fait que certains pays du CCG ont dû limiter leur production pour soutenir les prix du pétrole. Les projections pour 2010 font état d'une croissance économique de 4,2 % pour le groupe des pays du CCG, ce qui constitue une forte reprise après une croissance quasiment nulle en 2009. Elles indiquent aussi un taux de croissance de 5 % pour 2011 mais de seulement 4,8 % en 2012.