Quand les éditions Barzakh étaient créées en 2000 dans un contexte livresque relativement vide et ouvert au privé, la famille journalistique à tout de suite taxée cette néophyte boite d'élitiste. Mais derrière la petite maison qui s'est agrandie depuis, y avait deux passionnés de la littérature : Sofiane Hadjaj, lui-même écrivain et Selma Hellal. Y avait un travail, des recherches, des lectures, des rencontres, des débats médiatiques, des idées, bref toute une maîtrise d'un métier ouvert au vent et aux perfidies de tout genre. Dix ans après, il y a eu dans la liste des publications Barzakh 110 ouvrages soit à peu près 11 livres par an. Certes, la quantité ne compte pas, elle compte quand même si l'on veut donner des chances, séparer le bon grain de l'ivraie. Une décennie et voilà que le couple le plus connu des médias, Sofiane Hadjaj et Selma Hellal, se voit l'heureux élu de la Fondation Prince Claus pour la Culture et le Développement. Une fondation princière des Pays-Bas qui existe depuis 1997 et qui félicitait en 1999 avec le même prix, le dramaturge et comédien Fellag exilé en France depuis cette date. En septembre dernier, l'ambassade des Pays-Bas à Alger, avait annoncé cette bonne nouvelle, puis le 17 décembre 2010, les fondateurs de Barzakh se sont rendus à Amsterdam pour recevoir le trophée de 100.000 euros des mains de la noblesse hollandaise. La cérémonie a eu lieu au Palais Royal à Amsterdam en présence notamment de la Reine Beatrix, du Prince Willem Alexander, de la princesse Maxima, du Prince Constantijn et du secrétaire d'Etat Ben Knapen. Dans son allocution, le Prince Friso qui a longuement justifié ce trophée pour des éditions qui ont " créé un espace de liberté en Algérie, permettant ainsi un épanouissement de la culture et l'ouverture de débats sur des sujets complexes et importants. " Selon un communiqué de l'ambassade des Pays-Bas à Alger envoyé en septembre, le jury du Grand Prix Prince Claus a voulu rendre hommage à la maison d'édition Barzakh pour "avoir donné une forme concrète aux voix algériennes, pour avoir ouvert un espace de réflexion critique tellement nécessaire sur les réalités algériennes, pour avoir construit une passerelle entre des langues et des cultures différentes, et pour avoir rompu de manière créative la menace d'isolation culturelle du pays". Une autre cérémonie en l'honneur des lauréats sera également organisée à l'ambassade des Pays-Bas à Alger en janvier 2011. Il faut savoir que ce prix est décerné chaque année à des artistes, des intellectuels et des organisations culturelles d'Afrique, d'Asie, d'Amérique latine et des Caraïbes. Ses activités et rencontres consistent en conférences, séminaires, cours, réunions et expositions, est-il précisé sur le site de la fondation. La Fondation soutient des livres et des magazines dans diverses disciplines culturelles. Prestigieux prix donc qui aiderait sans doute les éditions Barzakh à publier davantage et à consolider un nom dans le monde très compliqué de la chose livresque. Spécialisées dans la littérature contemporaine, ces éditions ont toujours misé sur des écrivains qui sont plus ou moins reconnus dans l'Hexagone à l'exemple de Maïssa bey dont certains romans notamment "Bleu blanc, vert " sont enseignés au lycée français Descartes de Ben Aknoun, mais aussi de vrais talents contestataires à l'exemple de Mustapha Benfodil dont son succulent "Archéologie du chaos amoureux " a été publié chez eux. Avec la Khadramania du début 2000, Barzakh lançait un projet assez imitateur qui voulait que de jeunes scribes se penchent sur des récits policiers. à cette époque, l'inspecteur Llob de l'hégémonique Yasmina Khadra a eu un succès si foudroyant qu'il devenait contagieux même si on n'y comprenait rien. Certains auteurs, pour la plupart issus de la presse écrite comme Adel Mehdi, s'y étaient essayés mais sans triomphe aucun. Le polar version Barzakh n'avait pas fait recette comme chez Mohamed Mouleshoul dont la réputation fut déclenchée par la presse française en pleine équivoque du " Qui tue qui. " Du reste, ce qui a fait Barzakh, c'est incontestablement la fougue et le charisme de ses fondateurs dont l'effort et le sérieux ont fini par payer.