Après un déclin de près de 3 % en 2009, dû à la crise économique, la production mondiale de gaz commercialisée cette année a retrouvé la croissance. Selon les estimations de l'association Cedigaz la hausse est de 4% et a même dépassé de 1 % la production de 2008. Toutes les régions ont produit davantage, sauf l'Europe de l'Ouest qui connaît un déclin de sa production de gaz dans la mer du Nord. L'Amérique du Nord et grâce au boom des forages de gaz de schistes mais surtout et particulièrement le Moyen-Orient avec la mise en service des trains de liquéfaction de gaz au Qatar, ont vu leurs capacités de production augmenter. Notons que selon les données publiées récemment par la revue Pétrole et Gaz arabes, les membres de l'Opep représentaient, en 2009, 18% de la production et des exportations gazières mondiales. Selon la même source, la part des pays membres de l'OPEP dans la production gazière mondiale est bien sûr très largement inférieure à leur part dans la production de pétrole brut (41,9% en 2009), mais elle est en hausse constante depuis plusieurs années. L'an dernier, elle s'établissait à 18,1%, contre 16,1% en 2008 et 15,3% en 2005. La proportion et la tendance sont les mêmes pour les exportations gazières des Etats OPEP. En 2009, leur part dans le total mondial s'établissait à 18,5%, contre 17,1% en 2008 et 15,2% en 2005. Du côté de la demande celle-ci a été dopée par la reprise économique et donc de l'activité industrielle au premier semestre chez les grands consommateurs traditionnels de gaz, notamment la Corée du Sud, Taiwan et le Japon. Aussi, la demande d'électricité dans les pays émergents, au Moyen-Orient, en Amérique du Sud, en Chine a poussé de grands producteurs de gaz à importer du gaz naturel liquéfié. C'est le cas de l'Argentine, du Chili, du Koweit et de Dubaï. Dans les pays de l'OCDE, dont l'Europe, les prix élevés du charbon ont aussi profité à la demande de gaz alors que les grands froids ont été record. Les prix sont pour leur part, repartis à la hausse en 2010, après leur chute brutale en 2009. Les cours Henry Hub, qui font référence en Amérique du Nord, sont restés plombés par l'abondance locale de gaz de schistes extraits aux Etats-Unis. Le prix spot européen qui s'applique au gaz naturel liquéfié importé par méthanier, s'est repris très fortement, il est en ce moment quasiment le double du prix américain. Il se rapproche des tarifs des contrats à long terme de gaz acheminé par pipeline de Russie ou d'Algérie, qui sont eux indexés sur le pétrole. Notons que Fatih Birol, économiste en chef de l'Agence internationale de l'énergie (AIE), la croissance de la production de gaz d'origine non conventionnelle devrait permettre un "âge d'or" pour cette énergie, en la rendant bon marché et abondante. Dans ce sens, Fatih Birol estime que parallèlement à la stagnation de l'offre de brut, l'AIE prévoit un fort développement du gaz naturel liquéfié et du pétrole non conventionnel, (tiré) principalement (des) sables bitumineux canadiens, qui porteront la production mondiale à l'équivalent de 96 mbj en 2035. "Le gaz naturel pourrait connaître un âge d'or très bientôt. Cette énergie fossile sera meilleur marché et abondante, les gazoducs sont aisés à construire, et le gaz est comparativement plus favorable à l'environnement que le charbon" a-t-il indiqué. Et d'ajouter que d'ici 2035, environ un tiers de la production de gaz devrait venir de sources non conventionnelles. Ainsi, la surabondance actuelle de gaz naturel au niveau mondial devrait donc perdurer encore 10 ans. Cela signifie qu'il y aura beaucoup de pression à la baisse sur les prix du gaz, ce qui est évidemment une bonne nouvelle pour les consommateurs. Depuis deux ou trois ans, les perspectives du gaz naturel aux Etats-Unis ont complètement changé. Pour pallier la baisse de leurs ressources "classiques" de gaz, les Etats-Unis se sont lancés dans un programme massif d'équipement en terminaux méthaniers pour y recevoir du gaz naturel liquéfié. En conséquence, le prix du gaz avait dépassé les 12 $ par million de British Thermal Units (MBTU), unité anglo-saxonne utilisée dans ce secteur (*), pour atteindre un pic de 14 $/MBTU. Ce prix est désormais redescendu en dessous de 4 $/MBTU, complètement découplé du prix du pétrole qui reste voisin de 75 $ par baril. Il y a deux causes à cet effondrement des prix du gaz, l'une conjoncturelle et l'autre durable.