La banque centrale des Etats-Unis (Fed) a annoncé mardi le maintien de son taux directeur quasi nul et de son programme de rachats de titres du Trésor , tout en jugeant que la reprise économique reposait sur des bases "plus solides" et que l'emploi continue de s'améliorer. La Fed a aussi averti des risques d'inflation face aux "pressions à la hausse" des cours du brut sur les prix, qu'elle dit surveiller "de près", tout en jugeant que le renchérissement du pétrole ne devrait avoir qu'un effet "passager". A l'issue d'une réunion à Washington, le Comité de politique monétaire de la Fed (FOMC) a annoncé que la Réserve fédérale maintenait son taux directeur à quasi zéro et qu'elle comptait aller jusqu'au bout de son programme de rachats d'obligations du Trésor américain annoncé en novembre. Ian Shepherdson, économiste de l'institut HFE, relève que la situation désastreuse au Japon rendait "certain" le maintien de la politique monétaire ultra-accommodante de la Fed malgré les progrès de l'économie américaine dont prend acte le communiqué final du FOMC. La reprise repose désormais "sur des bases plus solides", écrit le Comité, notant que l'emploi s'améliore "progressivement". Le FOMC justifie sa décision de soutenir encore l'économie à tour de bras par le fait qu'il ne se satisfait pas de la baisse récente du taux de chômage (8,9% en février), aussi encourageante soit-elle, et que l'inflation sous-jacente reste encore, à ses yeux, très modérée. Une politique monétaire souple a tendance à stimuler l'activité - en rendant le crédit moins cher - mais aussi l'inflation, tandis qu'une politique restrictive (taux d'intérêt élevé) a tendance à contenir la hausse des prix. La rencontre devrait consacrer le maintien du cap actuel de la politique monétaire de la Réserve fédérale: taux directeur quasi nul et création de dollars par centaines de milliards pour soutenir la reprise du pays. Le consensus au sein du FOMC reste que si la situation économique s'améliore, la reprise aux Etats-Unis n'est toujours pas véritablement établie, et que la faiblesse de l'inflation permet de continuer à stimuler l'économie pour contribuer à faire baisser un taux de chômage jugé toujours trop élevé (8,9% en février). Si les responsables américains cherchent à se montrer rassurants sur les répercussions sur l'économie américaine des événements tragiques au Japon, en Libye ou à Bahreïn, les risques potentiels qui résultent de la situation dans ces trois pays renforcent la probabilité d'un statu quo monétaire. Pour Ian Shepherdson, du cabinet HFE, la Fed devrait faire preuve d'"attentisme". "Les sujets de discussion sont loin de manquer cette semaine pour le FOMC", notent les analystes de la société de recherche Wrightson. Néanmoins, le Comité ne devrait "pas avoir à prendre de décision difficile avant [sa réunion prévue pour la fin] avril". La rencontre pourrait alors surtout être l'occasion de discussions sur l'après-30 juin, date à laquelle la Fed est censée finir son programme de rachats d'obligations du Trésor américain --pour un montant total annoncé de 600 milliards de dollars-- lancé en novembre. Pour les analystes du cabinet Aurel ETC Pollack, "la banque centrale américaine se trouve dans une situation difficile", alors que dans l'ensemble, les autres banques centrales "commencent à communiquer sur les risques d'inflation". D'une manière générale, les dirigeants de la Fed affirment que la montée des cours du pétrole provoquée par les soulèvements populaires au Moyen-Orient et en Afrique du Nord ne devrait pas remettre en cause la reprise de l'économie américaine. Mais plusieurs s'inquiètent que l'inflation ne s'emballe et plaident pour un resserrement de la politique monétaire. Dans ce contexte se pose la question de la façon dont la Fed va piloter la fin de son programme de rachats de titres du Trésor de façon à ne pas perturber le bon fonctionnement du marché obligataire. Sur cette question, le débat oppose ceux pour qui la Fed pourrait continuer d'acheter des obligations d'Etat au delà du 30 juin, ce qui permettrait de soutenir encore un peu plus la reprise et de diminuer progressivement l'empreinte de la Fed sur le marché, à ceux qui y sont catégoriquement opposés. Ces derniers jugent que la Réserve fédérale en a déjà beaucoup trop fait et que ses rachats de titres font déjà peser un fort risque inflationniste en augmentant la masse monétaire (quand elle achète des bons du Trésor, la Fed crée automatiquement des dollars). Le résultat de ce débat ne devrait pas être connu mardi et, en l'absence d'annonce majeure, les économistes devraient surtout guetter ce que le FOMC pourra dire sur la situation et les perspectives de l'économie américaine. R.I.