Avec la décision d'Alcoa (AA), le numéro un mondial de l'aluminium, dévoile son offre publique d'achat sur le canadien Alcan, les analystes et des investisseurs enchainent leur imagination. Depuis lundi, le secteur minier et l'industrie des métaux sont en ébullition. “Nous pensons qu'il y a une forte possibilité que d'autres prétendants se déclarent pour Alcan ou Alcoa. Tous deux ont des modèles d'affaires intégrés verticalement très attractifs pour un grand nombre de participants”, notait lundi l'analyste de Credit Suisse à New York. “La sous-performance de leurs titres depuis 2003 les a rendus vulnérables à des prises de contrôle”, ajoute Pascal Carbonneau, de LODH à Montréal. Pour Credit Suisse, la période, qui s'annonce longue, d'examen d'un mariage entre Alcoa et Alcan par les autorités antitrust, laissera le temps à d'autres candidats, comme Anglo American, Rio Tinto ou BHP Billiton, de préparer des offres concurrentielles. Mercredi, c'était au tour de l'australien Rio Tinto de tenir la vedette, mais dans le rôle de cible. Le groupe australien a eu beau démentir avoir été approché par son concurrent BHP Billiton, le numéro un mondial des compagnies minières diversifiées, son titre a pris jusqu'à 21% pour achever la séance à Londres en hausse de 10,7% à un record de 3660 pences. L'action BHP Billiton était elle-même fébrile (+5,4% à 1249 pence). Depuis Melbourne, Chris Lynch, l'un de ses dirigeants, a jugé plausible l'hypothèse d'un rachat de son entreprise par un fonds de capital investissement. “En raison du maintien du prix des métaux à des niveaux élevés, les sociétés minières, qui ne sont pas ou très peu endettées, engrangent d'énormes liquidités”, explique Pascal Carbonneau. De quoi susciter l'intérêt du capital investissement. “En outre, avec le sous-investissement passé, peu de nouveaux projets de production sont en cours”, ajoute l'analyste. Autrement dit, les groupes miniers produisent plus qu'ils ne découvrent et les réserves globales s'amenuisent. Dans ces circonstances, acheter un concurrent doté de larges réserves apparaît comme la meilleure manière de pérenniser sa croissance. Les spéculations de consolidations continueront donc d'animer les bourses, sous condition, bien entendu, que les cours des métaux restent soutenus. Cela ne fait pas le moindre doute pour Citigroup (C). Dans une note récente, ses analystes se disent “ardents partisans de la théorie du supercycle des matières premières. Nous ne croyons pas que les prix des métaux sont artificiellement dopés, menacés d'un excès d'offre ou cycliquement surchauffés”. Cependant, “l'indice Goldman Sachs des commodités n'a toujours pas retrouvé son pic de l'an passé (ndlr: il est inférieur de 9% au record de juillet 2006). Pour accréditer la thèse du supercycle, il lui faudrait battre un nouveau record cette année, alors que l'économie ralentit. Le pic a probablement déjà été atteint l'an passé”, a pour sa part tempéré Bill Miller, gérant vedette de Legg Mason, lors de la conférence annuelle de la société de gestion à Londres fin avril. “Le concept de supercycle des commodités génère le même bourdonnement que la nouvelle économie”, a renchéri à la même occasion Paul Ehrlichman, responsable actions chez Brandywine. Et de rappeler que sur les marchés, un engouement excessif se solde toujours par un krach. Sur le London Metal Exchange (LME), premier marché de métaux à terme, le prix d'une tonne de nickel pour livraison dans trois mois a grimpé jusqu'à 49. Ces informations témoignent de l'intérêt croissant des investisseurs mondiaux pour les métaux.