Apparue sur la scène artistique fin des années 90, Samira Brahmia est devenue une figure du rock chaâbi incontournable pour les rendez-vous festifs de chez nous et d'ailleurs. En ce moment où les Khaïmates prospèrent dans tous les coins et recoins d'Alger, l'artiste fut conviée pour animer l'une d'elle, la plus médiatisée d'entre tous : Khimatkoum chez Djezzy, installée cette année à l'hôtel Hilton. Look d'étudiante, Samira Brahmia, l'ex-des “Orientales” prend sa place parmi l'orchestre comme prend sa place un orateur qui vous veut du bien. Guitare à la main, elle râpe les cordes en regardant les vibrations qui en sortent d'un air tranquille. Elle est prête, les ballades semblent contenues dans sa tête avec hiérarchie. Elle semble ravie d'être en face d'un public qui l'a depuis longtemps adopté, ses fidèles musiciens la rejoignent, ils l'entourent de leur sourire et de leurs instruments. Pour saluer le public, elle livre une intro en anglais. Par tradition, elle veut d'abord servir quelque chose de sacré en ce mois sacré. C'est alors qu'elle chante le standards de Slimane Azem avant d'invoquer, Le Seigneur dans Oualaha ila lah, histoire de rappeler l'ambiance pieuse et solennelle. Après ses préludes qui colle avec l'esprit très sacré du mois de Ramadhan, Samira Brahmia ouvre son répertoire, elle en sort des classiques, des ballades qui font valser le public. Artiste résolument ouverte, contre les obscurantismes, elle chantera un morceau révolté en patois locale pour refuser les mariages forcés, les ravages du terrorisme. "Pendant mon adolescence, nous avons vécu ça. C'est pourquoi il ne faut jamais oublier les personnes qui se sont sacrifiées pour que l'Algérie soit debout et qu'on puisse sortir le soir..", confie-elle à l'assistance. Décennie noire, plaie encore ouverte, les vomissures remontent en surface mais sont vite effacées par l'envie de faire la fête. Elle reprend sa guitare, sa langue arabe pour servir cette fois-ci la célébrissime, "Oua haramtou aâlik nouassi", ballade d'un amour insomniaque, aussi doux que frustrant. La khaima prend soudain les couleurs de l'intimité, d'un voyage à l'intérieur d'un espace clos qui s'ouvre à tout moment par la magie des vibrations et de la voix de Samira Brahmia. Elle passe avec aisance d'une langue à une autre, d'un rythme à un autre. Elle choisie " sa " langue, son ton selon l'ambiance dans la salle. C'est trop calme, fallait les réveiller ! Elle entonne alors " Is there some one" avant de lancer en pleine figure l'âme de chez nous enrobé dans le texte tout à fait drôle de " Hmed Eljadarmi ". Impassible, le public s'étirait sur les poufs en cuire, il lampait dans la tasse de thé en mordant dans un kalb elouz mielleux. D'un répertoire à l'autre, elle livre le meilleur cuvé, elle va chercher cette fois ci dans les classiques de Youcef Boukella en proposant, "Noudjoum safia". Titre qui fait assurément planer avant d'enchaîner avec Breakfast with a stanger dédié aux amoureux en exil ou séparés par la mer. Le jazz est cette musique qui vient de loin et vous transporte au firmament, surtout quand on a l'âme d'un artiste. Nostalgie nostalgie… Samira Brahmia qui maîtrise tous les genres en les fusionnant, prête sa voix aux textes jazzifié, elle revient vers ses premiers amours lorsqu'elle était avec son trio des "Orientales " puis lâche la fabuleuse, " Alger, Alger " le standard de la musique juive, une invention de Lili Bonniche. Avant de s'éclipser et pour finir, elle propose "Jdoudna ", un pure gnawi qui séduit tant de jeunes de part le monde. Il faut savoir que les chansons de Samira Brahmia mêlent influences pop rock, chaâbi, traditions celtiques aux instruments du Grand Sud algérien. Ses mélodies ciselées sont dominées par sa voix pure et claire ainsi qu'une capacité étonnante à faire passer l'émotion. Ses chansons parlent d'amour, de liberté, de la nécessité de faire face, des conditions aliénantes que vivent certaines femmes (Samira a participé à "20 ans Barakat !" un disque contre l'application du Code de la famille en Algérie)… Bref, elle décrit le monde d'aujourd'hui avec lucidité et tendresse, composant des mélodies où la guitare folk répond à la derbouka. Bousculant les styles et les idées reçues, Samira Brahmia se produit en quartet (guitare folk, mandole, contrebasse, percussions). Sa musique représente l'idée pure entre la tradition et la modernité.