L'agence financière Moody's a abaissé, hier, d'un cran la note de deux grandes banques françaises, Société Générale et Crédit Agricole, suscitant de nouvelles tensions sur le secteur bancaire français, réputé très vulnérable à la crise de la dette en zone euro. La rumeur d'un abaissement général circulait depuis dimanche. Moody's avait prévenu dès juin qu'elle pourrait, à l'issue d'un examen qui arrivait à échéance cette semaine, revoir à la baisse les notes des trois banques cotées. Dans le cas du Crédit Agricole, dont la note passe de "Aa1" à "Aa2", la décision est liée à l'exposition à la Grèce, tandis que dans celui de Société Générale, dont la note est rétrogradée de "Aa2" à "Aa3", la raison est autre. Moody's reconnaît que l'exposition de la banque de la Défense à la dette grecque est modeste (1,1 milliard d'euros), mais a décidé de la traiter à égalité avec ses concurrentes concernant l'un des composants de sa note, à savoir le soutien implicite des pouvoirs publics en cas de défaillance. "C'est une bonne nouvelle, parce que, c'est une dégradation très limitée, seulement deux banques sur trois, et surtout Moody's notait, jusqu'ici, mieux que les autres agences", a commenté le gouverneur de la Banque de France, Christian Noyer. "Donc, en réalité, elle les met au même niveau ou légèrement mieux que les autres agences", a-t-il expliqué. "Les Français ne doivent pas s'inquiéter, les banques françaises sont solides", a assuré pour sa part le ministre de l'Industrie, Eric Besson. "Simplement, nous avons une spéculation qui est totalement irrationnelle" et qui conduit à se demander "si nous sommes dans une économie de marché ou dans une économie dictée par la rumeur", a-t-il ajouté. "On est sous le règne de la rumeur", a abondé le président de l'Autorité des marchés financiers (AMF), Jean-Pierre Jouyet. Les banques ont été fortement chahutés en Bourse, lundi et mardi, à la suite de rumeurs diverses qui ont conduit BNP Paribas, suivant l'exemple de la Société Générale en août, à demander à l'AMF l'ouverture d'une enquête. "S'il y a suffisamment d'éléments pour le faire, il n'y a pas de raisons qu'une enquête ne soit pas ouverte", a indiqué M. Jouyet. Dès lundi, le P-DG de la Société Générale Frédéric Oudéa avait estimé que la décision avait déjà été intégrée par le marché, commentant la rumeur d'une dégradation de son établissement. De fait, les valeurs bancaires limitaient leurs pertes en milieu de matinée à la Bourse de Paris. Tôt la matinée, Crédit Agricole gagnait 1,67% à 5,24 euros, Société Générale cédait 2,96 euros à 17,38 euros et BNP Paribas 2,70% à 27,24 euros, dans un marché en hausse de 0,62%. Dans le cas du Crédit Agricole, Moody's juge que si le groupe affiche des ressources en fonds propres "considérables" pour absorber des pertes potentielles liées à la Grèce, son exposition elle-même (y compris à travers sa filiale Emporiki) "est trop importante pour correspondre aux notes actuelles" de la banque. Moody's épargne BNP Paripas Quant à BNP Paribas, Moody's a prolongé la "mise sous surveillance négative" de la note de la banque française, signe qu'elle envisage toujours de l'abaisser, mais l'a pour l'instant laissée inchangée. L'agence d'évaluation financière Moody's a prolongé la surveillance négative sur la note de BNP Paribas, signe qu'elle envisage toujours de l'abaisser, mais l'a pour l'instant laissée inchangée, selon un communiqué publié mercredi. L'agence laisse entendre que, au terme de son premier examen de trois mois, elle n'aurait pas modifié la note de la banque sur la base de son exposition à la dette d'Etat des pays fragiles de la zone euro, mais qu'elle a choisi de prolonger l'examen en se concentrant sur le financement de la banque sur les marchés. Elle a précisé qu'elle fonderait désormais son examen principalement sur la capacité de BNP Paribas de se financer sur les marchés, qui suscite des inquiétudes. Depuis le mois d'août, l'ensemble des banques européennes éprouvent des difficultés à se financer en dollars, la plupart des fonds monétaires américains, grands pourvoyeurs de liquidité, ayant décidé de réduire leurs approvisionnements. BNP Paribas prend des mesures pour rassurer les investisseurs La banque française BNP Paribas a annoncé, hier, une série de mesures pour renforcer son capital et sa capacité à se financer dans l'espoir d'alléger la pression des marchés sur son titre. Les investisseurs se montrent inquiets de son exposition à la dette grecque. Si, à l'instar de Société Générale ou Crédit Agricole, BNP Paribas a souffert en bourse ces derniers jours, en revanche, la banque n'a pas vu sa note abaissée par l'agence Moody's comme ses deux concurrentes mercredi. Pour rassurer les marchés quant à sa solidité financière, BNP Paribas veut renforcer son capital, en portant son ratio fonds propres/crédits à 9% début 2013. Pour y parvenir, le groupe entend continuer sa politique qui consiste à mettre en réserve l'essentiel de ses bénéfices. Il prévoit également de réduire la taille de son bilan, en se désengageant partiellement de certaines activités qui mobilisent trop de capital, comme le prêt hypothécaire.