Malgré leur tentative de présenter un front uni après des semaines de divergences, les grandes puissances du G20 ont une nouvelle fois échoué à Washington à rassurer des marchés en pleine tempête en donnant l'impression d'avoir épuisé les solutions concrètes face à la crise. Les principales places financières ont repris, avant-hier, leur chute de la veille, et tous les commentaires d'analystes avançaient une même explication: les ministres des Finances et banquiers centraux du G20 ont déçu. Les grands argentiers des vingt principaux pays riches et émergents ont pourtant promis d'une même voix, jeudi au terme d'un dîner de travail, "une réponse internationale forte et coordonnée". Leur communiqué évoque plusieurs volets qui vont au-delà des vagues engagements des pays riches du G7, qui, le 9 septembre en France, avaient eu l'effet d'un coup d'épée dans l'eau. Alors que plusieurs banques européennes, notamment françaises, sont soupçonnées par les investisseurs de n'être pas suffisamment capitalisées pour faire face à une éventuelle faillite de la Grèce et à la contagion qu'elle entraînerait dans la zone euro, les ministres ont ainsi promis de faire en sorte que les établissements financiers "disposent d'un capital adéquat". Et, en plein débat entre Etats-Unis et Européens sur la politique à suivre - relance de l'économie selon les premiers, réduction du déficit selon les seconds - les gouvernements ont tenté une synthèse, s'engageant à "soutenir la croissance, mettre en oeuvre des plans de consolidation budgétaire crédibles et assurer une croissance forte, durable et équilibrée". La nuance, assure le membre d'une délégation, réside dans l'ordre de leur énoncé: la croissance, citée deux fois, arrive en tête, au moment où les craintes d'une rechute des pays occidentaux dans la récession gagnent en vigueur. Les banques centrales annoncent aussi qu'elles continueront "à soutenir la reprise". La réunion du G20, prévue de longue date, ne devait initialement donner lieu à aucune déclaration. Mais les puissances étaient face à un dilemme: rester muettes en pleine débandade boursière aurait été interprété comme un aveu d'impuissance, alors qu'un communiqué trop faible risquait aussi d'aggraver la solution. La présidence française du G20 a choisi la voie d'une déclaration, en tentant de muscler le discours du dernier G7. Et, après plusieurs passes d'armes entre Américains et Européens, les Etats-Unis ont calmé le jeu en notant l'engagement de la zone euro à prendre les mesures nécessaires pour assurer sa stabilité financière. Car la zone euro, "épicentre de la crise" selon l'expression du ministre brésilien Guido Mantega, était pressée de toutes parts (par Washington, Londres, Ottawa et les grandes puissances émergentes) de mettre de l'ordre chez elle. En guise de réponse, les Européens ont réaffirmé leur stratégie en donnant rendez-vous à la prochaine réunion du G20-Finances, les 14 et 15 octobre à Paris, lorsque l'accord du 21 juillet par lequel la zone euro s'engage à aider à nouveau la Grèce et à renforcer son fonds de secours financier devrait être, en principe, enfin opérationnel. Les Américains ont eux plaidé la cause de leurs plans pour l'emploi et la réduction du déficit, et le Japon a défendu sa politique de reconstruction après le tsunami de mars. "Voilà tout!", ont lancé les analystes de High Frequency Economics, en résumant la frustration des investisseurs. Ces trois puissances "se sont engagées à faire ce qu'elles s'étaient déjà engagées à faire, et aucun des Vingt n'a apporté à cette réunion la moindre nouvelle initiative politique. Génial!", ont-ils ironisé. D'autant que la mise en musique de la réponse "forte et coordonnée" à la crise a été repoussée au sommet du G20 de Cannes, les 3 et 4 novembre dans le sud de la France, lorsque les pays présenteront un "plan d'action collectif ambitieux, dans lequel chacun aura son rôle à jouer".