L'inflation dans la zone euro s'est accrue en septembre de façon brutale et inattendue pour atteindre 3,0%, son niveau le plus élevé en presque trois ans, compromettant fortement les chances de voir la Banque centrale européenne abaisser ses taux en octobre. L'inflation atteignait 2,5% en août, soit déjà nettement au-dessus de l'objectif visé par la BCE, dont la mission essentielle est de maintenir la hausse des prix à un niveau légèrement inférieur à 2%. Les économistes attendaient un chiffre de 2,5% pour septembre, comme en août. Ils estiment toutefois que l'inflation retombera bientôt, du fait du ralentissement économique. "Ce n'est pas un bon chiffre, mais je ne paniquerais pas. Ceci dit, je pense que ces chiffres impliquent que la BCE ne baissera pas ses taux d'intérêt la semaine prochaine", a tempéré Martin Van Vliet, économiste chez ING, selon qui l'inflation diminuera ces prochains mois en raison de la baisse des prix du pétrole et de l'alimentation. Les marchés anticipaient de plus en plus une baisse des taux directeurs de la BCE, en soutien à l'économie européenne et afin de compenser les mesures de restriction budgétaires mises en place par la plupart des pays européens. La banque d'investissement JPMorgan indiquait la semaine dernière anticiper une baisse de 50 points de base des taux de la BCE, à 1,0%. Selon les sondages, 56 économistes sur 76 interrogés estimaient que les taux seront inchangés lors de la réunion de politique monétaire d'octobre, qui sera la dernière du président de la BCE Jean-Claude Trichet. Ils prévoyaient en revanche une baisse des taux début 2012. Qui devra baisser les taux ? Après avoir relevé les taux à deux reprises cette année, la BCE a changé d'attitude lors de la réunion de septembre et entrouvert la porte à de futures baisses. Selon de nombreux économistes, il serait utile au prochain président de la BCE, l'italien Mario Draghi, que Jean-Claude Trichet décide d'une baisse du loger de l'argent avant sa prise de fonction. Ils estiment en effet que si Mario Draghi devait prendre une telle mesure pour sa première réunion de politique monétaire, en novembre, il risquerait d'être ensuite dépeint comme un tenant de la baisse des taux. Cela impliquerait toutefois que Jean-Claude Trichet laisse comme dernière mesure de son mandat de huit ans une baisse des taux dans un contexte d'inflation élevée: une telle décision, contraire aux principes fondamentaux de la BCE, aurait de quoi hérisser les partisans de l'orthodoxie budgétaire. La zone euro pourrait donc devoir attendre de nouveaux signes de ralentissement, ou un recul de l'inflation, pour recevoir une bouffée d'oxygène sous la forme d'une baisse des taux. Or de tels signaux pourraient bientôt apparaître. "Le ralentissement a fait baisser les prix des matières premières. En conséquence, nous devrions observer un ralentissement de l'inflation des prix de l'énergie, qui a été le principal moteur de l'inflation de base ces derniers mois", a prévenu Clemente De Lucia, économiste chez BNP Paribas.