L'essor de la publicité sur internet attire de plus en plus de start-ups qui aident les annonceurs à mieux cibler les consommateurs, devenant, pour les meilleures d'entre elles, les concurrentes inattendues de géants comme Google et de grands noms de la publicité comme WPP. Ces sociétés capitalisent sur le succès de la publicité "display", qui désigne les bandeaux et les vidéos commerciales insérées dans des sites internet, par opposition au "search", c'est-à-dire les liens sponsorisés affichés lors d'une recherche sur le web. Pour affiner le ciblage des campagnes publicitaires et ainsi améliorer leur efficacité, la plupart des start-ups utilisent des "cookies", ces fichiers que les serveurs internet enregistrent sur les machines des utilisateurs pour suivre leurs mouvements d'un site à un autre. Leur utilisation fait toutefois l'objet d'une vigilance accrue des autorités de régulation. Alors que Google s'est déjà adjugé une grande partie du marché des liens sponsorisés, estimé à 30 milliards de dollars, la publicité "display" fait désormais l'objet de toutes les convoitises, d'autant que les grandes marques investissent de plus en plus sur internet pour leur image aux dépens des médias traditionnels comme la presse. "A la différence du 'search', qui est complètement dominé par Google, le 'display' est plutôt fragmenté et évolue beaucoup", souligne Ian Maude, analyste à Enders Analysis. "Reciblage publicitaire" "Cela crée assurément une opportunité pour les petits acteurs d'entrer sur le marché mais on voit aussi de gros acteurs comme Google s'investir également de manière assez volontaire", ajoute-t-il. La publicité "display" croît plus rapidement que le "search", avec des revenus qui devraient doubler entre 2010 et 2013 pour atteindre plus de 35 milliards de dollars par an, selon les prévisions de l'agence ZenithOptimedia. L'un des nouveaux acteurs de ce marché est le français Criteo, une start-up soutenue par des sociétés de capital-risque comme Index Ventures ou Bessemer Venture Partners. Criteo s'est spécialisée dans le "reciblage publicitaire", qui consiste à identifier les internautes qui se sont rendus sur un site de vente en ligne sans faire d'achat. Criteo leur propose ensuite des publicités pour des produits similaires lorsqu'ils se rendent sur d'autres sites. Cette stratégie a convaincu des commerçants en ligne comme eBay, Expedia ou Sears and Target, qui sont devenus clients de la société et devraient lui permettre de dégager un chiffre d'affaires de 200 millions de dollars cette année après seulement trois ans d'existence. "Nous essayons de dupliquer ce que Google a fait avec le 'search' dans le 'display'", a expliqué Grégory Gazagne, directeur général pour la France, l'Europe du Sud et l'Amérique latine, lors du sommet Reuters sur les médias à Paris. "Le début d'un processus" "Comme pour les liens sponsorisées de Google, nous ne sommes payés que lorsque les gens cliquent sur nos publicités. Nos instruments sont suffisamment bons pour anticiper s'ils vont le faire ou non, donc nous pouvons nous le permettre." BlueCava, une autre start-up basée en Californie, utilise, de son côté, ce qu'elle appelle une empreinte digitale, qui lui permet d'identifier n'importe quel appareil connecté à internet, que ce soit un ordinateur, un Smartphone ou une console de jeux, avec un taux d'exactitude de plus de 99%. Son fondateur et P-DG, David Norris, souligne que la publicité "display" a encore d'importantes marges de manœuvre pour progresser en termes d'efficacité. "C'est comme lorsque vous allumez la radio le matin en allant en voiture au travail", a-t-il expliqué lors du sommet Reuters. "Vous entendez publicité après publicité mais elles sont diffusées complètement au hasard parce qu'elles n'ont aucune idée de qui vous êtes." Selon lui, l'efficacité du "display" obtient une note de 5 sur une échelle de 100 contre 60 pour les liens sponsorisés. "Nous sommes au début d'un processus qui ne va cesser de s'améliorer pour les consommateurs", estime-t-il. Cette ébullition n'est pas passée inaperçue auprès des géants du secteur de la publicité. Google s'est lancé dans une série d'acquisitions avec l'objectif, à terme, d'atteindre dans le "display" la domination qui est aujourd'hui la sienne dans le "search". Les principaux groupes publicitaires suivent également ces évolutions avec attention, afin de s'assurer que les nouveaux outils destinés à améliorer l'efficacité de la publicité sur internet ne les rendent pas moins incontournables pour leurs plus gros clients. WPP, le numéro un mondial de la publicité, et le français Publicis, ont ainsi multiplié les acquisitions dans le numérique ces dernières années.