A la veille de la célébration du cinquantenaire de l'indépendance algérienne, qui intervient presque jour pour jour avec le cinquantième anniversaire de la disparition de Frantz Fanon, un colloque international de deux jours lui est consacré, à partir d'aujourd'hui. C'est la première fois que la personnalité de cet homme engagé, qui a vécu de longues années en Algérie, sera approchée de façon aussi solennelle qu'érudite. Organisé par le ministère de la culture de concert avec le CNRPAH, l'AARC, la Bibliothèque nationale et le centre national des archives, ce rendez-vous qui a été précédé, ce dimanche par une conférence, "Frantz Fanon, parcours de militant et d'intellectuel", de Amar Belkhodja de la fondation "Mechaâl Echahid", est inédite. Figure emblématique de la lutte des classes, des libertés des peuples, des décolonisations, des engagements pour la justice, Frantz Fanon est très peu connu par la nouvelle génération algérienne, quoi qu'il ya quatre ans, le président de la république, Abdelaziz Bouteflika avait ordonné à l'occasion du salon du livre d'Alger, de rééditer une collection d'ouvrages anticolonialistes, dont " Les Damnés de la terre ", chez l'ANEP. Défenseur acharné des causes justes, l'homme écrivait avec frénésie sur son lit de mort, à l'hôpital de Bethesda dans le Maryland (USA), un lieu ou ça lui coutait de se soigner, lui qui, toute sa vie combattait l'impérialisme et les privilèges. Il décède le 6 décembre 1961, à l'âge de 36 ans, suite à une leucémie, à quelques mois de l'indépendance de l'Algérie. Simone de Beauvoir qui avait rencontré dans les années 50, Frantz Fanon en Italie, avec un groupe d'amis dont Jean Paul Sartre a remarquablement raconté dans " La Force des choses " la ferveur de l'homme, sa vivacité, ses projets de lutte qui lui tenait à cœur ; elle racontera même cette boutade qui résume l'esprit de l'homme : " Quand vers 2 heures du mati, me sentant éreintée, je me suis excusée pour quitter la table et rejoindre ma chambre ; Franz Fanon me regarde, l'air grave en me lançant : Je déteste les gens qui s'économisent ! " Ce texte est cité de mémoire, son sens n'est cependant pas trahie ; il exprime comme voulait le montrer Simone de Beauvoir dans " La force des choses", l'incroyable énergie de cet homme, qui veillait très tard, même jusqu'à l'épuisement, sur le possible bonheur des êtres.
Le généreux Fanon Intellectuelle, psychiatre, essayiste, homme engagé, Frantz Fanon rejoignit les rangs du Front de Libération Nationale (FLN) en 1954 où il a milité aux côtés de Abane Ramdane et Ben Youcef Benkhedda, avant d'être expulsé d'Algérie par l'administration coloniale, en 1957. Cadre du FLN, Frantz Fanon a rejoint Tunis où il intégrera l'équipe du Moudjahid, avant d'être nommé, en 1960, ambassadeur du Gouvernement Provisoire de la République Algérienne (GPRA) au Ghana. Ce colloque qui s'ouvre aujourd'hui à la bibliothèque nationale, (BN) du Hamma et qui se poursuivra jusqu'à demain s'intitule, "Frantz Fanon, aujourd'hui". Des chercheurs et universitaires venus de Tunisie, de France, d'Italie, des Etats-unis d'Amérique et d'Algérie prendront part à ce rendez-vous ou plusieurs thèmes seront abordés notamment l'analyse de l'œuvre de Fanon dans son aspect théorique et ses dimensions socio-culturelles et socio-politiques, à la lumière de l'actualité, selon les organisateurs. Par ailleurs des notes du professeur Fanon retrouvées aux archives du CHU de Blida (Joinville précédemment) qui porte le nom du psychiatre et dans lequel il avait exercé en tant que médecin-chef entre 1953 et 1956, feront l'objet d'une autre conférence qui sera donnée par des médecins psychiatres du même établissement hospitalier. Des expositions de livres, de documents sur les différentes étapes de la vie de l'écrivain seront également présentés à la bibliothèque nationale. Outre les conférences et les expositions, des projections audiovisuelles seront aussi au rendez-vous avec la présentation d'un film (52minutes) retraçant la vie de Frantz Fanon. Les enfants de Frantz Fanon, Olivier et Mireille, seront présents au colloque. Né le 20 juillet 1925 à Fort-de-France (Martinique), Frantz Fanon a été un des plus grands militants de la cause nationale algérienne, il a été inhumé, selon ses souhaits, en terre algérienne où il repose au cimetière des "chouhada" de Aïn Kerma, près de la frontière algéro-tunisienne. Ces ouvrages référentielles, s'appellent "Peau noire, masque blanc"(1952), "L'an V de la révolution algérienne"(1959), "Les damnés de la terre"(1961-paru après sa mort), des œuvres qui continuent à inspirer de nombreux écrivains à travers le monde.