La Grèce et ses créanciers privés ont repris leurs négociations, hier, et il semble que les positions des deux parties se rapprochent en vue d'un accord qui doit éviter un défaut incontrôlé. Un tel accord doit être conclu d'ici lundi afin de déclencher le versement d'une nouvelle aide qui doit permettre à la Grèce d'honorer 14,5 milliards d'euros de remboursements d'emprunts en mars. Cette aide proviendrait d'un plan de renflouement de 130 milliards d'euros concocté en octobre par l'Union européenne et le Fonds monétaire international. Les négociations avaient été rompues, vendredi dernier, en raison de divergences sur le coupon que devrait verser la Grèce sur les obligations nouvelles qu'elle émettrait en échange de celles détenues par ses créanciers privés. Mais les discussions rouvertes cette semaine auraient permis d'arrondir les angles. "L'atmosphère était bonne, des progrès ont été réalisés et nous continuerons demain après-midi", a dit le ministre des Finances Evangelos Venizelos à l'issue des discussions tenues, avant-hier. L'Institut de la finance internationale (Ifi), organisme qui représente les créanciers privés, a jugé les discussions "productives". Optimisme partagé par les marchés financiers (même si les Bourses européennes peinent à s'orienter en matinée) et par le ministre français chargé des Affaires européennes Jean Leonetti, lequel a toutefois souligné que les Européens ne prêteraient pas plus d'argent à Athènes. "La Grèce ne doit pas compter sur autre chose que la solidarité qui a été établie et la négociation qui est en cours et qui va aboutir avec ses créanciers privés", a-t-il dit. Coupon fixe puis variable Selon des banquiers et des sources proches des discussions, un accord pourrait intervenir dans les jours qui viennent. Ce n'est pas la première fois qu'une telle prédiction est faite et qu'elle est démentie par les faits cependant. "Ils évoluent vers un accord et je pense qu'ils concluront le plus rapidement possible, peut-être même avant la réunion de l'Eurogroupe de la semaine prochaine", a dit une source à Reuters. Cette réunion de l'Eurogroupe (ministres des Finances de la zone euro) est prévue lundi et une bonne partie de l'accord d'échange de dette devait être convenue, hier, et finalisée avant cette réunion, a précisé Evangelos Venizelos. En outre, la "troïka" (FMI, UE et Banque centrale européenne) devait rencontrer le ministre des Finances grec, ainsi que le Premier ministre Lucas Papademos, hier après-midi, pour discuter réforme et finalisation du programme de renflouement. "Voici venus le moment crucial de la bataille finale de l'échéance de dette et le moment crucial de la bataille finale et décisive d'un nouveau renflouement", a dit Evangelos Venizelos, avant-hier, au Parlement. "Il faut négocier maintenant, à tout prix, pour le bien du pays." Les négociations ont été ardues, les créanciers craignant de perdre plus que la moitié de la valeur faciale de leurs obligations, comme cela est prévu par le plan d'échange de titres. Athènes et ses créanciers publics voulaient à l'origine imposer un coupon d'un peu plus de 3,5% aux créanciers privés, alors que ces derniers veulent au moins 4%, a dit une source proche des pourparlers. Selon une autre source, une autre possibilité est à l'étude, celle d'un coupon qui augmente après être resté fixe les 10 premières années. Union sacrée politique La presse grecque, qui ne cite pas ses sources, croit savoir que les deux parties pourraient transiger sur un coupon variant de 3% à 5%, suivant les échéances des obligations nouvelles, débouchant sur une perte nette de 65 à 70% pour les créanciers. La dette de la Grèce est de plus de 350 milliards d'euros et l'accord d'échange de dette est censé la réduire d'une centaine de milliards. La Grèce connaît sa crise la plus grave de l'après-guerre, avec un chômage sans précédent et des manifestations, grèves et débrayages quasi quotidiens contre des mesures d'austérité qui ont intensifié une récession déjà brutale. Près d'un jeune sur deux est sans emploi et les hausses d'impôts et réductions salariales successives nourrissent la colère populaire. Le dernier programme de renflouement conclu avec l'Union européenne et le Fonds monétaire international (FMI) (sous réserve de mesures d'austérité sévères et de réformes structurelles) est censé ramener la dette à 120% du PIB en 2020 contre 160% actuellement. Mais le commissaire européen aux Affaires économiques et monétaire Olli Rehn a prévenu que sans engagement des partis politiques grecs envers les réformes, ce programme risquait de ne pas apporter tous les bénéfices escomptés. "Les Grecs ont fait beaucoup, s'ils ne progressent pas c'est pour des motifs de politique intérieure", dit-il, dans un entretien publié, hier, par le Süddeutsche Zeitung. "Il est primordial que les grands partis politiques européens contactent leurs familles politiques en Grèce pour convaincre leurs leaders de formuler un engagement clair envers le programme d'aide de l'UE", ajoute-t-il. "Faute de quoi, ce programme pourrait échouer, ce qui n'aiderait ni la Grèce ni l'Europe."