La Grèce semble en bonne voie pour obtenir demain le déblocage d'un nouveau plan d'aide de l'Union européenne et du FMI, malgré les doutes qui persistent chez ses partenaires de la zone euro quant au rythme auquel elle réussira à réduire sa dette. Le gouvernement grec a exposé, jeudi dernier, de nouvelles mesures d'austérité, grâce auxquelles il espère obtenir, lors d'une réunion des ministres des Finances de la zone euro, le déblocage de 130 milliards d'euros de l'UE et du FMI, qui permettront à la Grèce d'éviter de se retrouver en faillite en mars. La chancelière allemande Angela Merkel, Mario Monti et le Premier ministre grec, Lucas Papadémos, qui ont tenu, avant-hier, une conférence téléphonique, ont bon espoir d'obtenir le déblocage de cette aide, a dit la présidence du Conseil italienne. Lucas Papadémos s'est en outre entretenu, avant-hier, avec son homologue néerlandais, Mark Rutte, et la télévision nationale grecque a indiqué qu'il poursuivrait ses consultations avec ses partenaires de la zone euro "afin de créer un climat favorable à la réunion de demain et dissiper tout malentendu qui pourrait faire capoter un accord". Bémol de Juncker Jean-Claude Juncker, président de l'Eurogroupe, semblait lui moins optimiste: "Nous sommes loin de l'objectif de réduire le ratio dette sur PIB de la Grèce à 120% d'ici 2020", a-t-il dit dans l'après-midi en espérant que les partenaires de la zone euro parviendraient à se rapprocher de cet objectif d'ici ce soir. Les négociations avec les créanciers de la Grèce continuent cependant de tendre les relations entre la Grèce et les pays du nord de l'UE. "Les pays qui ont conservé leur triple A craignent tout particulièrement que la Grèce ne s'en sorte pas", a déclaré la ministre autrichienne des Finances, Maria Fekter, citée par le magazine allemand Der Spiegel. "Le risque d'une faillite de la Grèce n'est toujours pas écarté", ajoute-t-elle. Certains se demandent d'autre part si la Grèce a pris des mesures suffisantes pour réduire sa dette. La commission européenne, la Banque centrale européenne (BCE) et le FMI prévoient que la dette grecque, actuellement de l'ordre de 160% du PIB, représentera encore 129% du PIB en 2020, soit au-delà de l'objectif de 120% qui a été fixé en octobre dernier. Des responsables ont laissé entendre qu'un objectif de 125% serait acceptable pour la majeure partie des Etats de la zone euro mais que de nouvelles mesures seraient dès lors nécessaires. D'autres scénarios La BCE envisage ainsi de permettre aux obligations grecques détenues par les banques centrales de la zone euro de subir des décotes similaires à celles consenties par les investisseurs privés, dit-on auprès de ces banques centrales. Les banques centrales de la zone euro détiennent quelque 20 milliards d'euros de titres grecs dans leurs portefeuilles d'investissement, distincts des 40 milliards d'euros de dette acquis par la BCE dans le cadre de son programme de rachat de titres lancé en mai 2010. Les chances de voir une telle décote appliquée sont de 50%, a dit l'une de ces sources. Parmi les autres idées avancées pour aider Athènes à honorer ses objectifs à long terme en matière de désendettement figure la baisse par la zone euro du taux d'intérêt appliqué à ses prêts bilatéraux à la Grèce. Athènes doit obtenir le déblocage de l'aide de l'UE et du FMI à temps pour pouvoir rembourser 14,5 milliards d'euros d'emprunts d'Etat arrivant à échéance le 20 mars. "Le scénario que nous nous efforçons de réaliser est que la Grèce se conforme à toutes les mesures nécessaires et à toutes les demandes de la communauté internationale, afin de parvenir à un accord sur l'ensemble du plan d'aide", a déclaré le ministre néerlandais des Finances, Jan Kees de Jager. "Bien sûr, si cela ne marchait pas, nous devrions envisager d'autres scénarios", a-t-il ajouté. Pour le Premier ministre français, François Fillon, "il faut absolument tout faire pour qu'il n'y ait pas de défaut de la Grèce, ça serait dramatique pour les Grecs eux-mêmes et dramatique pour les Européens". "Les Grecs ont promis de faire des efforts très importants qui d'ailleurs ne sont pas beaucoup plus importants que ceux que font les Portugais, les Espagnols ou les Italiens qui eux ne brûlent pas leur capitale", a-t-il dit sur RTL, en faisant allusion aux violences qui ont secoué Athènes lors du vote du plan d'austérité au parlement, dimanche dernier. Le plan de sauvetage ne réduira pas la dette autant que prévu Le plan de sauvetage pour la Grèce ne permettra pas de ramener la dette publique du pays à 120% du PIB d'ici 2020, laissant un trou à combler, ont indiqué cette semaine des sources gouvernementales, s'appuyant sur le rapport de la troïka présenté la veille à l'Eurogroupe. "Le niveau de l'endettement a été calculé à 129%. Il faut donc réfléchir aux moyens de compenser", a indiqué une source gouvernementale européenne. Le plan, qui comprend un programme d'austérité, l'effacement partiel de la dette détenue par les créanciers privés et un programme d'aide sous forme de prêts et de garanties à hauteur de 130 milliards d'euros, visait initialement à ramener la dette publique grecque à 120% du PIB d'ici 2020 contre 160% actuellement. Ce niveau est un des objectifs exigés par le Fonds monétaire international et certains pays de la zone euro. Mais cet objectif ne sera pas atteint en l'état, selon le rapport de la troïka (les principaux bailleurs de fond de la Grèce) qui a présenté mercredi son rapport aux ministres des Finances de la zone euro. Plusieurs sources avaient indiqué que le niveau d'endettement grec serait bien au-delà de 125%, après l'application du plan de sauvetage. Reste à savoir comment résoudre le problème. Il n'y a pas de consensus sur le fait de revenir sur le programme d'effacement partiel de la dette détenue par les banques (le PSI), selon une source, qui cite d'autres pistes, comme une décote sur les créances grecques des banques nationales. Les discussions sur ce sujet sont le principal point de difficulté d'ici demain et la réunion des ministres des Finances de la zone euro, selon elle. Une rallonge des Etats de la zone euro est également envisagée. Quelque 5,5 milliards d'euros de besoins supplémentaires ont été identifiés et s'ajouteraient aux 130 milliards (prévus dans le deuxième programme d'aide à la Grèce), a indiqué cette source, précisant qu'il faudrait encore environ 10 milliards supplémentaires pour arriver à un taux d'endettement de 124%. Ces sujets seront au cœur des discussions des hauts fonctionnaires de la zone euro, qui se réuniront aujourd'hui pour préparer la réunion de l'Eurogroupe de demain, selon une source européenne.