Plusieurs ministres européens des Affaires étrangères, notamment français et britannique, ont dénoncé, hier, le référendum organisé en Syrie sur une nouvelle Constitution, estimant qu'il n'avait aucune crédibilité du fait de la poursuite en parallèle des violences. Quand on voit le président de la Chambre de l'assemblée nationale syrienne sourire en votant sur ce référendum, cela montre qu'il s'agit d'une sinistre mascarade, a estimé le chef de la diplomatie française Alain Juppé, en arrivant à une réunion avec ses homologues de l'UE à Bruxelles. C'est indigne parce qu'en même temps des bombes sont en train de tomber sur Homs et sur d'autres villes, a-t-il jugé. Le ministre britannique des Affaires étrangères, William Hague, s'est montré aussi très critique. Le vote d'hier n'a trompé personne, a-t-il estimé. Ouvrir des bureaux de vote tout en continuant à ouvrir le feu sur les civils, ce n'est pas crédible aux yeux du monde, a ajouté le ministre. Le ministre luxembourgeois Jean Asselborne a parlé quant à lui de farce. La télévision syrienne parle de situation parfaite de la démocratie et de l'autre côté des enfants sont emmenés dans les hôpitaux, des femmes sont violées dans les hôpitaux et des milliers de gens sont tués, a-t-il condamné. Les ministres ont salué le nouveau train de sanctions européennes qui doit être formellement approuvé lundi à Bruxelles en visant notamment la banque centrale du pays et le transport aérien de fret. Nous allons maintenir la pression avec un nouveau train de sanctions très fort, a dit M. Juppé. Nous sommes par ailleurs en train de déployer tous les efforts possibles pour permettre l'évacuation de journalistes qui sont piégés a Homs, a-t-il ajouté. A ce sujet, à Paris, le président français Nicolas Sarkozy a affirmé lundi en parallèle que l'amorce d'une solution était en train de s'esquisser pour évacuer les journalistes occidentaux bloqués à Homs. La journaliste française Edith Bouvier et le photographe indépendant britannique Paul Conroy, blessés mercredi dans un bombardement à Homs, sont toujours bloqués dans cette ville pilonnée par le régime du président Bachar al-Assad et ont appelé dans des vidéos diffusées la semaine dernière à leur évacuation au plus vite pour recevoir des soins. Les ministres européens ont appelé à maintenir la pression sur le régime pour trouver une solution à l'urgence humanitaire, tout en excluant une opération militaire. L'option militaire n'en est pas une, cela ne ferait qu'aggraver la situation, a jugé M. Asselborne. L'option c'est la voie diplomatique et le soutien à Kofi Annan, l'ancien secrétaire général de l'ONU désigné comme émissaire spécial des Nations unies et de la Ligue arabe pour la crise en Syrie, a-t-il martelé. Le chef de la diplomatie suédoise, Carl Bildt, a exhorté de son côté à éviter une guerre civile totale qui aurait des conséquences dévastatrices pour la région. Pékin ne peut accepter les critiques de Clinton sur la Syrie La Chine a indiqué, hier, ne pas pouvoir accepter les propos de la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton qui a appelé la communauté internationale à pousser la Chine et la Russie à changer de position sur la Syrie, où ces deux pays se mettent en travers des aspirations du peuple. Nous ne pouvons pas accepter cela, le monde extérieur ne devrait pas imposer son supposé plan de solution de la crise au peuple syrien, a déclaré le porte-parole du ministère des Affaire étrangères, Hong Lei, lors d'un point de presse régulier. Hillary Clinton a appelé, vendredi, à Tunis la communauté internationale à pousser la Chine et la Russie, qui ont bloqué début février une résolution du Conseil de sécurité de l'ONU condamnant la répression en Syrie, à changer de position. Moscou et Pékin doivent comprendre qu'ils ne se mettent pas seulement en travers des aspirations du peuple syrien, mais également du Printemps arabe, a dit Mme Clinton devant la presse à l'issue de la Conférence internationale sur la Syrie, qui s'est déroulée dans la capitale tunisienne. Il est plutôt désolant de voir deux membres du Conseil de sécurité user de leur veto quand des gens sont assassinés, a-t-elle ajouté, en référence à la Chine et la Russie, soutiens traditionnels de Damas. Nous devons faire changer les gouvernements chinois et russe de position, a-t-elle dit. Plus de 60 pays se sont réunis vendredi à Tunis pour définir un plan d'aide humanitaire international au peuple syrien et accentuer la pression sur Damas, lors de la conférence internationale boycottée par Moscou et Pékin. Malgré les pressions internationales, plus de 7.600 personnes ont été tuées depuis mars 2011 en Syrie où le régime tente d'écraser la révolte populaire. Nouvel échec des négociations avec le CICR Les négociations du CICR avec les autorités et les opposants syriens se sont achevées une nouvelle fois, avant-hier, sans accord pour évacuer les blessés. Parmi eux figurent deux journalistes occidentaux, bloqués à Homs toujours pilonnée par l'armée syrienne. Avant-hier, au moins 57 personnes ont été tuées dans des violences, en majorité des civils et principalement à Homs. En onze mois de révolte populaire, la répression du régime de Bachar al-Assad a fait plus de 7 600 morts, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH). "Pluralisme politique" Les quelque 14 millions de Syriens doivent se prononcer sur le texte qui instaure le "pluralisme politique" et supprime la prééminence au parti Baas au pouvoir depuis un demi-siècle. Il maintient toutefois de larges prérogatives au chef de l'Etat, comme celle de choisir le premier ministre, indépendamment de la majorité parlementaire. L'opposition et les militants pro-démocratie, qui exigent le départ du président Bachar al-Assad, ont appelé à boycotter ce scrutin, qualifié de "plaisanterie" par Washington. "Il y a une grande affluence dans les bureaux de vote, à l'exception de certaines régions", a déclaré le ministre syrien de l'Intérieur, admettant ainsi qu'il était impossible de voter dans les régions rebelles. Combats à Homs Au moment où s'ouvraient les bureaux de vote, plusieurs obus tombaient sur Baba Amr à Homs, la ville rebelle dévastée par plus de trois semaines de pilonnage, au lendemain d'une journée de violences ayant fait près de 100 morts en grande majorité des civils, selon l'OSDH. "Il y a des explosions partout, des snipers qui tirent sur tout ce qui bouge", a indiqué un militant. "Les maisons sont détruites (...) Il n'y a pas d'électricité, pas d'eau, pas de communications, pas d'air frais". Amorce d'une solution pour évacuer les journalistes blessés Le président français Nicolas Sarkozy a affirmé, hier, que l'amorce d'une solution était en train de s'esquisser pour évacuer les journalistes occidentaux bloqués à Homs, en Syrie. Ce week-end, on n'avait aucune solution. La situation à Homs est extrêmement complexe, cette nuit nous avons l'amorce d'une solution, a-t-il déclaré sur la radio RTL. Mais tant qu'ils ne seront pas à l'abri, je ne peux pas vous garantir cela, c'est extrêmement tendu, a-t-il ajouté. La journaliste française Edith Bouvier et le photographe indépendant britannique Paul Conroy, blessés mercredi dans un bombardement à Homs, sont toujours bloqués dans cette ville pilonnée par le régime du président Bachar al-Assad et ont appelé dans des vidéos diffusées la semaine dernière à leur évacuation au plus vite pour recevoir des soins. J'espère qu'on s'approche d'une solution, les choses sont en train, me semble-t-il, de se débloquer, a poursuivi le chef de l'Etat français. Je ne peux pas en dire beaucoup plus, a-t-il ajouté, soulignant ne pas avoir une grande confiance dans le régime syrien. Selon M. Sarkozy, il faut que ces journalistes soient soignés, il faut qu'ils sortent de Homs car il s'agit d'un risque humanitaire de premier plan. Le président a réaffirmé par ailleurs que la mort dans ce même bombardement de l'Américaine Marie Colvin, grand reporter du Sunday Times, et du Français Rémi Ochlik, photographe à l'agence IP3 Press, était un assassinat. Quand l'armée syrienne tire à plusieurs reprises, à l'obus, sur un bâtiment dont ils savent pertinemment que c'est un centre de presse, ce n'est pas un dommage de guerre, c'est un assassinat, et ceux qui assassinent auront à rendre des comptes, a-t-il dit. La Pologne négocie l'évacuation de la dépouille de Marie Colvin La Pologne qui représente les intérêts des Etats-Unis en Syrie négocie l'évacuation hors de Syrie de la dépouille de la journaliste américaine Marie Colvin, a indiqué, hier, le ministère polonais des Affaires étrangères. L'ambassade de la République de Pologne en Syrie tente d'évacuer la dépouille de la célèbre journaliste américaine Marie Colvin, a déclaré Marcin Bosacki, porte-parole du ministère Selon lui, l'ambassade polonaise participe également aux tentatives d'évacuation des journalistes occidentaux et est en contact permanent avec les diplomates français, britanniques et américains d'une part et les autorités syriennes et le Croissant rouge syrien d'autre part. Nous espérons que ces efforts apporteront des résultats, a encore déclaré M. Bosacki. Marie Colvin, grand reporter du Sunday Times, et le Français Rémi Ochlik, photographe indépendant avaient été tués mercredi matin dans le pilonnage d'une maison transformée en centre de presse dans le quartier de Baba Amr à Homs. Deux autres journalistes étrangers ont été blessés. Selon un diplomate occidental en poste à Damas, les négociations et les préparatifs étaient en cours, hier matin, pour tenter d'évacuer les journalistes étrangers bloqués dans le quartier rebelle de Baba Amr, à Homs, pilonné et encerclé par les forces régulières syriennes.