Les prix du pétrole s'affichaient en baisse, hier, dans un marché rassuré par l'engagement répété de l'Arabie saoudite à stabiliser les cours "à des niveaux raisonnables", ont indiqué les courtiers. Le baril de "light sweet crude" (WTI) pour livraison en avril perdait 53 cents à 107,56 USD dans les échanges électroniques du matin. Le Brent de la mer du Nord pour livraison en mai lâchait 34 cents à 125,37 USD. Les prix se sont repliés "après des informations selon lesquelles l'Arabie saoudite avait augmenté ses exportations en janvier", ont indiqué les analystes de Phillip Futures dans une note. Le gouvernement saoudien a indiqué la veille qu'il s'engageait à "assurer une offre adéquate de pétrole, stabiliser le marché du pétrole et ramener les prix du pétrole à des niveaux raisonnables pour les producteurs, les consommateurs et le secteur du pétrole", rapporte le quotidien anglophone Arab News. L'Arabie saoudite, premier exportateur mondial de brut, a indiqué à plusieurs reprises au cours des dernières semaines qu'elle se tenait prête à compenser tout déficit d'approvisionnement sur le marché pétrolier en accroissant sa propre production d'or noir. Le ministre saoudien du Pétrole Ali al-Nouaïmi a ainsi déclaré la semaine dernière que "l'Arabie saoudite et d'autres restent disposés à compenser tout déficit perçu ou réel de l'offre en pétrole brut". Le ministre jugeait alors que le marché pétrolier était "actuellement globalement équilibré" et avait une nouvelle fois rejeté la faute de l'envolée des prix du pétrole (qui ont atteint début mars un sommet depuis deux ans et demi à Londres) sur les spéculateurs. Selon l'AIEA, les exportations de pétrole iranien pourraient être réduites d'au moins un tiers à partir de la mi-2012, avec une chute comprise entre 0,8 et 1 million de barils par jour, du fait des sanctions internationales. Dans la foulée des multiples mesures décrétées par les Etats-Unis, l'Union européenne a décidé d'imposer un embargo pétrolier graduel qui devrait jouer à plein à partir de juillet. Ces sanctions internationales visent à assécher le financement du programme nucléaire iranien, qui cache selon les Etats-Unis et leurs alliés un volet militaire. Le brut hésite en Europe La veille les prix du pétrole divergeaient en fin d'échanges européens, reculant à Londres et montant prudemment à New York, tiraillés entre les inquiétudes sur les perspectives économiques mondiales, et les craintes de perturbations de l'offre de brut sur fond de crise iranienne. Peu avant la clôture, le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en mai, dont c'est le second jour comme contrat de référence, s'échangeait à 125,45 dollars, en repli de 36 cents par rapport à la clôture de vendredi. "A l'orée d'une semaine sans indicateur majeur, les opérateurs reconsidèrent les perspectives de l'économie mondiale, et la hausse enregistrée sur tous les marchés depuis début 2012 pourrait bien être arrivée à bout de souffle", observait Filip Petersson, analyste de la banque suédoise SEB. Après la Grèce, "d'autres pays de la zone euro suscitent l'inquiétude, l'économie chinoise (deuxième pays consommateur de brut, ndlr) montre des signes de ralentissement, et les opérateurs s'interrogent sur la solidité de la croissance économique aux Etats-Unis", expliquait-il. A contre-courant d'une récente salve de statistiques encourageantes sur l'économie du principal consommateur mondial de brut, des indicateurs publiés vendredi ont montré une baisse en mars du moral des ménages américains et une stagnation de la production industrielle du pays en février. "Le niveau élevé des cours du pétrole est devenue la menace la plus critique pour la reprise économique mondiale", estimaient de leur côté les analystes du courtier PVM. Cependant, après avoir évolué en recul jusqu'en milieu d'échanges européens, le prix du WTI est passé dans le vert après l'ouverture du marché new-yorkais, tandis que le Brent londonien limitait ses pertes, soutenus par les craintes toujours vives d'une escalade des tensions géopolitiques au Moyen-Orient. "Le marché reste très nerveux et s'inquiète d'éventuelles perturbations de la production de pétrole", même si l'Arabie saoudite, premier exportateur mondial d'or noir, "est certainement prête à grossir son offre pour compenser le manque de brut iranien", observait Andrey Kryuchenkov, analyste de VTB Capital. Selon l'Agence internationale de l'énergie (AIE), les exportations de pétrole iranien pourraient être réduites d'au moins un tiers à partir de la mi-2012, du fait des sanctions internationales contre Téhéran, soupçonné par les Occidentaux de développer un programme nucléaire à visée militaire. Un influent député iranien a réaffirmé dimanche que Téhéran ne cèderait pas d'un pouce sur son programme nucléaire qu'il affirme être à usage civil. En raison des tensions sur l'offre mondiale de brut, les analystes de Bank of America-Merrill Lynch ont indiqué la veille avoir relevé leurs prévisions de prix pour le Brent à 118 dollars le baril (contre 110 dollars précédemment) sur l'ensemble de l'année 2012. Par ailleurs, ils tablent désormais sur un prix moyen du WTI à 106 dollars en 2012 (contre 103 dollars précédemment). Selon Filip Petersson, à moyen terme, le prix du Brent ne devrait pas redescendre durablement sous 125 dollars, "à moins que le niveau de la demande mondiale ne recule de façon très importante". Le pétrole finit en hausse à New York Les cours du pétrole ont fini en hausse à New York, dans un marché porté par un regain d'optimisme au sujet de l'économie américaine, un dollar fort et des tensions toujours vives au Moyen-Orient. Le baril de light sweet crude (WTI) pour livraison en avril a gagné 1,03 dollar par rapport à la clôture de vendredi, à 108,09 dollars, sur le New York Mercantile Exchange (Nymex). Le marché a une vision de plus en plus optimiste vis-à-vis de l'économie américaine particulièrement, et des attentes de plus en plus nombreuses quant à une accélération de la croissance aux Etats-Unis, a relevé Bart Melek, de TD Securities. Les investisseurs étaient notamment encouragés par l'amélioration du marché de l'emploi aux Etats-Unis grâce à de meilleurs chiffres du chômage en janvier et en février, un signe pour beaucoup d'observateurs que l'économie américaine est en train de se renforcer. En outre, les tensions géopolitiques reviennent au premier plan avec l'Arabie Saoudite qui refuse de s'aligner sur les prix proposés par l'Iran pour vendre son pétrole à l'Inde, a noté Matt Smith, de Summit Energy (groupe Schneider Electric). Le régime iranien, accusé par les Occidentaux de vouloir se doter de l'arme atomique et soumis à des sanctions, est visé par un embargo graduel sur le pétrole décidé par l'Europe en février et cherche donc des nouveaux débouchés. Téhéran cherche donc à pallier la perte de ces contrats en se tournant vers l'Inde qui achète déjà annuellement pour quelque 11 milliards de dollars de pétrole à l'Iran, son deuxième fournisseur après l'Arabie saoudite. Ce développement intervient dans la foulée de la visite en Iran d'une délégation officielle indienne la semaine dernière afin d'examiner les possibilités d'accroître les exportations indiennes afin de financer le paiement de l'énorme facture pétrolière de l'Inde envers Téhéran. Par ailleurs, un dollar plus faible face à l'euro la veille favorise les prix des matières premières, a souligné Bart Melek, la baisse du billet vert favorisant les achats de brut libellés en dollar pour les acheteurs munis d'autres devises.