Les marchés européens ont plongé, avant-hier, réagissant à la hausse inattendue du chômage aux Etats-Unis et à une accumulation de mauvaises statistiques en Europe alors que les interrogations sur l'avenir de la zone euro restent toujours aussi vives. A cela s'ajoutent des inquiétudes sur les économies émergentes, Chine en tête, qui commencent à souffrir de la récession en Europe. "Le marché souffre du ralentissement des moteurs de la croissance mondiale, Etats-Unis et Chine, ainsi que du fait que l'Europe n'arrive pas à prendre de décisions capables de redonner de la confiance", résume Renaud Murail, gérant chez Barclays Bourse. L'Eurostoxx a enregistré une baisse de 2,37% La Bourse de Londres a terminé en baisse, l'indice FTSE-100 des principales valeurs perdant 60,67 points, soit 1,14%. Il a perdu 1,71% sur la semaine. Le secteur des ressources naturelles était dans l'ensemble en recul en raison des inquiétudes sur la croissance aux Etats-Unis comme en Chine, à l'image de Vedanta (-4,90% à 883,5 pence), Xstrata (-3,08% à 894,1 pence). Le groupe de luxe Burberry a perdu 4,32% à 1.308 pence en raison des signes de ralentissement de la croissance en Chine, un débouché très important pour la marque. Le groupe minier Randgold a toutefois bondi de 6,93% à 5 555 pence, grâce à la montée des cours de l'or, signant la plus forte progression. Le géant pétrolier BP a gagné 1,80% à 402 pence. Il s'est dit prêt, avant-hier, à un virage majeur en envisageant la vente de ses parts dans la coentreprise russo-britannique TNK-BP, ce qui mettrait fin à une relation à la fois lucrative et tourmentée de près de dix ans. La Bourse de Paris est tombée à son plus bas niveau depuis six mois, clôturant sur une forte baisse de 2,21%. L'indice CAC 40 a lâché 66,54 points à 2 950,47 points, dans un volume d'échanges de 4,629 milliards d'euros, relativement nourri par rapport à ces derniers jours. Parmi les valeurs, l'ensemble des secteurs ont été touchés par le recul du marché parisien mais les titres cycliques, dépendants de la conjoncture, ont particulièrement souffert. ArcelorMittal a perdu 2,73% à 10,87 euros, Bouygues 2,18% à 19,09 euros, Lafarge 1,82% à 29,20 euros et Saint-Gobain 2,71% à 53,51 euros. La Bourse de Francfort a terminé la semaine sur une lourde chute. Le Dax des trente valeurs vedettes a durement accusé le coup et cédé 3,42% à 6 050,29 points. Sur l'ensemble de la semaine, il s'est enfoncé de 4,57%. Deutsche Bank a perdu 6,65% à 27,15 euros, largement toutefois à cause du versement de son dividende, au lendemain de son assemblée générale d'actionnaires. La banque a aussi précisé les responsabilités des membres de son directoire, après le changement à sa tête acté, mais la répartition n'apporte aucune véritable surprise. Les valeurs particulièrement sensibles à la conjoncture chinoise ont chuté après une statistique décevante sur l'activité manufacturière dans l'Empire du Milieu. C'est le cas d'Infineon (-5,68% à 6,03 euros), Adidas (-4,97% à 57,20 euros) ou encore Volkswagen (-4,14% à 123,75 euros). La Bourse de Madrid a terminé en baisse de 0,41%. L'Ibex-35 a terminé à 6065 points, dans ses plus bas niveaux depuis avril 2003. Bankia, dont le très coûteux plan de sauvetage public a replongé l'Espagne dans la tourmente financière, repartait à la baisse, de 2,21% à 1,02 euro, contre 3,75 euros lors de son introduction en bourse en juillet 2011. Les grandes banques se reprenaient un peu: Santander, numéro un en zone euro par la capitalisation, gagnait 0,58% à 4,32 euros et BBVA, deuxième banque espagnole, progressait de 1,15% à 4,655 euros. La troisième banque par capitalisation, CaixaBank, augmentait de 1,54% à 2,049 euros. L'indice vedette de la Bourse de Milan, le FTSE Mib, a clôturé en baisse de 1,04% à 12'740 points, un niveau proche de son minimum historique atteint le 9 mars 2009 (12 621 points). Parmi les plus fortes baisses, le groupe de luxe Salvatore Ferragamo a lâché 5,86% à 15,58 euros, Fiat Industrial 4,12% à 7,795 euros, le numéro un mondial des lunettes haut de gamme Luxottica 4,05% à 25,09 euros et le fabricant de pneus Pirelli 3,87% à 7,705 euros. L'indice AEX des principales valeurs de la Bourse d'Amsterdam a clôturé en baisse de 2,18% à 283,77 points, la plupart des titres terminant la séance dans le rouge. La baisse la plus importante a été enregistrée par le fabricant de systèmes de navigation par GPS TomTom, qui a chuté de 6,82% à 3,02 euros, suivi par l'assureur Aegon, qui a cédé 6,22% à 3,19 euros. L'indice SMI des 20 valeurs vedettes de la Bourse suisse a clôturé la semaine sur une baisse marquée de 1,24% à 5 777,47 points, la quasi-totalité des valeurs ayant terminé en repli. Les spécialistes du luxe Richemont et Swatch ont subi les plus lourdes pertes, finissant la séance en baisse de respectivement 6,05% à 52 francs et de 4,71% à 355,90 francs. Le réassureur Swiss Re, qui avait progressé la veille, a également terminé en baisse de 3,48% à 54,05 francs. La Bourse de Bruxelles a fini en forte baisse, lâchant 1,89% à 2 054,02 points. Le groupe de métallurgie Bekaert a enregistré la plus forte baisse de l'indice Bel-20 (-4,43% à 20,18 euros), suivi par le chimiste Solvay (-3,50% à 81,77 euros) et l'assureur Ageas (ex-Fortis) qui a cédé 3,44% à 1,23 euro. En revanche, dans le secteur financier également, KBC a tiré son épingle du jeu, progressant de 1,69% à 12,60 euros. L'indice PSI-20 de la Bourse de Lisbonne a reculé de 1,34% à 4 453,01 points, tombant à son plus bas niveau depuis mai 1996 en raison surtout de la chute du groupe pétrolier et gazier Galp Energia (-5,45%). Parmi les autres poids-lourds de la place portugaise, le groupe de distribution Jeronimo Martins a enregistré une baisse de 2,26% et l'électricien EDP de 1,19%. Portugal Telecom a en revanche progressé de 2,42%. Dans le secteur financier, la banque BES a dévissé de 3,53%. Wall Street s'effondre La Bourse de New York a lourdement chuté pour se retrouver aux niveaux de fin 2011, déprimée par les perspectives économiques sombres aux Etats-Unis où le taux de chômage a connu une hausse inattendue: le Dow Jones a abandonné 2,22% et le Nasdaq 2,82%. Selon les chiffres définitifs à la clôture, le Dow Jones Industrial Average a perdu 274,88 points à 12 118,57 points et le Nasdaq, à dominante technologique, 79,86 points à 2 747,48 points. L'indice élargi Standard & Poor's 500 a chuté de 2,46% (32,29 points) à 1 278,04 points. Il s'agit de loin de la pire séance de l'année. Wall Stret a effacé tous ses gains depuis le début de l'année: les cours n'avaient plus évolué à de tels niveaux depuis le 30 décembre. Les investisseurs essaient de voir si le risque de récession est en train de s'étendre avec les inquiétudes pour l'Europe, la Chine et de plus en plus les Etats-Unis, a expliqué Sam Stovall, stratège de Standard and Poor's. Je ne veux pas dire qu'on est au stade de la panique, mais les investisseurs vendent à tout va, a dit pour sa part Peter Cardillo, chef économiste de Rockwell Global Capital. Le taux de chômage est ainsi remonté en mai, pour s'établir à 8,2%, alors que les embauches progressaient à leur rythme le plus faible en douze mois, selon des chiffres officiels publiés à Washington. Le pays a créé 69 000 emplois de plus qu'il en détruisait en mai, indique le rapport sur l'emploi du département du Travail. L'estimation médiane des analystes donnait 150 000 créations d'emploi pour ce mois-là, et un taux de chômage stable, à 8,1%. Les entreprises n'embauchent pas en raison de la peur pour l'Europe mais aussi des élections (aux Etats-Unis): les entrepreneurs craignent que (Barack) Obama soit réélu, a avancé M. Cardillo, selon qui le président sortant a un programme qui n'est pas favorable à la croissance et à l'industrie. En outre, la bourse new-yorkaise a été pénalisée par la détérioration de l'activité manufacturière en Chine en décembre. Sous l'effet de la crise sur les marchés européen et américain, l'indice PMI des directeurs d'achat publié par la banque HSBC s'est élevé à 48,7. Un chiffre supérieur à 50 indique une expansion, un chiffre inférieur une contraction. Le marché obligataire a poursuivi sa nette hausse, illustrant les craintes des investisseurs. Le rendement du bon du Trésor à 10 ans a chuté à 1,467% contre 1,5810% la veille, et celui à 30 ans à 2,5400% contre 2,6720%. Le Nikkei marque sa 9e semaine de chute L'indice Nikkei de la Bourse de Tokyo a dévissé de 1,20% à la clôture, affichant sa neuvième semaine consécutive de recul, une dégringolade continue inédite en 20 ans à cause de la situation critique en Europe et de la hausse subséquente du yen face à l'euro. Les valeurs pâtissent aussi des hoquets de l'économie américaine qui affaiblissent le dollar. A la fermeture, l'indice Nikkei 225 des valeurs vedettes a abandonné 102,48 points pour tomber à 8 440,25 points. Il a ainsi cédé 1,6% durant la semaine et 10% sur l'ensemble du mois, chute d'une ampleur rare qui a totalement effacé la progression observée durant les mois de février et mars. Le Nikkei a en outre affiché 9 semaines de suite de repli, d'un vendredi sur l'autre, les remontées journalières intermédiaires ne comblant pas les baisses intervenant entre-temps. Durant cette période, il a abandonné 16%. L'indice élargi Topix de tous les titres du premier tableau a perdu de son côté de 1,47%, soit -10,56 points, pour finir à 708,93 points. Le volume des transactions a été assez faible, avec 1,72 milliard d'actions échangées sur le premier marché. Avant-hier, à la fermeture du marché tokyoïte (06H00 GMT), l'euro évoluait aux environs de 97 yens, proche de son plus bas cours depuis plus de 11 ans, après avoir nettement baissé durant des semaines à cause de la menace que représente la crise de la dette pour l'économie européenne. Il est même tombé à plusieurs reprises dans la nuit et la matinée nettement sous 97 yens, un niveau inimaginable il y a tout juste 4 ans, lorsqu'il cotait un niveau record de près de 170 yens. Le dollar est descendu pour sa part sous la barre des 79 yens, aux alentours de 78,50 yens, un niveau qui fait fuir les investisseurs, lesquels redoutent les conséquences de l'affaiblissement du billet vert sur les revenus et bénéfices des entreprises nippones à l'étranger. Dans ces circonstances, le ministre japonais des Finances a menacé d'une nouvelle intervention directe des autorités nippones sur le marché des changes pour corriger des mouvements selon lui irrationnels des monnaies, car ne reflétant pas la réalité économique. Quant aux donneurs d'ordres, ils se sont une fois de plus défaits de valeurs des groupes exportateurs déjà passablement sacrifiées depuis des mois. L'action du premier constructeur de voitures japonais, Toyota, a cédé 0,99% à 3 010 yens, les titres de ses concurrents Honda et Nissan perdant pour leur part respectivement 2,11% à 2 459 yens et 3,03% à 735 yens. L'action Mazda, la plus échangée de la journée, a quant à elle rétrocédé 4% à 96 yens, le groupe souffrant particulièrement en Occident où il va supprimer 250 emplois dans ses services commerciaux. Parmi les géants de l'électronique, le titre Sony a encore dégringolé, de 3,52% à 1 013 yens, renouvelant son plus bas niveau depuis plus de 30 ans, pris dans un cercle vicieux qui ressemble de plus en plus à un jeu de massacre visant à enfoncer le cours sous le seuil psychologique des 1 000 yens, selon des courtiers. Sony a perdu plus de 50% en un an. Idem pour l'action de son rival Panasonic qui a encore reculé de 2,31% à 508 yens, les deux étant très sensibles à la hausse du yen conjuguée à un risque de dégradation du marché des produits audiovisuels en Europe et aux Etats-Unis où la conjoncture n'est pas non plus mirobolante. Même motif, même punition pour le titre du fabricant de produits bureautiques et appareils photo Canon, délesté de 3,17% à 3 050 yens, ou encore pour le groupe de services et équipements informatiques NEC (-4,42% à 108 yens). Les actions des sociétés financières, comme d'habitude parmi les plus manipulées de la séance, ont également dégringolé: celle de Mizuho Financial Group a décliné de 1,74% à 113 yens, celle de Mitsubishi UFJ Financial Group de 0,88% à 337 yens et celle de Nomura Holdings de 2,70% à 252 yens. Ont aussi été sévèrement douchés les titres des fabricants d'engins de chantier et de machines industrielles, ceux des sociétés pétrolières ou encore ceux des transporteurs maritimes et, dans une moindre mesure, des maisons de commerce, tous pénalisés par les incertitudes économiques internationales.