La crise continue de menacer la survie de la zone euro malgré les avancées réalisées lors du dernier sommet européen, estime le Fonds monétaire international dans un rapport publié mercredi, qui plaide pour que l'union bancaire se concrétise rapidement et appelle la BCE à agir. "Malgré des décisions politiques majeures, les marchés financiers restent soumis à de vives tensions dans certaines parties de la région, ce qui remet en question la pérennité de l'union monétaire elle-même", met en garde le FMI dans son rapport annuel sur la zone euro. Ce diagnostic fait écho aux propos de la chancelière allemande, Angela Merkel, qui s'est dite "optimiste" mais pas "assurée" de la réussite du projet européen car "certains pays en Europe ont encore beaucoup de travail" pour regagner la confiance des marchés. Le FMI relève que "les liens négatifs entre les finances des Etats, les banques et l'économie réelle sont plus forts que jamais". Pour y remédier, "la première priorité est de mettre en place une union bancaire à l'échelle de la zone euro" avec une supervision commune qui pourrait être confiée à la Banque centrale européenne (BCE), une garantie des dépôts et une autorité chargée de gérer les défaillances bancaires, selon l'institution de Washington. Les causes profondes ne sont pas traitées Le FMI estime que "les progrès qui ont été faits dans cette direction lors du sommet des 28 et 29 juin sont les bienvenus" mais qu'il faut accélérer le mouvement. En effet, "l'aggravation de la crise laisse penser que les causes profondes ne sont pas traitées", tranche sévèrement l'institution. Or "seule une action convaincante et concertée pour compléter l'Union économique et monétaire peut stopper le déclin de la confiance à l'égard de la région". A cet égard, le FMI estime que le mécanisme commun de garantie des dépôts et le fonds de gestion des défaillances des banques, deux des piliers de l'union bancaire, devront être financés non seulement par le secteur mais aussi avoir "recours à des ressources fournies par les gouvernements et la BCE". Deuxième chantier préconisé par le FMI: mettre en place des mesures de relance de la croissance. L'institution a publié le 15 juillet des prévisions de croissance pour la zone euro de -0,3% cette année et de 0,7% en 2013 (contre 0,9% prévus précédemment). Risque de déflation Le constat n'est guère brillant: la demande intérieure va rester faible, les ajustements budgétaires vont peser sur la croissance, les exportations ne vont pas beaucoup profiter de la baisse de l'euro et le chômage va rester élevé. En revanche, l'inflation devrait "décliner significativement et pourrait même devenir négative", souligne le FMI. Le risque de déflation, qui pourrait se concrétiser dès le début de 2014, est "relativement faible dans les économies en croissance rapide mais sérieux dans les pays de la périphérie" de la zone euro. La relance de la croissance passe par une meilleure compétitivité, car la zone euro perd du terrain par rapport à ses concurrents, souligne le rapport, qui appelle à des réformes structurelles. Revoir en profondeur le marché du travail, les systèmes de retraites, la fiscalité, pourrait entraîner une "hausse du PIB de 5% sur cinq ans", selon le FMI. Dans l'intervalle, la BCE peut et doit intervenir: "étant donné que l'inflation est faible et diminue, la BCE a la possibilité de baisser ses taux et de déployer d'autres mesures non conventionnelles qui allégeraient la pression de certains marchés", souligne le rapport. Concrètement, cela pourrait passer par une politique "d'assouplissement quantitatif" à travers un programme d'achat d'obligations d'Etats. Renforcer l'intégration budgétaire Le FMI préconise aussi une nouvelle opération de prêt à court terme de la BCE aux banques, sur le modèle de ce qu'elle a déjà fait à deux reprises en décembre et février. Elle leur avait alors prêté au total quelque 1 000 milliards d'euros sur trois ans à des conditions très avantageuses pour stimuler l'octroi de crédit, et donc l'économie. Par ailleurs, l'institution estime que la zone euro devrait renforcer son intégration budgétaire en "introduisant des formes limitées mais évolutives de mutualisation de la dette". Le FMI ne mentionne pas explicitement les euro-obligations, auxquelles l'Allemagne est très réticente, mais évoque notamment la possibilité de créer des "eurobills", c'est-à-dire de mettre en commun des titres de dette émis à court terme par les pays de la zone euro et d'instaurer un fonds d'amortissement de la dette.