La Cour constitutionnelle allemande a autorisé, hier, l'adoption par Berlin des derniers mécanismes de sauvetage de la zone euro. Elle a ainsi levé une incertitude majeure sur la gestion de la crise financière. L'euro est à un nouveau pic face au dollar. Avec cette décision très attendue, les huit juges suprêmes ont donné leur feu vert au Président Allemand Joachim Gauck, pour signer les textes de loi sur le futur fonds de secours MES et le Pacte de stabilité adoptés par le Parlement allemand fin juin mais contre lesquels plusieurs plaintes avaient été déposées. Les huit juges de Karlsruhe ont jugé que contrairement aux reproches contenus dans les six plaintes, émanant notamment des députés de la gauche radicale Die Linke, d'un élu conservateur et d'une association, la loi approuvant le MES était "en grande partie en conformité avec l'exigence constitutionnelle que la souveraineté budgétaire demeure entre les mains du Bundestag". Dans le même temps, les juges suprêmes allemands, qui siègent à Karlsruhe, ont fixé une limite à l'implication financière de l'Allemagne dans le financement du MES, stipulant qu'elle ne devait pas excéder sa part au capital du fonds, soit 190 milliards d'euros (230 milliards de francs au cours actuel). Approbation du Parlement Une augmentation de ce montant ne sera possible qu'avec l'approbation du Parlement allemand, ont précisé les juges, réclamant que Bundestag (chambre basse) et Bundesrat (chambre haute) soient pleinement informés de toutes les discussions. "La deuxième chambre de la Cour constitutionnelle fédérale a rejeté les injonctions stipulant qu'une ratification du MES (le futur fonds de secours permanent de la zone euro) ne pouvait être admise que si (certaines conditions) étaient garanties au regard de la loi internationale", a expliqué la Cour. Ce mécanisme était le plus controversé en Allemagne. Première réunion du conseil des gouverneurs du MES le 8 octobre La première réunion du conseil des gouverneurs du Mécanisme européen de stabilité (MES) aura lieu le 8 octobre à Luxembourg, a annoncé, hier, le chef de l'Eurogroupe Jean-Claude Juncker, après le feu vert donné par la cour constitutionnelle allemande à cet instrument. "J'ai décidé de convoquer la réunion inaugurale du conseil des gouverneurs du MES en marge de la réunion de l'Eurogroupe qui se tiendra le 8 octobre à Luxembourg", a affirmé M. Juncker dans un communiqué. Le conseil des gouverneurs du MES est composé des 17 ministres des Finances de la zone euro. "Je prends note de la décision de la Cour constitutionnelle allemande concernant la ratification du traité établissant le MES et du pacte budgétaire", a indiqué le président de l'Eurogroupe. "Ces deux traités représentent une avancée majeure vers plus d'intégration économique et budgétaire ainsi que vers une gouvernance renforcée de la zone euro. Ils font partie de notre stratégie pour tendre vers la soutenabilité budgétaire et la croissance au sein de la zone euro", a-t-il ajouté. L'UE doit évoluer vers une fédération d'Etats-nations L'Europe doit évoluer vers une fédération d'Etats-nations, comme rempart au nationalisme et au populisme, a affirmé, hier, le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso. Nous avons besoin d'avancer vers une fédération d'Etats-nations, a-t-il dit dans son discours sur l'état de l'Union devant le Parlement européen. C'est de cela que nous avons besoin, c'est notre horizon politique, a-t-il ajouté. Un tel objectif est nécessaire parce qu'en ces temps d'anxiété, ce serait une erreur que de laisser les nations en proie au nationalisme et au populisme, a expliqué M. Barroso. Il a souligné que la création d'une fédération d'Etats-nations allait à terme nécessiter un nouveau traité. M. Barroso, a plaidé pour que l'UE prenne, dans l'attente, des mesures concrètes avec une union politique à l'horizon, afin de parvenir à un partage de souveraineté d'une manière que chaque pays et chaque citoyen soit mieux à même de contrôler son destin. Selon lui, nous ne pouvons continuer à résoudre les problèmes européens, juste avec des solutions nationales. A propos de la crise de la dette, M. Barroso, a affirmé que l'Europe ne devait laisser aucun doute sur l'irréversibilité de l'euro, mais aussi que les pays les plus forts ne doivent laisser aucun doute sur leur volonté de faire face ensemble et de faire preuve de solidarité. Nous avons besoin d'une authentique union économique fondée sur une union politique, a-t-il martelé en réclamant plus d'unité, plus d'intégration, plus de démocratie. Il a aussi plaidé pour une européanisation des enjeux des prochaines élections européennes en juin 2014. Les partis européens pourraient y contribuer en désignant à l'avance leur candidat pour la présidence de la Commission européenne, a-t-il proposé. J'appelle les partis politiques à s'engager à le faire et à européaniser plus avant les élections européennes, a-t-il lancé. Selon lui, plus dangereux que le scepticisme des anti-européens est le silence des pro-européens en ces temps de crise de confiance de l'Union européenne du fait de la crise de l'euro. Le président du groupe libéral, pourtant fédéraliste, l'ancien Premier ministre belge Guy Verhofstadt, a estimé que l'Europe n'avait pas besoin d'une fédération d'Etats-nations mais d'une union fédérale des citoyens européens. La supervision bancaire est une priorité absolue Le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, a plaidé devant le Parlement européen pour la création d'une union bancaire et budgétaire en insistant sur le fait que la supervision bancaire est une priorité absolue. La supervision bancaire est un premier pas décisif vers l'union bancaire à laquelle se sont engagés les dirigeants européens lors du sommet des 28 et 29 juin, a souligné M. Barroso, en prononçant son discours sur l'état de l'Union devant les députés européens à Strasbourg. La simple coordination n'est plus adéquate en matière de surveillance bancaire, a-t-il dit. La supervision commune des banques de la zone euro est une priorité absolue aujourd'hui, car c'est la condition pour mieux gérer les crises bancaires. M. Barroso, a par ailleurs rappelé dans son discours qu'au-delà de la supervision bancaire, la Commission présenterait à l'automne un projet pour approfondir l'union économique et monétaire. Dans cette optique, certains changements appellent un changement de traité, a-t-il dit. La Commission européenne plaide de longue date pour une mutualisation de la dette des Etats sous forme d'euro-obligations qui, dans leur forme la plus ambitieuse, nécessitent un changement de traité. La BCE a aussi un rôle de gestion de crise La Banque centrale européenne (BCE) n'a pas seulement un rôle de gardien de la stabilité monétaire, mais aussi un rôle de gestion de crise, a affirmé la veille l'un de ses responsables, Jörg Asmussen. Les banques centrales ont "un double rôle en tant que gardiens de la stabilité et gestionnaires de crise", a déclaré M. Asmussen, membre du directoire de la BCE, selon le texte de son discours à l'Université Goethe de Francfort. "En répondant aux soudaines tensions financières, les mesures exceptionnelles des banques centrales ont participé à calmer les tensions et à éviter des répercussions hautement néfastes sur l'économie réelle", a argumenté Jörg Asmussen. La semaine dernière, la BCE a lancé un nouveau programme de rachat de dette d'Etats, pour permettre de freiner l'envolée des taux d'emprunt des pays européens en difficulté, surtout l'Espagne et l'Italie. Ce nouveau programme a été décidé en désaccord avec la banque centrale allemande, Bundesbank, très orthodoxe en matière de politique monétaire. En mettant en place des mesures de crise exceptionnelles, les banques centrales doivent néanmoins faire attention au "risque de mettre à mal leur mandat premier", celui de la préservation de la stabilité des prix, a nuancé le responsable de la BCE. M. Asmussen a insisté sur la nécessité d'associer à l'action des banques centrales des "réponses structurelles" aux problèmes, en "renforçant les instruments politiques à disposition en dehors du champ d'action de la banque centrale". Le programme OMT, nom du nouveau programme de rachats d'obligations de la BCE, sans limite mais sous conditions, "ne se substitue pas aux efforts continus de la part des gouvernements" en termes de réformes structurelles et fiscales, a insisté Jörg Asmussen. Ce nouveau programme est un exemple clair de la manière dont "la BCE remplit en même temps son rôle de gardien de la stabilité et de gestionnaire de crise", a-t-il assuré, insistant sur l'indépendance de l'institution.