Le ministre turc de l'Energie Taner Yildiz a annoncé que son pays suspendait ses projets avec la compagnie pétrolière italienne ENI en raison de sa participation à des campagnes d'exploration pétrolière et gazière avec Chypre contestées par Ankara. Nous avons pris la décision de ne pas travailler en Turquie avec la compagnie ENI, y compris en suspendant ses projets en Turquie, a déclaré M. Yildiz, cité par l'agence de presse Anatolie. Le ministre, qui répondait aux questions de journalistes en marge d'une conférence à Ankara, a indiqué que la décision avait été prise en raison de la persistance d'ENI à mener des opérations d'exploration avec Chypre dans les eaux internationales méditerranéennes en dépit d'avertissements répétés de la Turquie, a rapporté Anatolie. En Turquie, ENI distribue du gaz naturel russe transporté par le gazoduc Blue Stream. Ses ventes ont atteint 3,95 milliards de mètres cubes en 2010 et quelque 7 milliards de mètres cubes en 2011, selon le site internet du groupe italien. Il vend également des huiles lubrifiantes et des produits chimiques de base sur le marché turc, où il a aussi des activités d'ingénierie et de construction. Le groupe est notamment impliqué avec le turc Calik Holding dans un projet de construction d'un oléoduc reliant le port turc sur la mer Noire de Samsun au complexe pétrolier de Ceyhan, sur la Méditerranée.Concernant ce projet, M. Yildiz a précisé que Calik Holding prendrait sa propre décision, mais que le gouvernement était désormais défavorable à la participation d'ENI, selon Anatolie. Le géant énergétique italien a annoncé fin janvier avoir signé avec le gouvernement de Chypre des accords de partage d'exploration et de production pour trois blocs situés au large des côtes chypriotes, dans une zone susceptible de receler de fortes réserves de gaz. ENI est l'opérateur et détient 80% du consortium en charge, les 20% restants étant détenus par le groupe coréen Kogas. Les contrats ont été alloués à l'issue d'un appel d'offres international qui s'est achevé en mai 2012. La Turquie s'est fermement opposée à ces explorations menées par le gouvernement chypriote, les qualifiant d'illégales et lançant ses propres forages au large de Chypre-Nord, le tiers nord de l'île qu'elle occupe. Ankara a en outre menacé d'exclure de ses futurs projets en matière d'énergie les compagnies pétrolières retenues par Chypre pour l'exploration du gaz.La compagnie américaine Noble Energy, titulaire de la licence sur un bloc, a annoncé en 2011 avoir découvert un gisement de gaz pouvant atteindre 226,5 milliards de mètres cubes, pour une valeur estimée de 100 milliards d'euros. Le groupe pétrolier français Total a lui aussi passé un accord avec Nicosie, début février, pour l'exploration de deux blocs.Chypre est divisée depuis 1974, après que la Turquie a envahi le nord de l'île à la suite d'un coup d'Etat fomenté par des nationalistes chypriotes-grecs qui visait à rattacher le pays à la Grèce.