La compagnie nationale des hydrocarbures Sonatrach a décidé de résilier le contrat du plus grand projet intégré de gaz, jamais octroyé en Algérie. Sonatrach a, dans ce sens, averti lundi l'autorité boursière espagnole (CNMV) qu'elle annulait l'accord signé en 2004 avec les groupes Repsol YPF et Gas Natural portant sur l'exploitation de gaz naturel du site de Gassi Touil. Réagissant à la décision de Sonatrach, Repsol YPF et Gas Natural ont souligné, dans un communiqué adressé à l'autorité boursière, qu'ils "regrettaient et rejetaient la décision de l'Algérie de s'approprier pour elle-même, illégitimement, le projet". Les groupes espagnols ont dit vouloir défendre leurs intérêts en soumettant la question à un arbitrage international, et avoir l'intention de demander des dommages et intérêts. Selon un représentant de Repsol, cité par la presse espagnole, "la résiliation du contrat, signé pour une période de trente ans et prévoyant la construction d'une usine de production de GNL, est illégale, c'est pourquoi les compagnies espagnoles ont l'intention de contester la décision d'Alger devant la cour internationale d'arbitrage". Alors que l'entente cordiale semblait revenue entre l'Algérie et l'Espagne après que le différend qui les opposait sur le dossier de Medgaz avait été résolu au cours de la visite du ministre de l'Energie et des Mines, Chakib Khelil, le 19 juillet dernier en Espagne, des tensions refont surface. Gassi Touil, mis en compétition à travers un avis d'appel d'offres international, est un projet de taille, nécessitant la mobilisation de près de 3,5 milliards de dollars d'investissement. Il est étalé sur trente ans, avec une période de développement de cinquante ans. Les termes du contrat prévoient de forer cinquante-deux puits de développement, d'en reprendre seize existants, de construire des installations de surface pour le traitement de vingt-deux millions de mètres cubes par jour de gaz brut, de mettre en place de nouvelles capacités de transport de 6,5 milliards de mètres cubes par an de gaz de vente et de construire, enfin, une nouvelle usine de liquéfaction d'une capacité nominale de quatre millions de tonnes par an. Les premières quantités de gaz issues de ce projet étaient prévues pour septembre 2009. Et c'est justement cette échéance qui est la source du litige entre Sonatrach et ses partenaires. Les deux compagnies espagnoles avaient, pour rappel, éprouvé des difficultés techniques avec le projet occasionnant un dépassement des délais de réalisation, qui a été retardé de 2009 à 2011. Suite à quoi, la partie algérienne avait demandé aux compagnies espagnoles d'honorer leurs engagements prévus dans le contrat. La situation engendre des préjudices pour l'Etat algérien, en termes de retards fiscaux, et pour Sonatrach, en termes de ne pas pouvoir répondre à des engagements avec des tiers relatifs au gaz liquéfié devant provenir de l'usine de GNL. "L'Algérie ne peut perdre des revenus fiscaux à cause du retard. Ensuite, Sonatrach a signé des contrats de livraison de gaz liquéfié avec des entreprises des Etats-Unis", avait affirmé le ministre de l'Energie, en expliquant la position de l'Algérie. Pour le ministre, Repsol et Gas Natural devraient payer tous les coûts liés au dépassement du projet. Tout semble faire croire que, aujourd'hui, les deux entreprises espagnoles ne semblent pas en mesure d'honorer leurs engagements, ce qui logiquement a conduit Sonatrach à résilier ce contrat. La réaction des partenaires de Sonatrach promet, à coup sûr, d'autres rebondissements dans les prochains jours.