Le gouvernement turc a lâché du lest, avant-hier, au deuxième jour des affrontements opposant à Istanbul la police aux manifestants. La place Taksim a été rouverte et les forces de l'ordre se sont aussi retirées du petit parc Gezi situé sur cette place. Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan est sorti de son silence. Il a promis de faire revenir l'ordre. Il a aussi annoncé le maintien du projet urbain à l'origine de la protestation. Sur un ton très ferme, le chef du gouvernement a promis de ne pas laisser le chaos régner sur la place Taksim, le coeur de la contestation. Comme un défi aux manifestants, M. Erdogan a confirmé le projet d'aménagement urbain à l'origine de leur protestation. "Nous allons reconstruire la caserne militaire" de l'époque ottomane prévue dans le projet. Celui-ci cristallise depuis des mois la colère des urbanistes, architectes, écologistes ou riverains. "Actions extrêmes" de la police Le Premier ministre a cependant concédé que la police avait agi dans certains cas de façon "extrême". "Il est vrai qu'il y a eu des erreurs, et des actions extrêmes dans la réponse de la police", a-t-il dit, ajoutant qu'une enquête a été ordonnée par le ministère de l'Intérieur. Saisi par les opposants, un tribunal administratif d'Istanbul a suspendu vendredi cette partie du projet. Il prévoit également le remplacement d'un petit parc et de ses 600 arbres par un centre culturel et/ou un centre commercial. Gaz lacrymogènes et jets de pierre Après quelques heures de répit, les affrontements qui ont embrasé le centre de la mégapole turque vendredi ont repris avant-hier en milieu de matinée, mais avec moins d'intensité que la veille. A plusieurs reprises, la police a fait usage de gaz lacrymogènes et de canons à eau autour de la place Taksim pour disperser des petits groupes qui ont riposté par des jets de pierre. D'autres échauffourées ont aussi été signalées un peu plus tôt dans un autre quartier de la ville, Besiktas. Plusieurs centaines de personnes rassemblées sur le versant anatolien de la ville pour rejoindre la place Taksim se sont retrouvées nez à nez avec la police. Elle les a dispersées en usant de gaz lacrymogènes. Deux morts à Istanbul, selon Amnesty International Des milliers de manifestants ont célébré leur victoire à Istanbul dans la nuit de samedi à dimanche après le retrait de la police de la place Taksim. Deux personnes auraient perdu la vie lors des heurts de ces derniers jours, a indiqué, hier, Amnesty International (AI). Plusieurs organisations des droits de l'Homme ont dénoncé les violences de la police. AI a affirmé qu'il y avait eu deux morts et plus d'un millier de blessés, des chiffres qui n'ont pas été confirmés de source officielle ni à Ankara ni à Istanbul. Deux pays occidentaux alliés de la Turquie, les Etats-Unis et le Royaume Uni, ont appelé le gouvernement turc à la retenue. Samedi soir, des centaines de personnes ont manifesté à New York pour exprimer leur soutien aux protestataires en Turquie.
939 personnes interpellées et 79 blessés lors des manifestations, selon l'Intérieur Près d'un millier de personnes ont été interpellées et 79 blessées en deux jours en Turquie, où un mouvement de protestation ayant débuté à Istanbul s'est diffusé à 48 villes du pays, a annoncé dimanche le ministre turc de l'Intérieur Muammer Güler lors d'une conférence de presse. "On a interpellé dans différentes provinces 939 personnes depuis le début des troubles liés au parc de Gezi. Une partie a été relâchée. Certains pourraient être déférés devant un tribunal. Au cours des émeutes, 26 policiers et 53 citoyens ont été blessés. 19 d'entre eux sont en réanimation à Istanbul, les autres reçoivent une aide médicale sur place", a déclaré le ministre.