Dans son exposé introductif à la conférence-débat, organisée mardi soir à Alger à la Bibliothèque nationale, sur le thème du " dialogue des civilisations et des cultures ", l'ancien ministre de l'Enseignement supérieur, le docteur Mustapha Chérif, a affirmé que malgré les efforts des intellectuels et des militants de la paix des pays du Sud comme ceux des pays du Nord, la logique du conflit dans les relations internationales est actuellement en phase de l'emporter sur celle du dialogue entre les civilisations et les cultures. Mustapha chérif a souligné qu'une civilisation ne peut en aucun cas exister sans qu'il y ait dialogue, et la promotion des idées sur le choc des civilisations fait que les voix qui prônent le dialogue sont marginalisées. Pour l'ancien ministre de l'Enseignement supérieur, l'Islam est utilisé comme épouvantail, et les grandes puissances dans ce monde refusent le dialogue d'une façon générale. A ce propos, le conférencier a estimé que, juste après la guerre froide, l'Occident a tout fait afin de présenter le monde musulman en général et arabe en particulier comme " un nouvel ennemi ". Pour le docteur Mustapha Chérif, les raisons de cette image qui colle à l'Islam ne viennent pas seulement de l'extérieur mais, elles sont également inhérentes au monde musulman, citant dans ce contexte le penseur algérien Malek Benabi, quand il avait relevé " l'aptitude des peuples à la colonisabilité ". Le dialogue ne peut être substitué par aucune alternative, estime-t-il avant d'appeler le monde musulman à œuvrer pour consolider le respect des autres nations. Dans le même ordre d'idées, l'intervenant a indiqué qu'il existe des velléités pour isoler le monde musulman, et ceci se justifie par le fait que cette civilisation est porteuse d'un autre regard qui empêche l'hégémonie d'une seule civilisation de s'installer. De même que l'autre a le droit de relever les contradictions du monde musulman, on a le droit de critiquer les dérapages de la modernité, a soutenu le docteur Mustapha Chérif. A cette conférence, il y a à noter la présence du docteur Saïd Ellawinidi, rédacteur en chef adjoint du quotidien égyptien El Ahram et spécialiste des relations internationales, qui a estimé, pour sa part, que le dialogue suppose l'existence de deux entités égales. Cependant, a-t-il dit, l'Occident ne voit le dialogue entre les civilisations qu'à partir du prisme de ses propres valeurs, estimant qu'il est erroné de chercher le dialogue quand la logique du conflit et de l'hégémonie l'emporte. Pour lui, les fondements du dialogue ont été tous torpillés à cause de cette tendance à la " diabolisation " de tout ce qui vient de la civilisation musulmane. Le rédacteur en chef adjoint du quotidien cairote a indiqué que le projet du Grand Moyen Orient n'est que le résultat d'une vision qui met le monde arabe parmi les nations à civiliser. Partant de ce constat, le docteur Ellawinidi, a insisté sur deux images contradictoires de la civilisation musulmane véhiculées par l'Occident. La première est enseignée dans les universités, mais, a-t-il dit, elle ne sort pas des arcanes de l'académisme, tandis que la deuxième est médiatique et fait de la civilisation musulmane "une machine à produire des terroristes". Il a également estimé que l'année du dialogue entre les civilisations et les cultures instaurée par l'Organisation des Nations unies est "un mort-né", à cause, selon lui, de l'idée des guerres préventives instaurée par le gendarme du monde après les événements de 11 septembre 2001. Pour finir, il faut souligner que l'intellectuel égyptien a, à son actif, plusieurs publications relatives au thème de cette conférence, où il déplore le fait que l'Occident ne fait pas d'effort pour comprendre la civilisation musulmane dont entre autres, "l'Islamophobie" et "la mort de l'Organisation des Nations unies".