La Banque centrale européenne (BCE) a maintenu le statu quo sur ses taux et ses autres mesures de soutien à l'économie de la zone euro, misant sur la poursuite de la reprise pour contrecarrer la faiblesse inquiétante de l'inflation. Pour son président, Mario Draghi, il n'y a pas de raison de craindre actuellement un épisode de déflation, synonyme de baisse des prix, des salaires et de frein à la croissance. "Il n'y a pas de déflation en zone euro", a-t-il fermement déclaré, lors de sa conférence de presse mensuelle de politique monétaire, pour justifier le maintien du principal taux d'intérêt directeur de la BCE, baromètre du crédit en zone euro, à 0,25%, son plus bas historique. Toutefois, la BCE a bien conscience que "le fait d'avoir une inflation basse pendant une période prolongée constitue un risque en lui-même" et nécessite un "contrôle étroit", a-t-il souligné, laissant entendre que toute dégradation significative serait suivie d'effet. "Une inflation faible prolongée est un risque pour la reprise, pour le niveau de la dette (publique) en termes réels. Oui, nous sommes en état d'alerte concernant ces risques et sommes prêts à agir", a-t-il réaffirmé. L'inflation est ressortie à 0,7% en janvier en zone euro. Les nouvelles prévisions de la BCE de croissance et d'inflation sont attendues le mois prochain, pour 2014 et 2015, mais aussi pour 2016, ce qui constituera une première, la BCE ne se risquant jusqu'ici pas à des prévisions deux ans à l'avance. Le moment sera alors peut-être plus propice pour prendre de nouvelles décisions, estime Jonathan Loynes, chef économiste Europe de Capital Economics. Pour Carsten Brzeski, d'ING, si la prévision d'inflation pour 2016 est inférieure au 1,3% prévu pour 2015, "la porte sera clairement ouverte pour une nouvelle action".
Les espoirs l'emportent sur les craintes Pour l'heure, M. Draghi considère que la BCE a fait son travail en baissant son taux directeur d'un quart de point en novembre et a besoin de temps pour analyser les effets de cette action sur les marchés et l'économie. Le banquier central n'a annoncé aucune des mesures guettées par les marchés pour encourager le crédit aux entreprises et ménages afin de soutenir l'investissement et la croissance, comme un nouveau prêt à long terme aux banques ou des rachats d'actifs bancaires adossés à des prêts. Mais tous les instruments autorisés par les traités "sont éligibles", a-t-il répété. Toutes ces mesures sont à l'étude, a-t-il encore dit, évoquant la nécessité d'attendre en raison de la "complexité" de la situation et le besoin d'informations supplémentaires. Cet immobilisme est sans doute lié aux indicateurs publiés en janvier qui montrent que "la croissance de la zone euro s'améliore progressivement", estime Howard Archer, chef économiste Europe chez IHS. Carsten Brzeski souligne que, dans le discours introductif à sa conférence de presse, M. Draghi "a pour la première fois depuis longtemps parlé de la reprise avant de parler de l'inflation". "C'est pour nous la meilleure des explications à l'inaction de la BCE aujourd'hui. Aujourd'hui au moins, les espoirs de croissance l'ont emporté sur la peur de la déflation", souligne-t-il. Une conclusion à laquelle arrivaient manifestement aussi les marchés, les principales places boursières européennes évoluant en nette hausse après les propos de M. Draghi. Ce dernier s'est montré plutôt optimiste pour le crédit. Selon lui, c'est la perspective de l'examen détaillé de leurs bilans, dans le cadre de l'union bancaire en préparation, qui empêche les banques de prêter actuellement. Clairement, selon lui, "le niveau de crédit est inférieur à ce qu'il serait s'il n'y avait pas l'AQR", acronyme pour désigner cette analyse détaillée, qui sera menée par la BCE cette année. Mais, à moyen terme, le processus "sera positif pour le crédit puisqu'il va accroître la confiance dans le système bancaire", a-t-il ajouté. Quant à la tourmente traversée par les pays émergents, la zone euro y a opposé "une bonne résistance" pour le moment, a-t-il jugé.