Un éternel recommencement ? On disait en 2004 que Ali Benflis a été hypertrophié pour donner du crédit à l'élection présidentielle et légitimer le " vainqueur ", c'est-à-dire le président. Le duel de 2004 se renouvelle en 2014, soit dix années plus tard. Les mêmes hommes mais pas le même contexte. Même incertitude de départ, puis même certitude à l'arrivée. S'il y avait eu un face-à-face mais des meetings séparés, aujourd'hui les choses ont changé. Le président a établi une procuration à " ses " lieutenants, soit Ouyahia, Sellal, Belkhadem, Benyounes, Saadani, Ghoul, Bensalah pour " combattre " Benflis, un combat à 7 contre 1. Par contre, Benflis est seul contre tous. Contre l'équipe de Bouteflika, contre également les boycotteurs, alors qu'il aurait voulu que les boycotteurs ne boycottent pas, car ce sont autant de voix qui ne vont pas s'exprimer pour lui. Il aurait mieux valu qu'ils appellent à voter pour Benflis, ou alors qu'ils jouent un rôle dans la surveillance des urnes pour empêcher la fraude. Particulièrement, tous ceux qui sont passés par le pouvoir et qui n'y sont plus se définissent comme opposants au sein du système. Cela implique que le système a encore une longue vie devant lui, devant nous. On voit que nous n'avions pas eu raison quand on disait presque tous, il y a de cela quelques années, que le système a atteint ses limites. Eh bien ça n'en est pas fini de ses capacités de renouvellement. Il n'a pas épuisé toutes les possibilités d'alternance en son sein. Le système ne serait donc pas agonisant. Le système ne représente pas uniquement ceux qui ont participé à la guerre d'indépendance, mais la confirmation proviendrait de ce que l'alternance se ferait encore en son sein et ne concernerait pas une opposition authentique. Une opposition authentique ? Quelle opposition authentique ? C'est quoi une opposition authentique ? Authentique, car elle a toujours été hors du pouvoir ou contre le pouvoir ? Nous avons des oppositions, non pas parce qu' elles sont contre le pouvoir, mais parce qu'elles ne sont pas intégrées au pouvoir. La nuance est de taille. A cette opposition qui n'a jamais été intégrée au pouvoir, s'ajoute une opposition d'une autre nature. C'est celle qui a été au pouvoir et qui a quitté celui-ci (ou bien elle en a été débarquée). Nous avions déjà dit que nos décideurs (il y en a bien qui décident) ne sont pas de ceux qui laissent faire le hasard. Ils ne sont pas de ceux qui vont au lit sans préparer le lendemain et d'autres lendemains. Dans le système qui " nous " a formés, toute décision prise par les " invisibles " l'est disait-on, (disaient-ils) en faveur de l'intérêt national. C'est leur conviction. Dans ce référentiel, n'importe qui accède à un poste, comme celui qui est le plus en vue et le plus discret, agira comme celui qui est en ce poste actuellement A ce niveau de décision, (encore qu'il n'y a pas de décision individuelle , mais plutôt de décision concertée ) tout ce qui s'entreprend l'est par rapport aux risques et menaces identifiés selon un traitement sérieux des données. Pour en revenir au système, tous les analystes pensent que l'alternance au système n'est crédible que si elle concernait l'opposition. L'opposition ? Qu'à cela ne tienne, elle concernera l'opposition. Mais quelle opposition ? Que reste-t-il de l'opposition, de celle qui se disait intraitable ? Celle-ci est laminée. Ce ne sont pas les élections qui l'ont laminée. L'intelligence des décideurs est passée par là. Les partis incontrôlables ont disparu, c'est-à-dire ceux qui peuvent introduire cette dose indésirable de hasard. Ceux qui restent peuvent bénéficier d'une autonomie et agir comme ils veulent, car leur taille ne les place pas comme candidats sérieux d'accès aux rangs de faiseurs de bouleversement. Quelle opposition ? Celle qui a été déjà au pouvoir et qui est candidate à son retour.