La croissance économique chinoise est descendue à 7,4% au premier trimestre, au plus bas depuis 18 mois, selon un chiffre officiel publié cette semaine, un ralentissement assumé par Pékin pour prix de la réorientation de son modèle économique. Sur les trois premiers mois de l'année, la progression du produit intérieur brut (PIB) s'est établie très en deçà des 7,7% constatés au quatrième trimestre 2013 --mais s'avère légèrement meilleure que la prévision médiane des analystes interrogés (7,3%). Il s'agit de la plus faible performance de la deuxième économie mondiale depuis le troisième trimestre 2012, selon les statistiques précédemment publiées par le Bureau national des statistiques (BNS). "L'économie dans son ensemble a progressé dans une fourchette appropriée", a commenté Sheng Laiyun, porte-parole du BNS, imputant le ralentissement à l'ambitieux programme de réformes structurelles du gouvernement. "Ces réformes en sont à un stade crucial", et les efforts des autorités pour rogner les sévères surcapacités industrielles, réaliser des économies d'énergies et mieux protéger l'environnement "ont un prix inévitable", a-t-il expliqué. Après une croissance de 7,7% en 2012 puis en 2013 --un niveau plus vu depuis 1999--, Pékin s'est fixé pour 2014 un objectif de 7,5%, soit le plus faible taux de croissance du géant asiatique depuis près d'un quart de siècle.
Une économie "sous pression" Le marché du travail, priorité des autorités communistes, a certes bien résisté, avec 3,44 millions de nouveaux emplois urbains créent au premier trimestre. "Mais nous devons garder à l'esprit que l'environnement extérieur demeure compliqué et volatile", pesant sur les exportations du pays, "et que notre économie reste sous pression", a prévenu M. Sheng. Symptôme d'un environnement maussade persistant, la production industrielle a progressé de 8,8% sur un an en mars, a précisé le BNS, soit moins qu'attendu par les analystes interrogés par l'agence Dow Jones. Elle n'a connu qu'une faible accélération, après avoir progressé de 8,6% en janvier et février, à son plus faible rythme depuis 5 ans. Les ventes au détail, baromètre de la consommation des ménages, ont quant à elles monté de 12,2% sur un an le mois dernier, un chiffre en ligne avec les prévisions du marché. Quant aux investissements en capital fixe, ils ont augmenté de 17,6% sur l'ensemble du premier trimestre, en-dessous des prévisions des experts. En dépit des récentes rafales de statistiques moroses ou décevantes, le Premier ministre Li Keqiang a exclu la semaine dernière tout plan de relance significatif de l'activité. Les autorités réitèrent au contraire leur volonté d'intensifier les réformes destinées à rééquilibrer le modèle de croissance, quitte à pénaliser quelque peu l'activité dans l'immédiat. Pékin souhaite notamment doper la consommation intérieure, renforcer le secteur privé et diminuer la dépendance vis-à-vis des exportations et des investissements dans les infrastructures. Parallèlement, le gouvernement veut réduire l'endettement des gouvernements locaux, rogner les monopoles des grands groupes publics et s'attaquer aux pans obsolètes de l'industrie lourde. -Vers de nouvelles mesures de relance?- "L'économie pourrait rebondir au deuxième trimestre grâce à des facteurs saisonniers" avec un regain traditionnel de l'activité à l'orée de l'été, a indiqué Liu Li-gang, économiste de la banque ANZ. Par ailleurs, quelques mesures de relance adoptées début avril par les autorités, notamment via des exemptions fiscales, devraient porter leurs fruits. Mais, avertit M. Liu, "ce sursaut ne sera durable que si la Chine consent à assouplir sa politique monétaire", encore étroitement corsetée par une Banque centrale soucieuse d'endiguer l'envolée des dettes publiques et privées. Pour nombre d'analystes, une piste possible serait un abaissement du taux de réserves obligatoires imposé aux banques, afin de les inciter à offrir davantage de prêts aux entreprises. "La très légère amélioration de certains indicateurs en mars est insuffisante pour que se concrétise l'objectif officiel des 7,5% de croissance annuelle", ont estimé dans une note les experts de Bank of America Merrill Lynch. Selon eux, si tout plan de relance massif est exclu par Pékin, "on peut s'attendre à ce que le gouvernement adopte un mini plan, des mesures coups de pouce concentrées sur les dépenses publiques dans le logement social, l'urbanisme et les régions (défavorisées) du centre et de l'ouest du pays". Par ailleurs, alors que le secteur immobilier, après des années de folle flambée, commence à piquer du nez --avec une baisse de 7,7% sur un an des ventes de logements au premier trimestre-- "certaines restrictions (pour les achats d'appartements) pourraient être ajustées dans les métropoles "moyennes", ont ajouté ces analystes.
Les banques rurales pourront réduire leurs réserves La Chine va réduire le montant des fonds que les banques rurales doivent mettre en réserve auprès de la banque centrale dans une tentative d'assouplissement monétaire limitée pour stimuler l'économie du pays, a rapporté l'agence officielle. Le gouvernement a indiqué qu'il s'apprêtait à autoriser une réduction des réserves obligatoires pour les succursales de banques commerciales ou coopératives établies dans les régions rurales, a indiqué l'agence de presse Xinhua sans plus de précisions. Cette annonce est intervenue dans la foulée de l'annonce par le gouvernement que le PIB de la Chine avait crû de 7,4% au premier trimestre, confirmant un ralentissement marqué de la deuxième économie mondiale. Certains analystes s'attendaient en conséquence à ce que le gouvernement autorise les banques à réduire leurs réserves obligatoires sur tout le territoire. Mais pour l'économiste Lu Ting de Bank of America-Merrill Lynch, cette mesure "ciblée" diminue les chances qu'elle soit généralisée à court terme. "L'impact macro-économique de cette mesure ciblée est plutôt faible, mais c'est un signal d'assouplissement monétaire d'un nouveau type qui est envoyé", a-t-il dit dans une note. Les réserves obligatoires sont des réserves financières que les banques doivent déposer auprès de la banque centrale. Les autorités monétaires s'en servent comme d'un instrument de politique monétaire. La dernière fois que la Chine a eu recours à un tel instrument remonte à 2012, quand le pays avait réduit de 20% le montant des réserves obligatoires des grandes banques et de 16,5% celles de moindre importance, selon des médias.