La hausse des prix à la consommation, principale jauge de l'inflation en Chine, a connu un net ralentissement en avril, à 1,8% sur un an, a annoncé avant-hier le Bureau national des statistiques (BNS), alimentant les craintes de tensions déflationnistes dans le pays. Favorisée par une forte modération des prix alimentaires, cette accalmie intervient après une accélération à 2,4% le mois précédent. L'inflation s'établit désormais à son plus bas niveau depuis octobre 2012. Elle se maintient par ailleurs très en dessous du plafond de 3,5% d'inflation annuelle reconduit en mars par Pékin, soucieux d'endiguer toute flambée des prix pour prévenir les mécontentements sociaux. L'inflation en Chine s'était maintenue à 2,6% en 2013, soit le même niveau qu'en 2012. Mais les experts évoquent à présent des risques de tensions déflationnistes, sur fond de ralentissement de la deuxième économique mondiale. "C'est une mauvaise nouvelle, parce qu'un taux d'inflation trop bas traduit une faiblesse de la demande, tant en termes de consommation que de besoins d'investissements", souligne Lu Ting, analyste de Bank of America Merrill Lynch. Selon lui, la consommation a notamment été pénalisée par le ralentissement de la hausse des revenus, la morosité de la conjoncture économique et l'énergique campagne anti-corruption entamée l'an dernier par Pékin. Le soudain refroidissement du marché immobilier a également contribué à miner la confiance des consommateurs et investisseurs. "Mais c'est également une bonne nouvelle, parce que la mise sous contrôle de la hausse des prix offre une marge de manœuvre à la banque centrale (PBOC) pour maintenir des taux interbancaires à un niveau bas et garantir une croissance stable du crédit", a ajouté Lu Ting. Les autorités --qui ont récemment réitéré leur objectif de croissance économique de 7,5% pour 2014-- pourraient ainsi assouplir leur politique monétaire après les sévères coups de vis de l'an dernier, et adopter des mesures de relance pour stimuler une activité fléchissante. "Ces assouplissements de la politique (monétaire) paraissent plus probables, alors que les dangers sur le marché immobilier se précisent et que l'inflation dégringole", abonde Zhang Zhiwei, de la banque Nomura. Il continue donc de tabler sur un abaissement, d'ici à fin juin, des taux de réserves obligatoires imposés aux établissements financiers, afin de les inciter à prêter davantage aux ménages et entreprises. "Une telle mesure, accompagnée par un ajustement des taux d'emprunt de référence tels que déterminés par la banque centrale, pourrait permettre d'améliorer de façon significative les conditions de crédit auxquelles font face les entreprises chinoises", ont observé les experts de la banque ANZ. Après un accès de fièvre en mars (+4,1% sur un an) en raison de distorsions dues au Nouvel an lunaire, les prix alimentaires n'ont augmenté que de 2,3% sur un an en avril, selon les chiffres du BNS. Dans le détail, les prix des légumes frais ont reculé de 7,9% sur un an le mois dernier par rapport à avril 2013, tandis les prix de la viande baissaient de 0,7% et l'huile alimentaire de 5,9%. La hausse des prix alimentaires est particulièrement surveillée par le gouvernement car elle frappe de manière disproportionnée les ménages les plus modestes qui dépensent une grande part de leurs revenus pour se nourrir. Pour sa part, l'indice mesurant l'évolution des prix à la vente des produits à leur sortie d'usine (PPI) s'est replié de 2% sur un an en avril, un recul cependant moins prononcé qu'en mars (-2,3%), selon le BNS. "Le PPI ne cesse de reculer depuis plus de deux ans, et c'est un indicateur important pour les tendances des prix à la consommation: on peut donc dire que les risques de déflation continuent de croître à l'horizon", ont commenté les analystes d'ANZ.