L'inflation en Chine s'est stabilisée à 1,6% sur un an en octobre, après être descendue le mois précédent à son plus bas niveau depuis près de cinq ans, selon des chiffres officiels publiés hier. La hausse des prix à la consommation mesurée sur un an, principale jauge de l'inflation dans la deuxième économie mondiale, était tombée à 1,6% en septembre, au plus bas depuis janvier 2010, après s'être établie à +2,0% en août. Le chiffre pour octobre, dévoilé par le Bureau national des statistiques (BNS), est exactement conforme à la prévision médiane des analystes interrogés par Dow Jones Newswires. Sur les dix premiers mois de l'année, l'inflation s'est établie à 2,1% --très en-deçà du plafond annuel de 3,5% que s'est fixé Pékin, soucieux d'endiguer toute flambée des prix, et bien en-dessous du niveau de 2,6% enregistré en 2013. Après plusieurs mois de ralentissement, qui ont avivé les craintes de tensions déflationnistes, cette stabilisation a été encouragée par un renchérissement plus important des prix alimentaires --composante importante de l'indice. Ainsi, les prix alimentaires ont grimpé le mois dernier de 2,5% sur un an, marquant une accélération par rapport à septembre (+2,3%), gonflés par un bond des prix des œufs et des fruits frais. Pour autant, les risques de tensions déflationnistes en Chine "devraient continuer de s'intensifier" dans les mois à venir alors que l'activité marque le pas, ont averti les experts de la banque ANZ. La croissance économique chinoise a ainsi ralenti à 7,3% au troisième trimestre, au plus bas depuis 5 ans. De son côté, l'indice mesurant l'évolution des prix à la vente des produits à leur sortie d'usine (PPI) s'est replié en octobre de 2,2% sur un an, après une baisse de 1,8% en septembre, a indiqué le BNS. Le PPI, considéré comme annonciateur des futures tendances des prix à la consommation, est négatif depuis plus de deux ans. "Le net reflux des prix des matières premières et le gonflement des surcapacités dans l'industrie --en raison de la grave correction du marché immobilier-- alimentent cette déflation du PPI", ont observé des experts de la banque Nomura. Sur fond de ralentissement de la production industrielle et de faiblesse de la demande intérieure, le reflux de l'inflation "laisse une marge de manoeuvre" à Pékin pour de nouvelles mesures de soutien à l'économie, estimaient ces analystes. Ils tablent notamment sur des baisses successives des taux de réserves obligatoires imposés aux banques --afin de doper le crédit aux entreprises. La banque centrale a par ailleurs confirmé la semaine dernière avoir procédé ces deux derniers mois à de fortes injections de liquidités dans des établissements bancaires --une mesure qu'elle pourrait réitérer, selon ANZ.
Excédent commercial gonfle, le ralentissement des échanges inquiète La Chine a enregistré en octobre un excédent commercial plus fort qu'attendu, mais sur fond de ralentissement des exportations et de faiblesse persistante des importations, de quoi aviver les craintes sur la santé de la deuxième économie mondiale. L'excédent commercial du géant asiatique, numéro un mondial des échanges de produits manufacturés, s'est établi le mois dernier à 45,41 milliards de dollars, en hausse de 46% par rapport à octobre 2013, ont annoncé samedi les douanes. C'est bien davantage que l'excédent de 31 milliards de dollars en septembre, mais cela reste en-deçà du niveau record de presque 50 milliards enregistré en août. Un panel de 11 analystes interrogés par le Wall Street Journal tablait pour octobre sur un excédent plus faible à 42,3 milliards de dollars. "Cet excédent s'explique avant tout par un ralentissement des importations, et les chiffres des exportations ne sont pas bien robustes. Ce n'est pas un excédent sain", a indiqué Liu Xuezhi, analyste de Bank of Communications, un établissement chinois.
Demande intérieure affaiblie Les exportations chinoises ont gonflé le mois dernier de 11,6% sur un an à 206,87 milliards de dollars, selon les douanes. C'est certes mieux que la hausse de 10% qu'escomptaient les experts, mais cela marque un très fort ralentissement par rapport à septembre, où une progression de 15,3% sur un an avait été constatée. Un signal morose pour la demande extérieure de la Chine, dont le PIB repose largement sur ses exportations --et ce alors que l'économie de l'Union européenne, son principal partenaire commercial, peine à se reprendre. Une tendance qui se confirme: les taux de croissance plus modérés des économies développées, mais aussi "la montée des coûts du travail en Chine et le renchérissement du yuan" devraient continuer de peser sur les exportations, a observé samedi Zhang Bin, économiste à l'Académie chinoise en sciences sociales. De leur côté, les importations du pays ont augmenté de 4,6% sur un an en octobre à 161,46 milliards de dollars, en-deçà de la prévision médiane des analystes (+5%). Les importations étaient réparties en hausse sensible en septembre (+7%) après plusieurs mois de repli, mais ce sursaut se sera vite essoufflé. "La demande intérieure demeure faible, en raison des vagues de déstockage à travers l'industrie, frappée par les réformes structurelles", a expliqué M. Liu. Pékin affiche sa volonté de "rééquilibrer" le modèle économique chinois --en rognant les monopoles des groupes publics, en diminuant les surcapacités dans l'industrie, et en endiguant drastiquement les dettes publiques. La pression sur les secteurs industriels traditionnels "a conduit à un recul de la consommation de ciment, charbon et autres matières premières", ce qui freine les importations, a souligné Liu Xuezhi. Le fort refroidissement des secteurs immobilier et de la construction, piliers de l'économie, après des années de surchauffe, assombrit encore la situation.
Coups de pouce de Pékin Dans ces conditions, "il apparaît difficile pour le gouvernement d'atteindre son objectif" d'une croissance de 7,5% des exportations en 2014, estime M. Liu. Les chiffres en demi-teinte publiés par les douanes viennent s'ajouter à des salves d'indicateurs économiques moroses. La croissance économique de la Chine a ainsi ralenti à 7,3% au troisième trimestre, au plus bas depuis 5 ans et en-deçà de l'objectif de 7,5% que s'est fixé Pékin pour l'année. De l'avis des experts, le pari sera très difficile à tenir, alors que la consommation est à la peine et que le marché immobilier continue de s'effriter. Pékin avait adopté au printemps "un mini-plan de relance" de l'activité --dont des réductions fiscales-- mais aux effets limités. La banque centrale a confirmé ces derniers jours avoir procédé ces deux derniers mois à des injections de 770 milliards de yuans (124 milliards de dollars) dans des établissements bancaires --afin de doper le crédit aux entreprises. Et le gouvernement a récemment promis de nouvelles mesures pour soutenir les entreprises importatrices. "La banque centrale va intensifier ses efforts pour abaisser le coût des financements (aux entreprises)", ont jugé vendredi les experts d'ANZ. Ils évoquent ainsi l'éventualité d'un abaissement général des taux de réserves obligatoires imposés aux banques. Les dirigeants chinois excluent cependant tout plan de relance de grande ampleur, susceptible de mettre en péril leur projet de "rééquilibrage".