Le président afghan, Ashraf Ghani est arrivé hier au Pakistan, pour sa première visite officielle chez son voisin avec qui Kaboul espère resserrer les liens et travailler à rallier les rebelles talibans afghans à la paix. L'avion transportant M. Ghani s'est posé peu avant 10H00 locales (05H00 GMT) à Islamabad. M. Ghani devrait rester deux jours au Pakistan. Outre plusieurs entretiens officiels, il devrait assister aujourd'hui avec le Premier ministre pakistanais Nawaz Sharif à un match de cricket entre leurs deux pays à Islamabad, un symbole de détente après plusieurs années de tensions. Les deux pays s'accusent mutuellement de nourrir l'instabilité régionale en soutenant des groupes rebelles islamistes talibans, afghans en guerre contre Kaboul ou pakistanais en guerre contre Islamabad, le long de leur longue et poreuse frontière. Mais la présidence Ghani, entamée le 29 septembre dernier, pourrait être l'occasion d'améliorer ces relations au moment où l'Otan retire ses troupes de combat d'Afghanistan. Les tensions entre les deux pays ont été soulignées la semaine dernière lorsqu'un rapport du Pentagone a affirmé que le Pakistan continuait à agir pour déstabiliser l'Afghanistan. Le Pakistan avait été l'un des trois seuls pays à reconnaître le régime fondamentaliste afghan des talibans, avant qu'ils ne soient chassés du pouvoir par les Occidentaux à la fin 2001 et n'entrent en rébellion contre Kaboul. L'armée pakistanaise reste aujourd'hui encore réputée proche des rebelles afghans, et son rôle est donc considéré comme crucial pour ramener la paix en Afghanistan après 13 ans de conflit et alors que les talibans contrôlent plusieurs régions, notamment le long de la frontière pakistanaise. La sécurisation de la frontière, où des incidents ont fait plusieurs morts ces dernières années, sont au menu des discussions avec M. Ghani, a précisé Islamabad. Ashraf Ghani, un économiste de 65 ans, a succédé à Hamid Karzaï, après une victoire contestée à la présidentielle sur son rival Abdullah Abdullah, avec qui il a accepté de partager le pouvoir sous la pression de Washington, premier bailleur de fonds du pays. M. Karzaï, seul homme à avoir dirigé le pays depuis 2001, entretenait des relations houleuses avec l'Occident comme avec Islamabad, accusant régulièrement le Pakistan, où nombre de talibans ont trouvé refuge après 2001, de saboter ses efforts visant à rallier ces derniers à la paix. Depuis son arrivée au pouvoir, M. Ghani s'est rendu en Arabie Saoudite et en Chine, deux importants bailleurs de fonds du Pakistan, pour leur demander selon certains diplomates de faire pression sur Islamabad pour favoriser la paix en Afghanistan. Selon un diplomate occidental dans la région, Abdullah Abdullah, qui fait office de Premier ministre, souhaiterait notamment repartir de zéro avec le Pakistan et tenter de régler le problème taliban via des relations bilatérales. M. Ghani serait lui plus enclin à tenter, comme M. Karzaï avant lui, de rallier les talibans sans nécessairement passer par le Pakistan, selon la même source. M. Ghani a dès son arrivée au pouvoir apaisé les relations avec les Occidentaux en autorisant l'Otan à laisser en 2015 une force résiduelle de 12 500 hommes en Afghanistan, contre plus de 140 000 au plus fort de son intervention militaire en 2010. L'Otan doit mettre fin le 31 décembre prochain à sa mission de combat, laissant aux forces afghanes, réputées toujours fragiles, le soin de défendre seules le pays. M. Ghani s'est également engagé à favoriser le développement économique de son pays et à lutter contre la corruption endémique au sein de l'administration. La coopération économique et le développement des échanges bilatéraux seront également au menu des discussions d'hier et aujourd'hui.