La Réserve fédérale américaine (Fed), qui tient une réunion de politique monétaire hier et aujourd'hui, devrait maintenir son cap en affichant de la "patience" avant de relever les taux d'intérêt, sans doute cette année. Alors que la Banque centrale européenne (BCE) a déclenché un assouplissement monétaire sans précédent pour combattre les dangers de la déflation, la Fed au contraire rejoint lentement les starting-blocks pour une première hausse des taux en 2015. "Que la Fed commence à relever les taux cet été reste notre scénario de base", affirmaient dans une note les analystes de Barclays Research après l'annonce par la BCE qu'elle allait injecter massivement des liquidités dans le système financier pour relancer l'économie. L'initiative de la BCE ne devrait pas empêcher la Fed d'envisager une hausse des taux à partir de l'été, estiment de nombreux analystes. "Déjà lors de leur dernière réunion en décembre, les membres du Comité monétaire comptaient bien sur une action de la BCE. Elle était intégrée dans leurs attentes", a assuré Stephen Oliner, un ancien économiste de la Réserve fédérale. Au cours de leur réunion ordinaire qui s'achève mercredi sans conférence de presse ni nouvelles prévisions économiques, les membres du Comité monétaire (FOMC) se focaliseront sur l'influence que peut avoir le ralentissement de l'économie mondiale sur l'expansion américaine, affirme encore M. Oliner, expert à l'American Enterprise Institute (AEI). Mais "rien ne sera décidé au cours de ce meeting. C'est une réunion où l'on +attendra de voir+", ajoute-t-il. Quasiment tous les feux sont au vert pour l'économie américaine, hormis la persistance d'une inflation basse et l'absence de hausse des salaires. La croissance a caracolé au rythme le plus fort en onze ans, grimpant de 5% au 3e trimestre. Le chiffre du Produit intérieur brut du dernier trimestre 2014 est attendu vendredi et devrait progresser d'au moins 3,2%, selon la prévision médiane des analystes. Le taux de chômage, à 5,6%, s'approche de la fourchette haute de ce qui est considéré comme le plein emploi aux Etats-Unis, entre 5,2% et 5,5%.
Le joker: l'inflation "La carte imprévisible est celle de l'inflation", affirme Stephen Oliner. A 1,2% en glissement annuel selon l'indice PCE, elle reste sous l'objectif de 2% de la Fed et pourrait même descendre plus bas à cause de la chute des prix du pétrole. L'appréciation du dollar rend aussi les importations moins chères. "Cette économie est forte et il n'y a pas de raison de penser que la Fed va changer son évaluation par rapport à ce qu'elle pensait lors de la dernière réunion", estime Joel Naroff, économiste indépendant. A la mi-décembre, le Comité avait indiqué qu'il demeurerait "patient" avant une prochaine hausse des taux. La présidente de la Fed, Janet Yellen, avait précisé qu'il était "peu probable" qu'un relèvement des taux intervienne "au cours des deux prochaines réunions", ce qui implique un statu quo au moins jusqu'à fin avril. Les taux d'intérêt au jour le jour sont maintenus proches de zéro depuis fin 2008. Les marchés anticipent en fait une première hausse des taux en juin. "Je relèverais assurément les taux en juin. Ce serait un signe de force, de confiance. La reconnaissance que les Etats-Unis sont de nouveau sur les rails", a déclaré le P-DG de la banque Morgan Stanley, James Gorman jeudi au forum économique de Davos. "Je penche plutôt pour septembre. Je sais que la majorité des économistes mise sur juin mais je ne suis pas sûr qu'il y ait suffisamment d'informations sur la remontée de l'inflation d'ici là", estime pour sa part Stephen Oliner de l'AEI. Avec cette nouvelle réunion du FOMC, la patronne de la Fed Janet Yellen entamera sa deuxième année à la tête de la banque centrale et présidera un Comité en partie renouvelé, comprenant un peu plus de "colombes" que le précédent, partisans d'une politique monétaire accommodante. Cela ne devrait guère changer la trajectoire du FOMC, mais peut-être diminuer le nombre de voix dissidentes.
Le déficit budgétaire va se réduire encore en 2015 Le déficit budgétaire des Etats-Unis va diminuer en 2015 mais repartira à la hausse après 2017 du fait des nombreux départs à la retraite et des dépenses de santé, selon le Bureau du Budget du Congrès (CBO). Le déficit de l'Etat fédéral pour l'année budgétaire 2015 qui se termine en septembre devrait glisser à 468 milliards de dollars, soit 2,6% du produit intérieur brut (PIB), contre 483 milliards l'année dernière. En 2014, le déficit budgétaire public avait déjà atteint son plus bas niveau en six ans et était passé sous les 3% PIB pour la première fois depuis 2007. En 2015, la dette fédérale atteindra néanmoins 74% du PIB, un sommet depuis 1950. En 2016, le déficit sera encore contenu à 467 milliards de dollars. Il devrait ensuite se creuser sensiblement pour atteindre 739 milliards en 2020 et près de 1 100 milliards en 2025, soit 4% du PIB. Cette détérioration de la situation après 2017 s'explique par une progression des dépenses plus rapide que celle de l'économie. Principales responsables: les dépenses de santé ainsi que celles de retraite en raison des départs à la retraite de la génération des baby-boomers. Le service de la dette sera aussi à la hausse. Côté croissance, les estimations du Bureau du budget du Congrès misent sur une expansion soutenue de l'économie, le PIB devant progresser de 3% en 2015 et 2016. Les prévisions de la Réserve fédérale misent, elles, sur une croissance entre 2,6% et 3% cette année. Cette croissance sera portée par une hausse des dépenses de consommation, un progrès des investissements des entreprises mais aussi des investissements résidentiels, le tout aidé par le déclin des prix du pétrole et "des augmentations dans les rémunérations horaires", assure le CBO. Le taux de chômage, actuellement de 5,6%, devrait tomber à 5,3% au dernier trimestre de 2017 "s'approchant" du plein emploi.