L'accord de cessez-le-feu signé dans la nuit du mercredi au jeudi 12 février à Minsk rend d'abord optimiste - y aurait-il, en fin des fins, une faible lueur d'espoir? - autant qu'il rend, après mûre réflexion, perplexe. Pourquoi ? Le sommet des quatre qui s'est tenu dans la capitale du Belarus, même s'il semble avoir conduit à un consensus répondant et aux aspirations de Kiev et à ceux des RPD-RPL puisque les parties belligérantes ont signé l'accord de paix, n'est cependant rien de plus qu'une étape provisoire supposant des négociations poussées entre l'Ukraine et le Donbass sans l'encadrement des puissances occidentales et de la Russie. Dans la mesure où le conflit a dès le début était présenté comme une guerre civile - admettons-le - il semblerait normal que ses principaux protagonistes se mettent d'accord entre eux et sur les conditions du retrait définitif de l'artillerie lourde, des unités militaires ukrainiennes ainsi que des bataillons punitifs des frontières du Donbass et sur le statut étatique de la Novorossia. Rien n'est plus logique et en même temps rien n'est plus problématique. Premièrement, il apparaît douteux que Kiev se défasse de ses influences américaines ce qui, à vrai dire, reviendrait à faire preuve d'une plate ingratitude sachant à qui le roi du chocolat doit son trône. Les accolades de M. Porochenko avec M. Kerry en disent très long, de même que cette rencontre de M. Porochenko avec les leaders occidentaux qui fut préalable à la rencontre des quatre à Minsk. Inutile de dire que malgré quelques sages intentions motivées par la peur, ni la France, ni l'Allemagne n'ont de marge de liberté (lire de souveraineté) suffisante à s'opposer à la stratégie US entièrement orientée vers la guerre en Europe. J'en veux pour preuve, le projet de livraison d'armes létales à l'Ukraine pour la copieuse somme d'un milliard de dollars toujours de vigueur, à en croire le Congrès US. La France, l'Allemagne et la Russie parlent d'armistice, les USA parlent de réarmement. Curieuse contradiction. Deuxièmement, si la création d'une zone démilitarisée représente une condition sine qua non que l'on ne peut qu'applaudir debout, le projet de décentralisation formulé n'est pas le projet de fédéralisation dite " élargie " dont il fut question la semaine dernière au Kremlin. Il ne faut pas se faire d'illusions. Les blessures sont trop profondes pour que le Donbass consente à obéir à la juridiction de Kiev surtout dans un pays en faillite et divisé comme l'a brillamment démontré l'échec de la dernière mobilisation. La guerre rendant ses victimes autrement plus lucides qu'elles ne le sont en temps de paix, le Donbass comprend parfaitement que ce nouveau Minsk résulte de l'immense déroute de Debaltsevo et non pas d'une prise de conscience subite des souffrances endurées par des civils qui ont eu le tort de rejeter un putsch sponsorisé de l'extérieur. Quel serait le sort de Porochenko si les 8 000 soldats ukrainiens pris au piège avaient été exécutés par l'insurrection? Il est clair que ses jours politiques auraient été comptés. Troisièmement, il semble étrange que ce sommet de Minsk qui n'est que du réchauffé - il suffit que l'armée ukrainienne connaisse de mauvais jours pour qu'une trêve soit déclarée - soit perçu comme " un sommet de la dernière chance " sinon, nous dit-on avec une obstination frôlant l'hypnose, c'est la guerre. Entre qui et qui? Elle a déjà lieu en Ukraine. Voudrait-on insinuer que ses frontières s'élargiraient impliquant de nouveaux territoires? Laisserait-on entendre qu'il s'agira d'une guerre entre l'OTAN et la Russie,la livraison d'armes létales clairement destinées à frapper des civils ethniquement russes à 60% enfermant Moscou dans un dilemme moral d'une éminente gravité? Si c'est le cas, l'Europe sera entraînée dans une épopée sanglante dont elle sortira profondément meurtrie. Les promenades de BHL à travers Kramatorsk aux côtés de Porochenko la veille du sommet, n'en seraient-elles pas la sombre préfiguration? Nous en aurons des nouvelles d'ici peu.
Politiquement correct, militairement ingérable ? L'enfer est pavé de bonnes intentions. C'est la première impression qui vient en tête à la lecture des clauses de l'accord de Minsk, conclu au terme d'un marathon diplomatique. Sur le papier tout est réglé comme une partition. Horaire de cessez-le-feu, ligne de démarcation, gestion des armes lourdes, échange de prisonniers, contrôle du bon respect de ces points, esquisse d'un processus politique et, notamment, électoral, en vue d'une sortie de crise… dans les grandes lignes tout est prévu. Le souci, puisque nous avons évoqué l'enfer, est que le diable se cache souvent dans les détails. Et que les modalités de l'accord, d'un point de vue militaire, sont si problématiques qu'elles semblent inapplicables en l'état. Certes le retrait des armes lourdes à plusieurs dizaines de kilomètres de part et d'autre de la ligne de front actuelle est un bon point. Les civils seront théoriquement à l'abri des lance-roquettes multiples disposant des portées les plus longues. De même le retrait des belligérants sur les limites d'une zone tampon, démilitarisée, permettra d'éviter que des accrochages menés par des éléments incontrôlés, dotés d'armes légères, ne dégénèrent en batailles. Mais il faut encore que ce retrait des troupes et du matériel, qui doit s'opérer sous le contrôle de l'Organisation pour la Coopération et la Sécurité en Europe (OSCE), soit effectif. Ce n'est pas acquis tant l'OSCE manque de moyens et tant les esprits sont chauffés à blanc dans les deux camps. Par ailleurs, il suffit de regarder une carte pour se rendre compte que les modalités de l'accord, si elles devaient être appliquées à la lettre, avantageraient sensiblement les troupes de Kiev, au détriment des séparatistes. Car ces derniers, s'ils sont victorieux sur le terrain, ne disposent pas d'un atout dont les forces " loyalistes " disposent, celui de la profondeur stratégique. Alors que l'armée ukrainienne peut accepter, dans une certaine mesure, de céder du terrain vers l'ouest, les séparatistes sont dos à la mer et à la frontière russe, arc-boutés dans une zone de taille modeste, représentant, grosso modo, les deux tiers de la Belgique. Tout recul, tout retrait, est de nature à fragiliser leur dispositif. Or s'ils se plient scrupuleusement aux termes du texte signé, ils doivent se retirer sur leurs positions de septembre dernier. Cela signifie que, dans le sud du Donbass, les séparatistes ne conserveront qu'une mince bande de terre entre la frontière russe et les positions des forces ukrainiennes. En cas d'offensive majeure d'une armée ukrainienne, renforcée à la faveur de la trêve et en mesure de traverser rapidement la zone tampon pour venir au contact, ils pourraient se retrouver acculés au littoral ou rejetés en Russie. De même la ville de Lougansk, dont les séparatistes ont réussi à repousser à quelques kilomètres l'armée et la garde nationale ukrainiennes depuis septembre dernier, marquerait à nouveau la ligne de démarcation et pourrait, en cas de rupture du cessez-le-feu, être menacée. Enfin le chaudron de Debaltsevo, à l'intérieur duquel sont encerclés 6 à 8000 soldats ukrainiens, constitue un saillant s'enfonçant profondément au cœur du dispositif séparatiste. Ce saillant, s'il ne fait pas l'objet d'un retrait avéré des forces ukrainiennes, pourrait servir de base à ces dernières pour une offensive en direction du sud et de la frontière russe, attaque susceptible de tronçonner en deux segments le dispositif des séparatistes. Il semble difficilement concevable que ces derniers acceptent un tel risque. La perspective d'une ultime bataille, permettant de fermer la poche de Debaltsevo et de réduire les troupes ukrainiennes à la reddition pour mettre en place un cessez-le-feu sur une ligne de front optimisée ne peut donc être exclue. Les armes doivent se taire samedi soir, à minuit. Il se pourrait qu'elles tonnent plus que jamais d'ici là. Quitte à remettre l'accord lui-même en question.
La Maison- Blanche salue les accords de Minsk Washington qualifie les accords de Minsk de "potentiellement importants" pour un règlement pacifique de la crise en Ukraine. La Maison- Blanche salue les accords de Minsk en tant que pas vers le règlement du conflit (ukrainien), a déclaré jeudi Josh Earnest, porte-parole du président américain Barack Obama. "Ces accords sont une démarche potentiellement importante vers une résolution pacifique du conflit et le rétablissement de la souveraineté de l'Ukraine conformément aux accords de Minsk datant de septembre 2014", a indiqué M. Earnest. L'accord conclu à l'issue de 15 heures de négociations engage notamment l'armée ukrainienne à retirer ses armements lourds de la ligne de confrontation actuelle et les insurgés, de la ligne fixée dans les accords de Minsk de septembre 2014. Cette disposition permet de créer une "zone tampon" élargie et d'empêcher les troupes ukrainiennes de bombarder les villes contrôlées par les forces armées des républiques populaires de Donetsk et de Lougansk.
Merkel et Hollande ont contribué au succès de la rencontre de Minsk Selon le chef de la diplomatie russe, la participation de François Hollande et d'Angela Merkel aux négociations de Minsk a contribué à la mise au point d'un document visant à stopper le conflit dans l'est de l'Ukraine. La Russie apprécie la participation des dirigeants allemand et français au règlement de la crise en Ukraine et leur contribution au succès des négociations de Minsk, a indiqué jeudi le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov. "Nous saluons la participation active de la chancelière allemande et du président français aux travaux visant à régler la crise en Ukraine. Leurs efforts ont contribué au succès de la rencontre au "format Normandie" qui s'est achevée il y a quelques heures à Minsk", a déclaré le ministre lors d'une réunion solennelle consacrée à la Journée du diplomate russe.