Après neuf ans d'opacité, Amazon a levé le voile jeudi sur son activité de "cloud", qui s'avère rentable et justifie les importants investissements réalisés par le géant de la distribution pour la développer. Lancée en 2006, Amazon Web Services (AWS) a enregistré un bénéfice opérationnel de 265 millions de dollars, en hausse de 8,2% sur un an, pour un chiffre d'affaires de 1,57 milliard (+49%). Elle propose des services d'informatique dématérialisée aux entreprises, comme le stockage et la diffusion de contenus, des serveurs virtuels. Le "cloud" génère désormais 7% des 22,72 milliards de dollars (en hausse de 15% sur un an) de chiffre d'affaires du groupe de Jeff Bezos et croît à un rythme plus élevé que les autres activités, notamment le commerce en ligne (+24%), selon un communiqué. "Ces résultats ont dépassé nos attentes", salue la banque Jefferies, mettant en avant la marge qui s'élève à 17%. Les concurrents Microsoft et IBM revendiquent des revenus de respectivement 6,3 milliards de dollars et 7,7 milliards de dollars dans le "cloud", marché en plein essor. Mais ceux-ci sont gonflés par des produits et services comme Office 365 ou des logiciels qui sont associés à leurs offres. A Wall Street, l'action Amazon s'envolait de 6,62% à 415,52 dollars vers 22H30 GMT dans les échanges électroniques suivant la clôture de la séance.
5 milliards de revenus "Amazon Web Services est une activité de 5 milliards de dollars (par an) et croît vite. En fait, elle accélère", s'est réjoui M. Bezos. Son activité atteindrait entre 6 et 9 milliards de dollars, calculent les analystes, jugeant les projections du dirigeant "conservatrices". C'est un soulagement pour Amazon car "tous les yeux étaient tournés vers le +cloud+", explique Daniel Kurnos, expert chez Benchmark Co. Face à l'omerta d'Amazon beaucoup se demandaient en effet si AWS, qui est positionné loin du coeur de métier du distributeur, était une vache à lait ou un puits de pertes. Le groupe noyait jusqu'ici les résultats d'AWS dans une catégorie fourre-tout pour ses activités périphériques. Cette transparence pourrait augurer du fait qu'il envisage de donner son indépendance à AWS, voire de l'introduire en Bourse, avancent certains analystes. D'autant qu'Amazon a commencé à diversifier cette activité puisqu'elle propose depuis février un service de messagerie et de calendrier sécurisé à destination des entreprises. Selon le cabinet Synergy Research, Amazon contrôle environ 30% du marché mondial du segment du cloud d'infrastructures (Iaas) et de plateformes (Paas). Il devance de loin Microsoft (10%), IBM (7%) et Google (5%) qui ont déclaré une guerre des prix. Le groupe de Seattle (ouest) continue toutefois à perdre de l'argent et ses dépenses, très critiquées, ne sont pas près de refluer. Sur les trois premiers mois de l'année, la perte est de 57 millions de dollars, contre un bénéfice net de 108 millions de dollars au premier trimestre 2014. La marge opérationnelle s'est améliorée à 1,1% des ventes mondiales, contre 0,7% il y a un an. Les dépenses ont bondi de 15% à 22,46 milliards de dollars sur un an, creusées par la boulimie d'investissements du groupe. Amazon, simple libraire en ligne à sa création en 1995, a élargi son écosystème avec un succès divers. Il a lancé un service de livraison en une heure (Prime Now) pour les abonnés de son offre payante --99 dollars par an-- "Prime", qui donne accès à un catalogue croissant de contenus numériques en ligne et à des livraisons gratuites. La société s'est également mise à vendre des produits frais et alimentaires (Amazon Fresh) et avait même commercialisé brièvement l'an dernier sa propre marque de couches-culottes (Amazon Elements). Pour le deuxième trimestre, Amazon s'attend à un chiffre d'affaires compris entre 20,6 et 22,8 milliards de dollars. Les analystes tablent sur 22,12 milliards. Mais le résultat d'exploitation s'inscrirait entre une perte de 500 millions de dollars et un maigre bénéfice de 50 millions. L'an dernier, le groupe avait accusé une perte opérationnelle de seulement 15 millions de dollars.