Les actionnaires d'Alstom ont voté mardi en faveur de la reconduction du mandat d'administrateur de Patrick Kron, le P-DG du groupe, et donné un avis favorable sur sa rémunération, dénoncée par certains salariés et actionnaires. Amenée à donner un avis consultatif, l'assemblée générale du groupe d'équipements pour l'énergie et les transports a voté à 87,18% (contre un niveau d'approbation supérieur à 95% pour toutes les autres rémunérations) en faveur de la rémunération du dirigeant au titre de l'exercice 2014-2015: une part fixe de 1,2 million d'euros, stable par rapport à l'année précédente, et une part variable de 1,27 million d'euros, conditionnée à des objectifs de performance. Avant l'assemblée, une trentaine de salariés CGT du groupe s'étaient réunis devant la salle du CNIT, à La Défense, où avait lieu la réunion, pour protester contre la rémunération variable de M. Kron, dénonçant le fait que les conditions de versement de cette rémunération ne prenaient en compte que l'efficacité pour l'actionnaire et jugeant que le dirigeant avait liquidé l'entreprise en vendant sa branche énergie à General Electric. Lors de la séance de questions, plusieurs actionnaires ont également protesté contre cette rémunération variable, soulignant qu'Alstom avait terminé son exercice décalé 2014-2015 avec une perte nette de 719 millions d'euros et que le groupe avait décidé de ne pas verser de dividende. Cette part variable, nous il y a longtemps que nous l'avons abandonnée, a ainsi déploré l'un d'entre eux, demandant au P-DG d'en faire de même. Je ne répondrai pas aux questions concernant mon salaire, a coupé le dirigeant. M. Kron s'est par ailleurs vu attribuer, fin 2014, une prime exceptionnelle en cas de succès de la transaction avec GE d'un montant égal à la valeur de 150 000 actions au cours de Bourse du jour de réalisation de l'opération. Au cours actuel (25,45 euros), cela représenterait environ 3,8 millions d'euros.
Prime de départ déguisée Cette prime a aussi fait grincer des dents lors de l'assemblée, et notamment chez l'actionnaire activiste PhiTrust et l'agence de conseil en vote Proxinvest, qui avaient fait parvenir des questions écrites au P-DG, assimilant cette rémunération à une prime de départ déguisée alors que vous laissez un groupe qui publie des pertes et est amputé des trois-quarts de son activité, après la cession des activités énergie. Une analyse balayée par le conseil d'administration, qui a répondu que cette prime correspondait bien à une rémunération exceptionnelle, selon la définition du code de gouvernement d'entreprise élaboré par l'Afep et le Medef. L'AG a également renouvelé les mandats de quatre administrateurs, dont celui de Patrick Kron (à 97,6%), et approuvé la nomination de trois nouveaux membres du conseil d'administration, dont Henri Poupart-Lafarge, président d'Alstom Transport depuis 2011 et amené à prendre la succession de M. Kron après la fusion avec General Electric (GE). Le conseil reconduira Patrick Kron dans ses fonctions de P-DG, a souligné lors de l'assemblée Jean-Martin Folz, administrateur référent et président du comité des nominations et rémunérations. M. Kron, P-DG d'Alstom depuis 2003, renoncera à ces fonctions une fois conclue la transaction avec GE et une fois effectuée la redistribution d'une partie du produit de l'opération aux actionnaires, a rappelé M. Folz. Les autres nouveaux membres du conseil d'administration sont Géraldine Picaud, directrice financière d'Essilor, et Sylvie Rucar, consultante au sein du cabinet Alix Partners. M. Kron a par ailleurs dit espérer que l'examen par la Commission européenne du projet de rachat du pôle énergie du groupe par General Electric se trouvait désormais dans sa dernière ligne droite, jugeant que cette période transitoire qui dure est évidemment très pénalisante pour l'entreprise. GE a confirmé le 13 juin avoir reçu une communication de griefs de la Commission européenne, document auquel nous avons répondu il y a (...) 72 heures, sur certains points en expliquant il n'y a pas de problème pour telle, telle, telle raison, et sur d'autres, on apporte ce qu'on appelle des remèdes, a déclaré le dirigeant, précisant ensuite quand je dis +on+, je veux parler de General Electric. Alstom est détenu à 29% par le groupe Bouygues, 62% du capital étant aux mains d'investisseurs institutionnels, 8% appartenant à des actionnaires individuels et 1% aux salariés.
GE entendu aujourd'hui La Commission européenne va entendre aujourd'hui des responsables de General Electric (GE) au sujet du rachat du pôle énergie du groupe français Alstom, a indiqué un porte-parole du conglomérat américain. Une audition à la demande de GE est prévue à Bruxelles jeudi 2 juillet, selon ce porte-parole, qui n'a pas donné davantage de détails. La Commission européenne, gardienne de la concurrence en Europe, doit se prononcer sur le rachat pour plus de 12 milliards d'euros des activités dans l'énergie d'Alstom par GE. En février, elle a décidé d'approfondir son enquête (dite de phase 2 dans le jargon bruxellois), en invoquant notamment une possible réduction de la concurrence dans les turbines à gaz de haute puissance, principalement utilisées dans les centrales électriques utilisant ce combustible. Aujourd'hui, seulement quatre fabricants de turbines se partagent ce marché: GE, Alstom, l'allemand Siemens et le japonais Mitsubishi Hitachi Power Systems (MHPS). GE, qui a reçu début juin les griefs de l'UE, est prêt à faire des concessions, dont une cession de ses brevets, sans pour autant affecter ses revenus. Le groupe n'a pas encore rendu publics les différents remèdes qu'il compte proposer à la Commission européenne. La décision de l'UE est attendue d'ici le 21 août. GE, qui a fait d'Alstom une pièce maîtresse pour son retour à ses racines industrielles, veut éviter une répétition du scénario de 2001 qui avait vu sa décision d'acquérir son compatriote Honeywell, pour 42 milliards de dollars, être bloquée par les régulateurs européens.